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RUSSIE:Les réalités économiques (et militaires) sont les meilleures alliées de la diplomatie européenne

Publié le 23 août 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Dimanche, 24 Août 2008 02:23 RUSSIE:Les réalités économiques (et militaires)  sont les meilleures alliées de la diplomatie européennePar WIlliam PETITJEAN Les guerres rapportent aux marchands d'armes et aux complexes militaro-industriels. Mais elles ont des effets catastrophiques sur l'économie en générale et ne font pas que des heureux sur les marchés financiers...De plus, elles ne suscitent pas cette confiance qui fait prendre des risques aux investisseurs. Entré dans un hypercapitalisme d'Etat, la pétropuissance russe s'en rend compte.Les riches milieux d'affaires s'inquiètent...pendant que les responsables de l'Armée tirent des leçons des combats sans triomphalisme. Un retour à la guerre froide se paierait très cher. Poutine le sait. 
Fuite des capitaux : 7 à 8 milliards en une semaine, admettent les officiels. Plus notent des observateurs qui ne s'autocensurent pas ... Le quotidien Kommersant du 22 août estime que la fuite de capitaux se monte au moins à 15 milliards de dollars. « Une fuite plus forte que pendant la crise financière d'août 1998 »....( 12 milliards de dollars avaient quitté le pays en moins d'une semaine.) » C'est beaucoup, d'autant que les attentes étaient fortes : 40 milliards cette année. La Deutsche Bank a déjà revu à la baisse ses prévisions : 15 milliards au maximum.
C'est particulièrement gênant par ce que les entreprises russes sont endettées de quelque 400 milliards de dollars et ont besoin des marchés financiers.
Bourse en berne : 30% de chute... En une semaine, les titres Gazprom, LuKoil et Rosneft, les principaux fleurons de l'économie russe, ont perdu respectivement 28 %, 30 % et 25 %.
Réserves en forte diminution (2, 7 à 3%) Cela fait mal, même si elles restent, avec 580 milliards de dollars, les troisième du monde derrière celles de la Chine et du Japon.
La guerre n'explique pas tout : les cours du dollar, l'inflation (15%), la baisse du prix du pétrole, la stagflation européenne joue un rôle non négligeable, mais les revues de presse russes le confirment : Vladimir Potanin, président d'Interros, qui regroupe les intérêts des grandes industries, est allé dire son inquiétude au Kremlin....Parmi des dégâts colatéraux de la guerre au Caucase, on note déjà un durcissement des conditions internationales de crédit et quelques feux orange sur les tableaux de bord. « Les nouvelles élites économiques russes sont les meilleurs alliés de la diplomatie occidentale », note Le Monde. Possible. C'est d'ailleurs l'un des éléments qui rendent optimistes les responsables de la diplomatie française :  «La nostalgie impérial, peut-être, le sort des Ossètes, si l'on veut, la nique aux Américains maladroits et bêtement impérialistes, sans doute, mais Courchevel, la Cote d'Azur, les palaces, le luxe, les mille et un plaisirs des affaires florissantes, c'est la priorité des priorités. Poutine le sait. Son pétrole ne vaut que si on le lui achète...Une vraie crise internationale remettrait en cause la plus belle réussite de l'ère Poutine. La réalpolitique est une réaléconomie»...
Dans le quotidien Rossiiskaïa gazeta, Igor Iourguens, vice-président de l'Union des industriels et des entrepreneurs russes,expliquait récemment : « Les relations pourraient se détériorer davantage. Les investissements de long terme dont nous avons tant besoin pourraient commencer à décliner, ce qui mettrait en péril nos plans de développement structurels ». Or, Igor OIourguens est un homme qui « pèse » au Kremlin. :Ami du président Dmitri Medvedev,il est réfléchir à une stratégie de diversification de l'économie, laquelle serait impossible sans une coopération technologique très développée avec l'Europe et les Etats-Unis.
