Les esprits existent-ils? Peut-être. En tout cas, Stéphane Blok fait d'abord comme si.
Les esprits ont partie liée avec la nuit, c'est bien connu:
Attendons la nuit
Que les fantômes viennent nous trouver
Attendons la nuit
Que le tissu effleure l'escalier
Qu'un regard frôle nos paupières
Les esprits sont partout:
Les esprits viennent nous trouver
Que nous les voyions ou pas
Que nous les entendions ou pas
Cela ne change rien au fait qu'ils soient là
Il pense à ceux qui l'ont précédé ici-bas:
Disparus
Je devrais vous solliciter plus souvent
Vous laisser de l'au-delà vous déposer parmi nous
Vous laisser exister encore
Pour voir les esprits dans les êtres et les choses, il faut s'abandonner:
L'état dans lequel j'écris
Est celui agréable
De l'abdication
Incapable de rien
Je laisse à nouveau
L'alentour me parler
Ne rien faire:
Toujours faire
Faire quelque chose
Agir, entreprendre
Toujours, tout le temps
Faire qui nous empêche
De ne rien faire
Regarder
Ce faire
Qui nous refuse d'être ensemble
À ne rien faire
Refusant d'être de quelque part - il n'a pas de patrie -, et de faire, il confesse:
Sans but il n'y a pas de désillusion
Je ne m'intéresse plus à rien
Je ne veux plus me préoccuper des idées du monde
Pour ce rêveur, il y a bien assez
- à faire avec la nature,
- à vivre au milieu des autres,
- à profiter du jour et de la nuit.
Il ne peut pourtant manquer ensuite de s'interroger sur l'inéluctabilité de la mort, sur le sort de son âme et des âmes de ses ancêtres, sur l'existence même des esprits:
Peut-être que les esprits ne sont qu'imagination
Une fidélité au vivant qui n'a pas lieu d'être
Le vivant s'éteint et disparaît
C'est tout
Finalement il n'en croit rien, et c'est tant mieux:
La perte de l'être aimé témoigne du contraire
L'impossibilité du vide
La persistance des instants vécus
Présentement il conclut:
Il pleut de grosses gouttes
Sur le trottoir, sur la chaussée
Sur le bord de la fenêtre
Sur mon âme inconsolable
D'aussi loin que je me souvienne
Francis Richard
Ballades avec les esprits, Stéphane Blok, 88 pages, Bernard Campiche Editeur
Livres, chez le même éditeur, précédemment chroniqués:
Le Ciel identique (2014)
Les fables de la joie (2017)
Autres poèmes (2020)
Avec Blaise Hoffman, chez Zoé :
Fête des vignerons 2019-Les-poèmes (2019)
