UBS Group AG, aujourd’hui l’une des plus grandes institutions financières mondiales, est le fruit de plus d’un siècle et demi de fusions stratégiques, d’expansion internationale et d’adaptation aux crises économiques. Son histoire illustre l’évolution du secteur bancaire suisse et mondial, depuis l’industrialisation du XIXe siècle jusqu’aux défis contemporains de la finance globalisée.
Contenu de l’article
- Les origines : 1862-1912
- Expansion d’après-guerre : 1945-1990
- L’internationalisation : années 1980-1990
- La grande fusion : 1997-1998
- L’ère Paine Webber : 2000-2003
- Consolidation et croissance : 2000-2020
- La méga-fusion avec Credit Suisse : 2023-2024
- L’intégration et les perspectives : 2024-2026
- Un héritage de plus de 370 institutions
- Résultats financiers
- Effectifs et présence mondiale
L’Histoire d’UBS, la plus grande Banque de Suisse 🇨🇭
Les origines : 1862-1912
L’histoire d’UBS commence en pleine révolution industrielle suisse. En 1862, la Bank in Winterthur est créée dans la ville de Winterthur avec un capital initial de 5 millions de francs suisses. Cette institution se spécialise dans le financement de l’industrie et des entreprises, profitant notamment de ses connexions ferroviaires et de ses vastes entrepôts. Durant la guerre civile américaine, la banque tire profit de l’envolée des prix du coton.
Un an plus tard, en 1863, la Toggenburger Bank voit le jour à Lichtensteig. Ces deux établissements posent les fondations de ce qui deviendra l’une des plus grandes banques suisses.
L’événement fondateur survient en 1912 lorsque la Bank in Winterthur fusionne avec la Toggenburger Bank pour former l’Union Bank of Switzerland (Schweizerische Bankgesellschaft). Cette consolidation marque la naissance officielle d’UBS et élargit considérablement son empreinte géographique et sa base de clientèle.
Expansion d’après-guerre : 1945-1990
Après la Seconde Guerre mondiale, UBS poursuit son développement. L’acquisition de l’Eidgenössische Bank, une grande institution zurichoise devenue insolvable, permet à UBS de dépasser pour la première fois le milliard de francs suisses d’actifs et d’achever sa transition opérationnelle vers Zurich.
Bien qu’UBS ouvre un bureau à New York en 1946, la banque reste principalement concentrée sur son marché domestique pendant plusieurs décennies. Ce n’est que progressivement que l’établissement développe sa présence internationale.
L’internationalisation : années 1980-1990
Les années 1980 et 1990 marquent un tournant dans la stratégie d’UBS avec une série d’acquisitions majeures à l’international. En 1986, la banque effectue deux acquisitions importantes en Europe : Phillips & Drew et Deutsche Länderbank.
L’année 1991 marque l’entrée d’UBS sur le marché américain avec l’achat de Chase Investors Management Corporation, la branche de gestion d’actifs de Chase Manhattan Bank, qui gère alors plus de 30 milliards de dollars d’actifs.
Durant les années 1990, UBS fait face à une période de turbulences internes. La banque subit les critiques d’actionnaires mécontents de sa gestion conservatrice et de son rendement des capitaux propres relativement faible. Martin Ebner, via son fonds d’investissement BK Vision, devient le principal actionnaire et tente de forcer une restructuration majeure des opérations.
En 1993, Credit Suisse surenchérit sur UBS pour acquérir Swiss Volksbank, la cinquième plus grande banque suisse en difficulté, devenant ainsi pour la première fois la plus grande banque de Suisse. UBS réagit en acquérant un groupe de banques suisses plus petites en 1994, puis la Banque cantonale d’Appenzell Rhodes-Extérieures en 1996. En 1997, UBS achète Schröder, Münchmeyer, Hengst & Co. à Lloyds TSB pour pénétrer le marché bancaire allemand.
La grande fusion : 1997-1998
Le 8 décembre 1997 constitue un moment historique avec l’annonce d’une fusion entre Union Bank of Switzerland et Swiss Bank Corporation. À l’époque, ces deux établissements sont respectivement les deuxième et troisième plus grandes banques de Suisse, toutes deux derrière Credit Suisse.
Cette fusion entièrement en actions crée UBS AG, une nouvelle entité colossale avec plus de 590 milliards de dollars d’actifs, devenant ainsi la deuxième plus grande banque mondiale, juste derrière la Bank of Tokyo-Mitsubishi. La fusion rassemble également les différentes activités de gestion d’actifs des deux banques pour créer le plus grand gestionnaire d’actifs au monde, avec environ 910 milliards de dollars sous gestion.
Marcel Ospel, président d’UBS, envisage initialement de nommer la nouvelle entité “United Bank of Switzerland”, mais opte finalement pour le simple acronyme “UBS”. L’entité combinée est souvent appelée “New UBS” pour la distinguer de l’ancienne Union Bank of Switzerland.
Cependant, 1998 s’avère être une année difficile. UBS est impliquée dans l’effondrement du fonds spéculatif Long Term Capital Management, contribuant 300 millions de dollars à l’opération de sauvetage de 3,625 milliards organisée par la Réserve fédérale américaine. Cette crise, combinée au règlement de 1,25 milliard de dollars dans le cadre du procès du Congrès juif mondial concernant les dépôts des victimes de la persécution nazie, entraîne la démission du président Mathis Cabiallavetta et de trois autres dirigeants.
