Berlin Nobody // De Jordan Scott. Avec Eric Bana, Sadie Sink et Jonas Dassler.
Dans l'univers du cinéma, certains projets suscitent des attentes élevées grâce à leurs thématiques intrigantes ou à leur distribution talentueuse. Berlin Nobody, réalisé par Jordan Scott, en fait partie. Adapté du roman Tokyo de Nicholas Hogg, ce thriller psychologique s'attaque à un sujet puissant : l'emprise insidieuse des sectes. Pourtant, malgré ce potentiel narratif et un casting prometteur, le film échoue à captiver, faute de profondeur dans son traitement. Dès les premières minutes, Berlin Nobody révèle sa trame principale : Ben, psychologue social et auteur à succès, tente de renforcer ses liens avec sa fille Mazzy, fraîchement arrivée à Berlin pour un semestre.
Un expatrié américain et psychologue social Ben Monroe emménage à Berlin pour approfondir ses recherches sur l'épidémie de mentalité sectaire. Alors qu'il s'immerge dans une secte allemande, sa fille adolescente rebelle, Mazzy, se lie avec un mystérieux et énigmatique garçon. Alors que ces deux mondes entrent en collision, Mazzy se retrouve en grand danger et Ben devra faire une course contre la montre pour sauver sa fille.
Ce cadre familial est rapidement éclipsé par l'ombre d'une secte mystérieuse qui se profile en arrière-plan.L'idée de plonger dans les rouages d'un embrigadement progressif est alléchante, mais le scénario déçoit par son manque de subtilité. Contrairement à ce que l'on pourrait attendre d'un thriller, le suspense est inexistant. Le déroulement est linéaire, chaque rebondissement est prévisible, et la fin est évidente bien avant que le générique ne défile. Cette absence d'intrigue palpitante prive le spectateur de toute immersion ou réflexion. Un bon film repose en grande partie sur la force de ses personnages. Ici, malheureusement, ceux de Berlin Nobody manquent cruellement de nuances.
Leur rôle dans l'histoire est téléphoné, et aucune ambiguïté ne permet de les rendre réellement captivants. Les membres de la secte, qui devraient incarner une menace oppressante et complexe, sont réduits à des stéréotypes. Même Mazzy, autour de laquelle gravite une partie de l'intrigue, peine à susciter l'empathie tant ses actions manquent de cohérence. On sent que les protagonistes servent uniquement à faire avancer une histoire qui, elle-même, n'apporte pas grand-chose.Sur le plan visuel, Berlin Nobody souffre d'une mise en scène sans relief. Les décors berlinois, bien qu'attrayants en théorie, ne sont pas exploités à leur plein potentiel.
La caméra se contente d'une approche fonctionnelle et sans imagination, laissant de côté toute ambition artistique. Certains choix esthétiques, comme des transitions maladroites ou des scènes filmées de manière trop rudimentaire, rappellent les productions télévisées des années 2000. Même la photographie, qui aurait pu rehausser l'ambiance, manque de finesse et n'offre aucun moment visuellement marquant. La musique, élément clé pour instaurer une tension ou enrichir une atmosphère, est ici aux abonnés absents. Si quelques basses intrigantes émergent brièvement dans certaines scènes, elles ne suffisent pas à imprimer une réelle identité sonore au film.
Pire encore,
Berlin Nobody est truffé de faux raccords flagrants qui nuisent à l'immersion. Une scène en particulier, où un pare-brise passe miraculeusement de mouillé à sec en un instant, témoigne d'un manque d'attention aux détails qui aurait pourtant pu être évité.Aborder le sujet des sectes dans un thriller est une idée ambitieuse. Ces organisations secrètes, avec leur capacité à manipuler et contrôler, offrent une matière riche pour explorer des thématiques psychologiques et sociales. Hélas, Berlin Nobody ne parvient pas à exploiter ce potentiel. Le film se contente d'effleurer les dangers de l'endoctrinement, sans jamais approfondir les mécanismes de manipulation ni les dynamiques internes d'une secte.
À la place, il déroule une intrigue superficielle et convenue, où les enjeux émotionnels sont inexistants. Avec des acteurs comme Éric Bana et Sadie Sink, Berlin Nobody aurait pu briller par ses performances. Mais même le talent de ces comédiens ne suffit pas à sauver un scénario mal écrit. Leurs personnages, sous-développés et sans consistance, ne leur permettent pas d'exprimer tout leur potentiel. On se surprend à regretter que leurs managers aient cru en ce projet. Ce gâchis est d'autant plus frustrant qu'ils méritaient mieux qu'un film qui ne leur donne pas les moyens de briller. En tant que fille de Ridley Scott, réalisateur de chefs-d'œuvre comme Gladiator, Jordan Scott portait sur ses épaules des attentes importantes.
Mais son nom seul ne suffit pas à garantir la qualité d'un film. Dans Berlin Nobody, elle livre une réalisation qui manque d'âme et de cohérence, rendant difficile de s'investir dans son œuvre. L'histoire, pourtant porteuse de promesses, se perd dans des choix narratifs et esthétiques maladroits. Le résultat est un film qui, malgré son sujet pertinent, tombe dans l'oubli dès qu'il se termine. Berlin Nobody avait tous les ingrédients pour marquer les esprits : un sujet fort, un cadre berlinois captivant, et un casting de qualité. Pourtant, il échoue sur presque tous les plans. Son scénario prévisible, ses personnages fades, et sa mise en scène datée en font une œuvre qui peine à retenir l'attention.
Ce film, qui aurait pu explorer avec subtilité les dangers des sectes et les tensions familiales, se contente d'un récit linéaire et sans éclat. En résumé,
Berlin Nobody est une déception qui s'oubliera aussi vite qu'elle a été découverte.
Note : 2/10. En bref, un thriller qui passe complètement à côté de son potentiel.
Sorti le 11 janvier 2024 directement sur Canal+
