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Et si le jeu vidéo devait, lui aussi, sauver le monde ?

Publié le 23 octobre 2025 par We Are Girlz @we_are_girlz

J’ai grandi avec un clavier puis une manette dans les mains. De Tetris à World of Warcraft, des Sims à Vampire Survivors, le jeu vidéo a toujours fait partie de ma vie. Comme beaucoup, j’ai vu ce loisir d’enfant devenir une industrie culturelle à part entière, qui rivalise aujourd’hui avec le cinéma et la musique réunis.

Derrière la créativité, l’évasion et la technologie, il y a aussi une réalité beaucoup plus concrète : le jeu vidéo a une empreinte carbone colossale. Et il serait peut-être temps d’en parler sérieusement.

Jouer, c’est polluer (un peu, beaucoup, passionnément)

L’étude publiée par Greenly, spécialiste de la comptabilité carbone, dresse un constat clair : notre loisir préféré pèse lourd sur la planète.

En 2025, 3,32 milliards de joueurs dans le monde allumeront chaque jour leur console, leur PC ou leur smartphone. Et selon les supports, l’impact varie énormément.

  • Une console de dernière génération (PS5, Xbox Series) émet en moyenne 72 kgCO₂e par an, fabrication, transport et utilisation compris.
  • Un PC gamer, avec sa grosse tour et ses composants puissants, grimpe à 149 kgCO₂e par an, en incluant l’énergie utilisée et la fabrication.
  • Même un simple joueur mobile, sur Candy Crush ou Balatro, génère environ 20 kgCO2e/an.
  • Une heure de streaming vidéo en ligne émet 3,2 kgCO₂e.

Ramené à l’échelle mondiale, cela donne le vertige : les joueurs sur PC représenteraient à eux seuls 277 millions de tonnes de CO2 chaque année. Soit plus que les émissions annuelles d’un pays comme la France.

On a beau ne pas voir la fumée sortir de nos consoles, le numérique n’a rien d’immatériel.

Le double écran qui chauffe : jouer et regarder jouer

À cela s’ajoute une autre habitude devenue incontournable : regarder les autres jouer en streaming. Sur YouTube ou Twitch, le streaming de jeux vidéo est devenu un spectacle mondial. Les créateurs réunissent des millions de spectateurs chaque jour.

Mais derrière le divertissement, il y a une facture énergétique : une heure de streaming sur YouTube émet 3,2 kgCO2e. Et si chaque joueur passait seulement 30 minutes à regarder des streams par jour, cela représenterait 584 kgCO2e par personne et par an. Regarder jouer pollue presque autant que jouer soi-même.

À côté des émissions directes, l’industrie du jeu vidéo fait aussi face à un autre défi majeur : l’e-waste. En 2022, à peine 22 % des déchets électroniques mondiaux ont été recyclés. Consoles, manettes et accessoires finissent souvent en décharge, libérant des métaux lourds et des plastiques non recyclables. Les consoles, en particulier, contiennent plus de 50 éléments chimiques différents, dont certains toxiques pour les nappes phréatiques.

Derrière chaque console se cache aussi l’extraction de métaux rares : cuivre, or, nickel, cobalt, lithium ou cadmium, autant de ressources indispensables aux puces et batteries des consoles. Leur exploitation est énergivore et consomme d’importantes ressources en eau, rappelant que le coût écologique commence bien avant la première partie.

Les géants du jeu face au défi écologique

Heureusement, certains acteurs du secteur commencent à s’en préoccuper. Sony met en avant la baisse de consommation de la PS5 par rapport à la PS4. Microsoft, de son côté, publie désormais des estimations de cycle de vie complètes pour ses consoles.

Mais c’est du côté des développeurs que les initiatives les plus intéressantes émergent : Epic Games, par exemple, a réussi à économiser 73 GWh d’énergie par an simplement en optimisant les menus de Fortnite. Une preuve que la sobriété peut aussi passer par des lignes de code.

Et puis, il y a Nintendo, souvent moqué pour ne pas suivre la course à la puissance, mais dont la Switch se révèle être l’une des consoles les plus sobres du marché avec 13,8 kgCO2e/an. Comme quoi, parfois, la modestie technologique peut être une force.

Jouer mieux, pas forcément jouer moins

Faut-il culpabiliser chaque session de jeu ? Non. Mais on peut, comme pour d’autres loisirs, réfléchir à notre manière de consommer.

Privilégier le dématérialisé plutôt que les disques physiques, limiter les accessoires inutiles, réparer ou revendre ses appareils plutôt que de les jeter. Et pourquoi pas se poser la question de la qualité du streaming, baisser la résolution, ou tout simplement faire une pause d’écran de temps en temps et ne pas “laisser tourner en fond”.

L’essor du cloud gaming (Xbox Cloud, PlayStation Now, Amazon Luna) est une alternative séduisante aux consoles physiques, mais sa consommation énergétique est encore plus élevée. Une heure de jeu en streaming via le cloud génère 0,44 kgCO₂e, car l’exécution se fait à distance sur des serveurs très énergivores. Si ces data centers ne sont pas alimentés par des énergies renouvelables, le bilan carbone global du jeu s’alourdit.

Comme le rappelle Alexis Normand, CEO de Greenly, “le même engagement qui pousse les joueurs à construire des mondes virtuels peut aussi être mis au service du monde réel”. Car si l’industrie doit se transformer, le changement viendra aussi des joueurs eux-mêmes : un geste simple, répété des millions de fois, peut avoir un impact colossal.

Jouer avec conscience

Le jeu vidéo a toujours eu cette capacité rare à nous faire rêver d’un autre monde. Peut-être est-il temps qu’il nous aide aussi à mieux habiter celui-ci.

De nombreuses pistes existent pour rendre le secteur plus vert :

  • encourager le reconditionnement et le rachat d’occasion ;
  • développer des modes basse consommation sur les consoles ;
  • sensibiliser les joueurs à éteindre les appareils inactifs (le “mode veille” d’une console peut représenter jusqu’à 95 % de sa consommation inutile) ;
  • et, à plus long terme, pousser l’industrie à utiliser des matériaux recyclés et des chaînes d’approvisionnement plus sobres.

Parce qu’au fond, entre sauver la planète dans un jeu et la préserver dans la vraie vie, la frontière n’a jamais été aussi fine. Et si demain, ‘bien jouer’ signifiait aussi jouer durable ?

Source principale : Étude Greenly

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