C'est en partie pour le rassurer que vendredi, Poutine a annoncé que la part des innovations dans l'industrie russe devra augmenter pour atteindre 25% du volume total de la production industrielle d'ici 2020" Elle n'est aujourd'hui que de 6%. Sa ministre du développement, Elvira Nabioullina, a été plus concrète : « La Russie devra être leader mondial dans les domaines de la construction de missiles spatiaux, de l'aviation, de l'information et de l'éducation d'ici 2020 .La palme de certains secteurs de l'économie doit nous parvenir. Nous devrons devenir leader dans les cinq ou sept sphères des hautes technologies, en occupant 5 à 10% du marché » Un beau défi difficilement conciliable avec un retour à la guerre froide.
D'autant plus que Poutine veut mettre le paquet dans d'autres « domaines prioraitaires » : « Plus de 1.000 milliards de roubles (environ 28 milliards d'euros) seront versés au financement de nouvelles dépenses prioritaires du budget fédéral russe en 2009 c'est-à-dire à l'augmentation du financement de nos engagements, dont l'indexation des salaires, des pensions et des allocations »
Cette guerre du Caucase a servi aussi de test pour l'armée russe. Un test qui n'entraîne dans la presse aucun triomphalisme. Le quotidien Vedomosti., repris par RIA Novosti donne le ton : « Les résultats des combats ont de nouveau mis à jour les défauts de la préparation de l'armée russe et l'insuffisance de son équipement technique. De l'avis des experts du Centre d'analyse des stratégies et des technologies (CAST), ces opérations militaires ont montré que même les meilleures unités de l'armée russe sont dotées de moyens de reconnaissance, de commandement et de liaison dépassés. L'aviation russe, malgré sa supériorité indiscutable, n'a pas pu accomplir certaines missions ». Belle franchise !
Les spécialistes du CAST et du laboratoire d'économie militaire de l'Institut de l'économie de transition entrent dans les détails :
>>> L'aviation russe n'a pas su paralyser les forces aériennes géorgiennes ni neutraliser les positions d'artillerie et les moyens de DCA de l'adversaire. Il s'est avéré qu'elle manquait d'avions modernisés emportant des bombes et des missiles modernes, capables d'atteindre des cibles tout en maintenant un risque minimum pour les civils.
>>>Les troupes russes ont agi, pour l'essentiel, comme par le passé: des unités d'infanterie motorisée et de blindés ont combattu dans les montagnes. Bien que la formation d'unités de tireurs alpins ait commencé dans le Caucase du Nord depuis quatre ans, elles n'ont pas participé aux hostilités. Enfin, la DCA russe n'a abattu aucun hélicoptère ou avion géorgiens. « Cela témoigne, de l'avis des experts, de la faiblesse des moyens dont sont dotés les troupes et de l'instruction insuffisante des équipages ».
Vedomosti commente : « Les militaires espèrent que l'Etat tiendra la promesse faite par le premier ministre Vladimir Poutine de consacrer 70% du budget militaire au réarmement du pays.Le programme russe de réarmement pour les années 2007-2015 s'élève à 4.900 milliards de roubles, soit 625 milliards de roubles par an (17 milliards d'euros). Mais la Russie dépense déjà des sommes considérables pour équiper son armée: 368 milliards de roubles, soit plus de 10 milliards d'euros, en 2008, c'est-à-dire à peu près autant que la France. Cependant, le niveau de préparation au combat de l'armée russe est sensiblement inférieur. »
Autre conclusion tirée de cette mini-guerre : « Le fait que de jeunes appelés sous les drapeaux aient été tués au cours de cette dernière campagne doit retenir l'attention de la société et l'obliger à penser aux sérieux problèmes qui existent dans la structure de l'armée, et à persuader les dirigeants du pays de la nécessité de passer à une armée de métier » Nous voilà loin des discours triomphants et menaçants. La Réalpolitique, c'est d'abord de tenir compte des réalités intérieures...Poutine le sait mieux que quiconque. C'est le manque de réalisme et les illusions Potemkine qui ont tué l'Empire rouge. Comme les villages Potemkine avaient perdu l'Empire blanc.
William PETIJEAN

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