Magazine Environnement

Afghanistan : le débat réclamé sur l’envoi de soldats supplémentaires a fait défaut

Publié le 21 août 2008 par Hmoreigne

kaboul.1219312509.jpg

En mars dernier Nicolas Sarkozy annonçait l’envoi de renforts français en Afghanistan. La décision unilatérale du Chef de l’Etat avait finalement donné lieu à un débat parlementaire, le 1er avril mais, sans vote. L’article 35 de la Constitution prévoit seulement que “la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement”. Une subtilité qui permet de tenir la représentation nationale à l’écart des opérations militaires extérieures.

Certes, entre temps, la réforme des institutions si difficilement acquise est passée par là. S’il y a du mieux, l’esprit initial demeure.

Désormais, en cas d’engagement des forces armées à l’étranger, le Parlement est informé dans les trois jours. Mais il ne peut pas voter sur la question avant 4 mois, délai à partir duquel il autorise ou non la prolongation de l’opération.

Le PS,  le Front national, le parti communiste et une partie de la droite souverainiste s’étaient opposés en mars à l’envoi de renforts même si officiellement celui-ci était conditionné par l’engagement de tous les alliés sur la longue durée et la mise en place d’un volet civil pour la reconstruction de l’Afghanistan.

Ces questions « accessoires » devaient être tranchées lors du sommet de l’Otan à Bucarest, qui devait se tenir dans les semaines à venir. On ne sait pas finalement si elles ont été retenues.

Dans la polémique d’alors, Hubert Védrine, avait fait part au quotidien France Soir (édition du 1er avril) de son sentiment sur le choix présidentiel. Déjà, l’ancien ministre des affaires étrangères du gouvernement Jospin prévenait : « Il faut clarifier les objectifs de la coalition en Afghanistan ».

FRANCE-SOIR. Que pensez-vous de l’envoi de renforts en Afghanistan ?

HUBERT VÉDRINE. “C’est une décision importante qui mérite un débat. C’est bien que celui-ci ait lieu. Il s’agit en effet d’évaluer le rôle de l’Otan en Afghanistan et de clarifier les objectifs exacts de la mission. Il n’est jamais trop tard pour qu’un tel débat ait lieu. Il faut d’ailleurs rappeler que l’envoi des troupes françaises en 2001 avait eu lieu dans un contexte particulier. L’ensemble des alliés de la coalition considéraient alors l’intervention comme une riposte légitime non pas contre l’Afghanistan, mais contre un régime, les talibans, qui abritait l’organisation terroriste al-Qaida. De nombreux responsables militaires affichent leur pessimisme quant à cette guerre.

Est-on en train de perdre en Afghanistan ? Je n’ai pas les rapports d’expertise. Mais tout dépend des objectifs que l’on souhaite atteindre. Reconstruire l’Afghanistan ? C’est inatteignable, car c’est un Etat qui n’existait pas avant la guerre. Eradiquer tout réseau terroriste sur le sol afghan ? Ce sera dur, pour ne pas dire impossible compte tenu du terrain difficile et de la culture tribale du pays. En revanche, s’il s’agit de maintenir une pression pour empêcher de se constituer une base terroriste, avec des camps d’entraînement qui exporteront la violence dans le monde entier, alors nous pouvons y arriver.”

Dans le rapport que vous avez remis au président de la République en septembre dernier, vous alertiez notamment sur les dangers d’une « occidentalisation » de notre politique étrangère. N’est-ce pas ce vers quoi nous nous dirigeons, entre les renforts en Afghanistan et l’Otan ?

“C’est le risque, et je pense que cela ne serait pas conforme à nos intérêts. Il faut en effet distinguer l’« occidentalisme » de l’atlantisme traditionnel, défendu sous la France de la IVe République, incarné aujourd’hui par la droite non gaulliste et une partie de la gauche, et qui se résume à un suivisme par rapport aux Etats-Unis.

L’occidentalisme est en revanche une attitude agressive de l’Occident, sur la défensive face à ce qu’il considère comme la menace arabe ou chinoise. C’est une politique extrêmement dangereuse. Ses défenseurs, que l’on retrouve notamment dans l’administration Bush, considèrent en effet que l’Occident doit passer à l’offensive pour défendre ses intérêts.”

Ce dernier point, n’est pas sans rappelé la mise en garde formulée par le président Eisenhower le 17 janvier 1961, à la fin de son mandat, sur le poids du complexe militaro-industriel (cf vidéo).


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Hmoreigne 111 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte