Côté sorties, un peu de lumière : Nîmes-PSG en handball, en famille. Une ambiance formidable, un sport superbe, et une défaite d’un petit point à la dernière minute. Frustrant, mais quelle intensité. Et que le hand est sympa.
Et puis, il y a eu le travail... Ou plutôt, ces quelques instants arrachés à la semaine, et concentrés dans ce que l’on appelle joliment : un “séminaire de cohésion d’équipe”. Mascarade, tant le collectif va aussi bien que le sens au travail, la charge et le management sont délirants. Et il fallait bien que je retombe dans le piège.
On m’a demandé d’évaluer “mon niveau de piment” — je l’ai mis au maximum. On nous disait vouloir régler les tensions, alors j’ai cru naïvement que c’était le moment de parler vrai. D’aborder les problèmes. Pas pour accuser, mais pour comprendre, réparer, progresser. J’ai toujours cette idée que les mots soignent quand ils ne sont pas des armes.Mais l’exercice était faussé dès le départ. Parce qu’ici, comme dans tant d’endroits, exprimer un désaccord, soulever une difficulté, c’est forcément être “en souffrance”. Et le boomerang n’a pas tardé : le coach est venu me voir à la fin, l’air compatissant et les mots cinglants “Ta chef s’inquiète pour toi.”
La vieille ficelle. Qui consiste à psychologiser le moindre désaccord pour le neutraliser. On ne répond pas à ce que vous dites. On s’inquiète pour vous. Surtout quand vous être prétendument "hypersensible", la tarte à la fraise.
Ce qui, d’un coup, retire toute force à votre parole. Elle n’est plus politique ou collective : elle devient intime, suspecte. Et voilà comment on transforme une tentative de contribution en signalement de faiblesse.Et ça marche. Parce que, oui, ça fait mal. Et mon dos, peut-être, en porte la trace.
J’en ai 47 ans. 23 ans d’expérience professionnelle. 15 ans d’élu local. 10 ans de délégué sympa. Mais je tombe toujours dans le panneau. Je me dis que je peux apporter ma pierre à l’édifice, être une voix constructive. Mais le collectif, en réalité, ne m’a rien demandé. Et en sortant du rang, je deviens un problème.
Alors, si vous dérangez l’équilibre — entre hypocrisie bienveillante et confort hiérarchique — vous êtes vite recadré. En douceur. En silence. Avec des regards. Et l'étiquette : “en souffrance”.
Ce qui me gonfle, c’est de me dire que je ne tirerai jamais la leçon. Que j’espère encore. Que je crois encore au collectif, à la parole, à l’intelligence partagée.Mais j’ai une semaine de vacances. Des livres à lire. Une piscine à remplir.Pensons à ça. Et pas encore à l’été, qui s’annonce, lui non plus, pas de tout repos.
