Ce mercredi 29 octobre 2025, The Lancet Countdown a dévoilé le rapport 2025 sur la santé et le changement climatique. La mortalité liée à la chaleur a augmenté de 103 % en Amérique latine et dans les Caraïbes. Toutefois le rapport met en évidence des opportunités d’actions rapides pour prévenir les impacts du dérèglement climatique.
Le changement climatique fait de plus en plus de victimes et nuit à la santé des populations à travers le monde. En 2024, les températures annuelles ont dépassé de 1,5°C celles de l’ère préindustrielle et les émissions de gaz à effet de serre ont atteint des niveaux records.
L’explosion du nombre de décès liés à la chaleur
Ce rapport rédigé par 128 experts pluridisciplinaires du monde entier, révèle que cette situation déstabilise les conditions environnementales et augmente les risques sanitaires.
L’une des données les plus alarmantes demeure l’explosion de la mortalité liée à la chaleur qui a augmenté de 103% en Amérique Latine et dans la Caraïbe.
Entre 1990 et 2021, la région a vu une progression continue des décès attribués aux températures extrêmes, avec une accélération marquée depuis 2008. Une augmentation liée à la hausse des températures corrélée à l’augmentation de la taille des populations vulnérables qui est à l’origine de 546 000 décès par an en moyenne entre 2012 et 2021.
Des indicateurs préoccupants
Le Lancet Countdown sur la santé et le changement climatique est la neuvième évaluation réalisée sur cette problématique et la plus complète.
Sur les 20 indicateurs permettant le suivi des risques et des impacts du changement climatique sur la santé, 12 atteignent de nouveaux records préoccupants au cours de la dernière année pour laquelle des données sont disponibles.
Pour les chercheurs, le lien entre le changement climatique et l’impact sur la santé est indéniable. Ainsi, 16 des 19 jours de canicule mortels enregistrés entre 2020 et 2024,sont directement imputables à la dégradation des conditions environnementales.
Des populations vulnérables plus exposées
Selon le rapport, les populations les plus vulnérables, les nourrissons de moins d’un an et les adultes âgés de plus de 65 ans sont désormais plus exposées à des conditions extrêmes. Des données qui ont atteint des records en 2024 avec des bébés exposés à près de 400% de jours de canicule supplémentaires et plus de 300% pour les séniors. Cependant, ils sont loin d’être les seuls menacés par les effets de ce réchauffement climatique.
L’exposition à la chaleur affecte considérablement les conditions de vie des populations, freinant la capacité à travailler et à faire de l’exercice en plein air. Les fortes températures impactent également la qualité du sommeil et affectent la santé physique et mentale.
La dégradation des conditions environnementale est aussi un facteur important dans l’accroissement des risques sanitaires.
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Un risque sanitaire accru
La fréquence des jours de précipitations extrêmes et les crues soudaines et les glissements de terrain qu’ils génèrent affectent la santé. Cette succession de fortes pluies et de période de sécheresse menace les productions agricoles et ont des impacts sur les systèmes d’assainissement, faisant peser un risque accru sur la sécurité alimentaire et les ressources en eau.
Par ailleurs, ce temps plus chaud et plus sec, augmente aussi le risque d’incendies et de pollution atmosphérique. En 2024, 154 000 personnes ont perdu la vie en raison de la mauvaise qualité de l’air liée à la fumée des incendies.
Le rapport du Lancet Countdown démontre également que la dégradation du climat est aussi à l’origine d’un risque croissant de transmission de maladies infectieuses mortelles à l’instar de la dengue.
7,6 millions de cas de dengue ont été signalés l’an dernier à travers le monde.
Des répercussions sur l’économie
En 2024, les experts ont enregistré le chiffre record préoccupant : 61 % de la surface terrestre a été touché par une sécheresse extrême. Entre 2015 et 2024, la chaleur a coûté en moyenne 855 millions de dollars par an, soit une hausse de 229 % par rapport à la décennie précédente. Les pertes de productivité dues au stress thermique ont atteint 52 milliards de dollars en 2024, touchant particulièrement les secteurs agricoles et de la construction.
Le changement climatique multiplie les répercussions économiques et sanitaires : 639 milliards d’heures de travail ont été perdues en 2024, entraînant une perte potentielle de 1 090 milliards de dollars, tandis que les phénomènes météorologiques extrêmes ont causé 304 milliards de dollars de dégâts. La baisse de la couverture d’assurance accentue la pression sur les systèmes publics et les ménages, aggravant la vulnérabilité socio-économique face à la crise climatique.
Un désengagement politique qui menace la coopération internationale
Malgré l’urgence, les efforts d’adaptation et d’atténuation demeurent insuffisants. Le monde s’oriente vers un réchauffement de 2,7 °C d’ici la fin du siècle, alors que les émissions énergétiques, agricoles et la déforestation atteignent des niveaux records.
Pire encore, plusieurs grandes puissances reculent sur leurs engagements climatiques, affaiblissant la coopération internationale et laissant le champ libre aux géants des énergies fossiles, dont les investissements explosent, soutenus par les grandes banques privées.
Aux États-Unis, la nouvelle administration de Trump s’est retirée de l’accord de Paris et de l’Organisation mondiale de la santé, tout en démantelant des programmes de recherche et des agences clés sur le climat et la santé.
En reculant sur leurs engagements, les grandes puissances mettent en péril la santé publique mondiale et compromettent la transition écologique indispensable à la résilience des populations.
Une injustice climatique marquée
Le rapport du Lancet Countdown vient une nouvelle fois mettre en lumière l’impact du changement climatique sur les pays du Sud et les territoires insulaires. Les petites communautés figurent parmi les premières victimes du changement climatique. Malgré leur responsabilité marginale dans les émissions mondiales, ces communautés se trouvent en première ligne d’une crise qu’elles n’ont pas créée, dépendant désormais du soutien international pour renforcer leur résilience et préserver leur existence même.
Souvent dépourvus de moyens financiers et techniques suffisants, ils subissent de plein fouet la montée du niveau de la mer, l’érosion côtière, la salinisation des sols et la dégradation des ressources en eau. Ces phénomènes menacent directement leurs moyens de subsistance, fondés sur la pêche, l’agriculture et le tourisme, tout en fragilisant leurs infrastructures sanitaires et énergétiques. Dans ces territoires, chaque événement extrême à l’instar des cyclones, des épisodes de sécheresse ou d’inondation, entraîne des pertes humaines et économiques disproportionnées, compromettant durablement le développement local. Le récent passage de l’ouragan majeur Melissa dans la Caraïbe et notamment en Jamaïque, à Cuba et à Haïti, illustre de façon dramatique les projections scientifiques.
Des actions possibles
Les experts ayant contribué à la rédaction du rapport 2025 du Lancet Countdown sur la santé et le changement climatique indiquent que les efforts engagés dans le passé ont eu des résultats probants et appellent à un sursaut.
Ils ont ainsi listé une série de mesures fortes et rapides pour freiner les effets du réchauffement climatique. Les experts encouragent à promouvoir des bâtiments résilients au changement climatique et durables, notamment par le biais de réglementations et d’incitations financières, afin de réduire la consommation d’énergie, limiter les impacts climatiques, réduire l’exposition à la chaleur et limiter le recours à la climatisation. Réduire les inégalités et éviter les dommages involontaires en intégrant les voix et les perspectives des communautés dans toutes les actions liées au changement climatique et en soutenant les initiatives menées par les communautés, en accordant une attention particulière aux communautés vulnérables et aux priorités et connaissances des peuples autochtones.
Cependant, ces mesures ne pourront être mises en place sans une mobilisation générale tant au niveau public, privé, qu’au niveau des initiatives individuelles.
Dans ce rapport, les experts exhortent donc une nouvelle fois les grandes puissances à agir concrètement car sans l’appui de décisions effectives de la scène politique internationale, le recul engagé ces derniers années sera le terreau d’un basculement irrémédiable.
