L'édito : Iga Swiatek, la faute professionnelle

Sortie dès le troisième tour par la tchèque Linda Noskova, 50e mondiale, la quadruple championne de Grand Chelem se retrouve sous le feu des critiques, aussi bien sur le plan technique que tactique. Alors qu'elle tente d'éteindre l'incendie en relativisant sa défaite, une question légitime se pose : était-elle suffisamment préparée en arrivant à Melbourne ? La réponse est non. Voici pourquoi.Lauréate de sept tournois tournois du Grand Chelem, dont l'Open d'Australie en 2004, la belge Justine Henin ne cachait pas sa déception après l'élimination d'Iga Swiatek au troisième tour du majeur australien, n'hésitant pas à critiquer ouvertement les choix tactiques de la numéro une mondiale. En se laissant restreindre à un duel de frappeuses de fond de court, la polonaise, plusieurs fois trahie par un coup droit défaillant, n'a jamais semblé en mesure de proposer des solutions pour contrer la puissance de la tchèque Linda Noskova, plus régulière et plus constante. La conférence de presse d'après-match de la numéro une mondiale a ensuite pris des allures d'exercice d'équilibriste. Invoquant surtout le stress, Swiatek a préféré relativiser en s'estimant plus que jamais prête à fournir le travail nécessaire pour de nouveau gagner un Grand Chelem cette année alors que fin 2023, elle n'avait pas caché ses ambitions de remporter un jour les quatre majeurs sur la même saison. Du statut de favorite, Swiatek est passée à celui de pompier dont le rôle consiste désormais à contrôler un départ de feu qui pourrait rapidement s'étendre au vu des lacunes flagrantes qu'elle a montré durant cette rencontre. Justine Henin n'a jamais été une grande admiratrice du tennis pratiqué par la native de Varsovie, elle ne s'en est jamais cachée. Moi-même, à titre personnel, je ne le suis pas. J'ai toujours trouvé la technique de Swiatek indigeste, laborieuse, parfois pénible à regarder, même si ses méthodes de bûcheron lui ont permises de gagner trois fois Roland-Garros et une fois l'US Open. Cependant, l'événement qui s'est produit à Melbourne n'est pour moi pas uniquement une question de défaillance mentale, tactique ou technique. J'estime que c'est aussi dans la préparation que la polonaise à péché.Avant l'Open d'Australie, Swiatek avait l'opportunité de se préparer de la manière la plus idéale qui soit en se confrontant directement à ses principales rivales sur le circuit. Pour cela, elle pouvait s'aligner soit sur le tournoi de Brisbane, soit sur celui d'Adélaïde, ce qu'elle n'a pas fait, au final, préférant disputer la United Cup, compétition mixte par équipes née fin 2022 qui, bien que classée en catégorie WTA 500, s'apparente plus à un tournoi exhibition, voire à un club de vacances, qu'à un vrai tournoi de préparation. Regardons attentivement les résultats que la polonaise a obtenu en simple dames lors de cette épreuve :

• Victoire contre Beatriz Haddad Maia 6-2 6-2 ;
• Victoire contre Sara Sorribes Tormo 6-2 6-1 ;
• Victoire contre Qinwen Zheng 6-2 6-3 ;
• Victoire contre Caroline Garcia 4-6 6-1 6-1 ;
• Victoire contre Angelique Kerber 6-3 6-0 ;

À cela s'ajoutent les matches qu'elle a disputés en double mixte avec son compère Hubert Hurkacz. À la vue de ces résultats, on peut dire que la numéro une mondiale a rendu une belle copie. En revanche, on ne peut pas dire qu'elle ait affronté les meilleures joueuses du monde dans ce tournoi, sans vouloir faire offense à Zheng, Haddad Maia et consorts. Le tournoi WTA 500 de Brisbane, qui se déroulait en même temps que la United Cup, affichait un casting royal avec la présence de deux membres du "Big Four", Aryna Sabalenka et Elena Rybakina, ainsi que Jelena Ostapenko, Victoria Azarenka, Karolina Pliskova, Danielle Collins, Elise Mertens et Linda Noskova, entre autres. Comment se fait-il que Swiatek ait zappé ce tournoi au profit de la United Cup, cette dernière n'étant pas la meilleure des préparations pour l'Open d'Australie ? Si elle s'était alignée à Brisbane, Swiatek aurait pu se tester au contact des autres prétendantes à la victoire pour la première levée du Grand Chelem. C'était l'occasion pour elle de prendre la température, de savoir où elle en était concrètement sur le plan physique et mental alors que l'on sait très bien que les débuts de saison sont souvent délicats à gérer pour les championnes de la WTA. Or, cette occasion en or qui se présentait, elle ne l'a pas saisi, préférant le surf, les selfies et l'ambiance archi-détendue de la United Cup, ce tournoi de plagistes.
Au final, la faute de Swiatek n'est pas seulement tactique ou technique dans cette histoire. Elle est aussi professionnelle et surtout indigne d'une joueuse qui est censée montrer la bonne voie en tant que numéro une mondiale. Il suffit de voir où en sont en ce moment même des joueuses comme Aryna sabalenka ou Coco Gauff pour se rendre compte à quel point Iga Swiatek s'est plantée sur toute la ligne dans sa préparation. Que cela lui serve de leçon.