Critique Ciné : L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats (2023)

L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats // De Frédéric Tellier. Avec Benjamin Lavernhe, Emmanuelle Bercot et Michel Vuillermoz.

L'Abbé Pierre est une personnalité connue en France et a souvent été élue personnalité préférée des français. Un biopic sur l'Abbé Pierre était sensé sur le papier, il l'est beaucoup moins quand on voit le résultat. L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats c'est 2h15 (!) our survoler toute la vie depuis sa vocation ratée aux Capucins jusqu'à sa mort. Frédéric Tellier nous délivre alors une mise en scène monotone, sans grande ambition si ce n'est celle de coller des fantaisies à quelques moments du film (le split-screen horrible !) qui ne font que renforcer l'échec du film. Le réalisateur de Goliath (2022) ou encore Sauver ou périr (2018) n'arrive pas à donner un vrai élan à son film qui malgré l'enchainement des évènements (dont on ne profite finalement jamais vraiment) ne parvient pas à créer artificiellement (au moins) du rythme. On s'ennuie fermement rapidement alors que toute la partie autour de la Seconde Guerre dure, dure et dure encore.

Né dans une famille aisée, Henri Grouès a été à la fois résistant, député, défenseur des sans-abris, révolutionnaire et iconoclaste. Des bancs de l'Assemblée Nationale aux bidonvilles de la banlieue parisienne, son engagement auprès des plus faibles lui a valu une renommée internationale. La création d'Emmaüs et le raz de marée de son inoubliable appel de l'hiver 54 ont fait de lui une icône. Pourtant, chaque jour, il a douté de son action. Ses fragilités, ses souffrances, sa vie intime à peine crédibles sont restées inconnues du grand public. Révolté par la misère et les injustices, souvent critiqué, parfois trahi, Henri Grouès a eu mille vies et a mené mille combats. Il a marqué l'Histoire sous le nom qu'il s'était choisi : l'Abbé Pierre.

Ce qui est intéressant chez l'Abbé Pierre ce n'est pas forcément son combat contre le nazisme pour sauver les gens torturés (bien que cela reste un élément essentiel dans sa vie qui lui a donné l'envie d'aider son prochain). On a déjà vu des films sur la Seconde Guerre des dizaines de fois ces dernières années et cela commence à devenir redondant. Bien que le point de vue soit intéressant, L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats n'arrive pas à en faire quoi que ce soit. C'est monotone, sans véritable envie. La richesse de l'histoire de l'Abbé Pierre vient d'Emmaüs (qui fait référence à la religion, quelque chose que j'ai appris dans le film). Ce chemin de croix s'avère alors interminable, lançant le personnage dans tous les sens sans parvenir à en faire quelque chose de digne. Ce rapport constant à la religion devient pompeux et l'on en oublie alors un peu le combat contre la pauvreté. C'est mis en scène par moment mais dès que Frédéric Tellier tente des effets de style, cela apparaît plus risible que réellement pertinent. Comme s'il avait envie de faire des folies avec sa mise en scène sans que cela soit cohérent avec le reste.

Derrière de nombreuses images ternes, digne d'une fiction du lundi soir (Les Combattantes, vous vous souvenez), L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats a du mal à créer l'émotion. Même son appel à la radio de l'hiver 1954 est survolé, comme si c'était un passage parmi tant d'autres du film. Benjamin Lavernhe est plutôt bien dans le rôle mais on sent qu'il est constamment piégé par les archives vidéos de l'Abbé Pierre qu'il a clairement dû regarder pour préparer son rôle. Rien ne sort du cadre pour donner un peu d'originalité au récit et ainsi lui donner de l'ambition. Dès que l'Abbé Pierre vieillit, on sent les gimmicks et tics qui dans son jeu ont du mal à coller avec ce qu'il compose de particulièrement intéressant dans les jeunes années du personnage. L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats n'est clairement pas le biopic que j'attendais alors que la personnalité était justement intéressante à traiter au cinéma. Frédéric Tellier, à vouloir tout raconter, s'égare rapidement sans parvenir à accrocher pleinement le spectateur.

Note : 3.5/10. En bref, on s'ennuie poliment devant L'Abbé Pierre - Une Vie de Combats. C'est monotone et malgré le rythme créé par l'enchainement des évènements (épuisant à la longue), rien n'y fait le film laisse le spectateur sur le bord de la route.

Sorti le 8 novembre 2023 au cinéma