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Tant mieux, d'Amélie Nothomb

Publié le 21 août 2025 par Francisrichard @francisrichard
Tant mieux, d'Amélie Nothomb

Il se produisit un glissement dans son esprit, l'univers perdit son assise sous elle et elle fut soulevée par une découverte miraculeuse qui tenait en deux mots: tant mieux.

Adrienne a quatre ans quand elle fait la découverte de cette formule magique, entendue dans la bouche de sa mère:

Elle n'était pas sûre d'en saisir la signification. Elle sentait qu'il y avait là une décision de bonne humeur, la version joyeuse du sang-froid.

C'est l'été 1942, Adrienne a été envoyée passer deux mois chez sa grand-mère maternelle à Gand. Et cette formule va lui permettre non seulement de supporter Bonne-maman, qui est mauvaise, mais aussi de la retourner en sa faveur en se faisant apprécier par son chat, Pneu.

Ce séjour lui apprend beaucoup sur sa propre mère et, notamment, sur l'aversion maladive que celle-ci a pour les chats. Rentrée à Bruxelles chez ses parents, Astrid et Donatien, qui mènent chacun leur vie, qui avec tonton Louis, qui avec Daisy, elle en a la confirmation.

Elle a aussi la confirmation que, dans l'adversité, Tant mieux fonctionne et, notamment, lui fait aimer le double gentil de sa mère, auquel elle est flattée de ressembler, et d'ignorer son autre double qui peut être carrément mauvais, notamment avec sa soeur Jacqueline. 

L'été 1943, les deux soeurs, Jacqueline et Adrienne vont chez leur Bonne-maman de Bruges, la bien nommée. Adrienne aimerait bien rester chez elle, mais, la fin août venue, il lui faut rentrer à Bruxelles, où, un jour, suivant sa mère, elle voit agir son mauvais double:

Tant mieux quand même. Pourquoi? Pour rien. Parce qu'il fallait continuer à vivre.

Ses deux parents se disputent, jusqu'au jour où ils se réconcilient sur l'oreiller. Le fruit de leurs amours tardives - Astrid a trente-six ans - est de nouveau une fille, Charlotte, rejetée, tout comme l'est Jacqueline, par Astrid, ce qui conduit Adrienne à s'en occuper à sa place...

Plus tard, Adrienne, à qui l'indépendance de l'enfance retrouvée va bien, connaîtra l'amour avec un garçon à la faveur d'un échange épistolaire improbable et surmontera avec lui tous les obstacles dressés devant eux par leurs deux familles pour empêcher leur union...

Qui est Adrienne pour la narratrice qui n'apparaît qu'à la fin de ce roman, où les prénoms de presque tous les personnages sont inventés et commencent par un A, comme Amélie? Le lecteur l'apprend dans ce qui tient lieu d'épilogue et savoure ce qu'elle dit d'elle-même:

La haine, ce n'est pas mon genre. J'ai essayé de tout mon coeur. Je n'y suis pas arrivée et je ne le regrette pas. Haïr sa famille ne résout rien et ne peut que porter préjudice à soi-même: celui qui hait sa famille, même pour les meilleurs motifs, finira par se haïr.

Francis Richard

Tant mieux, Amélie Nothomb, 216 pages, Albin Michel

Livres précédents chez le même éditeur:

Le voyage d'hiver (2009)

Une forme de vie (2010)

Tuer le père (2011)

Barbe bleue (2012)

La nostalgie heureuse (2013)

Pétronille (2014)

Le crime du comte Neville (2015)

Riquet à la houppe (2016)

Frappe-toi le coeur (2017)

Les prénoms épicènes (2018)

Soif (2019)

Les aérostats (2020)

Premier sang (2021)

Le livre des soeurs (2022)

Psychopompe (2023)

L'impossible retour (2024)


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