« … un long qui s’effilait, immobile, le nez sur les ardillons du goulot … compère brochet et commère la tanche … pfff ça cause classieux mais on n’est pas d’ici.
Nous attendions la dernière séance avec mon pote Eddy dans le salon de lecture/ boite à livres des sept Parnassiens quand le « Qui j’ose aimer » de Hervé Bazin m’envoya dans les cordes. 8…9…10 Out! Je viens d’encaisser un gnon de quelques années dans ma face.
1965. Je rentre de l’école et maman m’a fait la surprise là, sur la table de la cuisine, des œuvres de Guitry; Genevois; Cocteau; Maurois et Bazin parmi lesquels figure ce « Qui j’ose aimer » entre « Vipère au poing » et « La mort du petit cheval ».
On n’a pas la télé parce que les vendeurs à la sauvette n’avait pas l’article dans la musette sinon on aurait.
Maman s’est fait fourguer la totale avec facilités de paiement. Le père en rentrant du turbin le soir ne les a pas trouvé fastoches les conditions. Maman, elle n’est pas comptable, mais c’est elle qui gère par défaut le salaire à deux chiffres du soudeur qui lui fait un enfant tous les ans.
La gestion du budget familial est souvent revenu sur le tapis quand on dansait devant le buffet pour payer les traites. A l’époque la vente à domicile était un repère d’escrocs sans scrupules, les clauses de rétractation n’existaient pas, pas plus que le sauter en marche du brave travailleur désœuvrés qui n’a pas la téloche. A onze ans j’avais deux frangins et une frangine de mieux et déjà lu les auteurs ci-dessus avant que les huissiers déboulent.
Mais ce « Qui j’ose aimer » m’en apprit pas mal sur le « reste à ta place » des amours interdites