Si on m’avait demandé, il y a assez longtemps, ce que Camus représentait pour moi, j’aurais répondu qu’il s’agissait d’un célèbre écrivain français (prix Nobel de littérature en 1957) mort dans sa Facel-Vega en 1960. À l’époque, son éditeur, Michel Gallimard, était au volant quand la voiture a percuté un arbre près de Sens, en France, suite à l’éclatement d’un pneu.
J’étais alors sans doute plus fasciné par les Facel-Vegas que par Camus. J’ignorais tout de sa vision du sens de la vie, ou plutôt de son absence. J’avais lu, au fil des ans, « L’Étranger » et « La Peste », mais j’en étais sans doute passé à côté. En réalité, j’ai fini par comprendre que la philosophie d’Albert Camus s’articulait autour de la confrontation entre le besoin de sens pour la vie humaine et un univers indifférent à l’humanité, un concept qu’il appelait « l’Absurde ». Son argument principal n'était pas que la vie était objectivement dénuée de sens, mais que le sens était inaccessible par les voies traditionnelles de la religion ou de la vérité absolue, un point de vue que je partage assez bien.
Rejetant le nihilisme, Camus proposait plutôt que la seule façon de vivre authentiquement était d'embrasser l'Absurde et de se rebeller contre lui. Je ne partage pas cette conception, car je comprends le conflit irrationnel entre notre esprit rationnel en quête d'ordre et un monde chaotique et indifférent, est quelque chose que je dois accepter comme un environnement dans lequel je dois vivre.
Là où je rejoins Camus, c'est sur le choix de vivre intensément, d'embrasser la plénitude de l'expérience humaine sur Terre, car cette vie est tout ce que j'ai malgré ses aléas. Je partage également la nécessité de me libérer du besoin de validation extérieure ou de finalité prédéfinie, un combat que je ne cesse pas de mener.
Tout comme Sisyphe, poussant éternellement un gros rocher en haut d'une colline, je cherche les moyens de créer mon propre bonheur, car j'accepte volontiers mon destin et j’assume ma réalité ce qui rend ma lutte beaucoup plus supportable.
Je me considère extrêmement chanceux d'être né, me trouve beaucoup mieux en tant qu'être humain que n'importe quel animal, j'accepte l'absurdité de la vie et je trouve même les moyens de bien en profiter.
