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La rentrée des investisseurs

Publié le 05 septembre 2008 par Argoul

Nous l’écrivions le 30 juin dernier, inutile de se presser sur les actions, le marasme est loin d’être terminé. Les horizons envisagés sont 2009 pour les marchés, 2010 pour les économies et 2011 pour l’immobilier.

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L’été a vu le scénario classique se dérouler comme d’habitude : craintes exacerbées avant le grand trou des vacances, soulagement quand les chiffres du 1er trimestre ont été révisés, faisant espérer que « la récession » n’est décidément pas là, « surprise » quand la croissance européenne s’est vue ralentir et que la Chine, suivie de l’Inde, ont montré que leur croissance n’était plus aussi flamboyante que ça. On ne peut qu’être surpris de ces surprises. Quelle courte vue des économistes et les gloseurs de marché !

Un 1er trimestre est rarement mauvais aux Etats-Unis. Le dernier a été renforcé par les annonces de chèques aux ménages, le soutien sans condition de la Fed aux banques en difficultés, sa politique monétaire très très accommodante, la préoccupation du Congrès sur les faillites de prêteurs particuliers. Pourquoi voudriez-vous que ce soit « la crise de 29 » à la porte, à partir du moment où les institutions publiques (contrairement à 29) font ce qu’il faut ? Même si les déboires d’une industrie automobile obsolète crée déjà du chômage, si les mois à venir ne sont pas roses pour les prix du carburant à la pompe, et qu’aucune décision d’envergure n’aura lieu avant janvier prochain, avec un Président tout neuf.

La croissance européenne n’a jamais été bonne ; elle est structurellement fragile. La confiance des chefs d’entreprise et des consommateurs de la zone a reculé en août, à son plus bas niveau depuis mars 2003. Les retards des réformes du marché du travail en France continuent de freiner toute embauche durable, sauf celle des jeunes bien formés avec première expérience pour renouveler une pyramide des âges qui – elle non plus – n’avait pas été « prévue ». La fiscalité inadaptée et la bureaucratie dantesque empêchent un tissu solide de PME d’émerger en France. La force de l’euro tire vers le bas les marges des gros « machins » d’Etat que sont les Airbus, les centrales nucléaires, sans parler des TGV ou des Mirages. L’Allemagne s’en sortait mieux – malgré l’euro – mais sa faiblesse est sa démographie, avec sa consommation de vieux. L’Angleterre est trop financière pour ne pas pâtir des difficultés du crédit, des banques et des produits « structurés » ; elle est peut-être déjà en récession. Le vieux continent devient devient selon son nom et sa démographie se compare mal à celle des Etats-Unis. Pourquoi l’Europe – et surtout la France – aurait-elle donc pu échapper au ralentissement américain ?

Comment la Chine
– qui a dû forcer autoritairement nombre d’usines autour de Pékin à fermer le temps des JO – n’aurait-elle pas ralenti elle aussi ? D’autant qu’elle exporte moins aux Etats-Unis, cela se voit dans les chiffres (-10% d’excédent commercial en 2008). Fallait-il disposer d’un don de prescience extraordinaire pour le penser il y a plusieurs mois déjà ? La hantise du pouvoir chinois est la révolte sociale (les agriculteurs ont gagné 3,33 fois moins que les urbains en 2007), ce pourquoi un plan de relance est envisagé. Même chose en Inde (plus mauvais chiffre de croissance depuis 3 ans) et au Japon (plan de relance de 73 md€) : pourquoi le ralentissement américain ne serait pas un ralentissement mondial – alors que les « spécialistes » serinent à qui veut l’entendre que les Etats-Unis sont « le consommateur en dernier ressort du monde » ?

Dernier élément pour ceux qui croyaient avoir trouvé la martingale sur le marché russe. La brutalité militaire, le mépris diplomatique, l’assassinat sans vergogne de tout opposant interne, montrent que la Russie est très loin d’être un pays « libéral », bien disposé envers « les affaires ». Elle se vante de son pétrole et de son gaz – mais l’investissement intérieur est réduit et la démographie déclinante. Pourquoi jouer à terme un pays si mal en point ?

Nous avons donc assisté cet été au soulagement du ballon qu’on presse moins : il se regonfle. Chute du pétrole (évidemment en relation avec le ralentissement mondial), reprise du dollar (on apprend qu’un plan secret d’intervention massive avait été concocté par les principales banques centrales de la planète), rebond automatique des bourses.

Tout cela est pavlovien et ne fait pas une stratégie : il n’y a rien de changé dans le monde depuis juin. La crise doit se dérouler jusqu’à purger ses causes ; cela ne peut se faire en quelques mois. Donc que faire ? :

  • rester en emprunts d’Etat courts et majoritairement en liquidités ;
  • ne jouer les matières premières que par des fonds alternatifs ;
  • ne rien faire sur les actions – ni acheter, ni vendre, sauf à très court terme pour « jouer » ;
  • attendre pour l’immobilier que les prix se soient stabilisés;
  • s’occuper des enfants, surfer sur des blogs intéressants et relire de bons livres.

Alain Sueur, auteur des “Outils de la stratégie boursière”,écrit régulièrement sur Fugues & fougue


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