L’ère Paine Webber : 2000-2003
En 2000, UBS franchit une étape majeure dans son expansion américaine en acquérant Paine Webber, alors la quatrième plus grande société de courtage aux États-Unis avec 385 bureaux et 8 554 courtiers. Cette acquisition propulse UBS au premier rang mondial de la gestion de patrimoine et d’actifs.
La division est d’abord nommée UBS PaineWebber, mais en 2003, le nom centenaire Paine Webber disparaît au profit de UBS Wealth Management USA. Cette unification de la marque coûte à UBS une dépréciation de 1 milliard de francs suisses liée à la perte du goodwill associé à la marque Paine Webber.
Consolidation et croissance : 2000-2020
Durant les années 2000, UBS continue de se développer et de consolider ses opérations. En décembre 2001, la division d’investissement issue de SBC Warburg Dillon Read est rebaptisée UBS Warburg.
La crise financière de 2008 touche UBS, mais la banque survit mieux que certains de ses concurrents. Les années suivantes sont marquées par une réduction progressive de ses activités d’investissement, des licenciements et des réductions de coûts.
Au cours de cette période, UBS fait également face à de multiples enquêtes internationales concernant l’évasion fiscale, aboutissant à des amendes significatives et à des changements dans ses pratiques de confidentialité bancaire.
La méga-fusion avec Credit Suisse : 2023-2024
L’événement le plus marquant de l’histoire récente d’UBS survient en 2023. Après des années de difficultés pour Credit Suisse, marquées par des scandales, des pertes importantes et une fuite des capitaux, la situation devient critique en mars 2023.
Le 19 mars 2023, dans le cadre d’un plan de sauvetage coordonné par le gouvernement suisse, la Banque nationale suisse et l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), UBS annonce son intention d’acquérir Credit Suisse pour 3 milliards de francs suisses (environ 3,2 milliards de dollars). Il s’agit d’une transaction d’urgence visant à prévenir une crise financière systémique.
L’accord, conclu en urgence avant l’ouverture des marchés asiatiques le lundi matin, prévoit un échange d’actions : les actionnaires de Credit Suisse reçoivent une action UBS pour 22,48 actions Credit Suisse, soit 0,76 franc suisse par action – seulement 1% de la valeur maximale historique de Credit Suisse atteinte en 2007.
Le Conseil fédéral suisse utilise ses pouvoirs d’urgence pour permettre la fusion sans l’approbation des actionnaires. De manière controversée, les détenteurs des instruments AT1 (Additional Tier 1) de Credit Suisse, d’une valeur de 17 milliards de dollars, voient leurs titres radiés à zéro par décision des autorités suisses.
UBS finalise officiellement l’acquisition le 12 juin 2023, créant ainsi un géant bancaire avec un bilan de 1 600 milliards de dollars. Credit Suisse Group AG est intégrée dans UBS Group AG, bien que les deux entités continuent d’opérer séparément pendant la période de transition.
Le 31 mai 2024, la fusion juridique au niveau du groupe entre UBS AG et Credit Suisse AG est achevée, UBS AG étant l’entité survivante. Credit Suisse AG cesse officiellement d’exister après 168 ans d’histoire. Tous les actifs, passifs et contrats de Credit Suisse AG sont transférés à UBS AG.
L’intégration et les perspectives : 2024-2026
L’acquisition de Credit Suisse représente un défi d’intégration colossal pour UBS. La banque vise à réaliser plus de 13 milliards de dollars d’économies brutes de coûts d’ici fin 2026. En octobre 2025, UBS nomme Beatriz Martin au poste de directrice des opérations, chargée de superviser l’intégration de Credit Suisse. La banque confirme être en bonne voie pour terminer l’intégration d’ici fin 2026.
Cette fusion crée la plus grande institution financière de Suisse, avec une position dominante dans la gestion de patrimoine mondiale. UBS doit désormais naviguer entre les défis de l’intégration opérationnelle, les risques juridiques hérités de Credit Suisse, et la gestion d’une institution devenue encore plus “too big to fail” (trop grande pour faire faillite).
Un héritage de plus de 370 institutions
L’UBS d’aujourd’hui est le résultat de la consolidation de plus de 370 institutions financières au fil du temps. Cette histoire complexe illustre l’évolution du secteur bancaire, passant d’un paysage fragmenté de banques locales et régionales à un monde dominé par des conglomérats financiers mondiaux.
Avec plus de 160 ans d’histoire, présente dans plus de 50 pays, et désormais renforcée par l’intégration de Credit Suisse, UBS continue d’écrire un nouveau chapitre de l’histoire bancaire mondiale, naviguant entre tradition suisse et ambitions globales dans un environnement financier en constante évolution.
Chiffres clés 2024
Résultats financiers
• Bénéfice net : 5,1 milliards USD
• Revenus totaux : 48 milliards USD (hausse de 21% par rapport à 2023)
• Bénéfice par action : 1,52 USD
• Ratio CET1 : 14,3%
• Revenus par employé : 426 121 USD
• Bénéfice par employé : 56 942 USD
Effectifs et présence mondiale
• Employés : 110 323 personnes (baisse de 2,23% sur un an suite à l’intégration)
• Présence mondiale : plus de 50 pays
• Bureaux : plus de 800 implantations
• En Suisse : environ 190 succursales servant un foyer sur trois, 200 000 PME et plus de 90% des grandes entreprises suisses
• Prêts à l’économie suisse : 350 milliards CHF
Objectifs 2026
• Économies de coûts brutes : 13 milliards USD
• Retour sur capital CET1 : environ 15%
• Ratio coûts/revenus : moins de 70%
• Intégration de Credit Suisse : achèvement prévu fin 2026
