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Les 3000 des Pyrénées : dernière démarque

Publié le 10 septembre 2008 par Mtislav

Pas beaucoup d'efforts à faire pour tomber sur l'ouvrage de Florian Jacqueminet "Pyrénées. D'un 3000 à l'autre". Mérite-t-il d'être lu ? 
Ceux que la montagne n'intéresse que trois ou quatre jours par an lorsque des ex-cancéreux survitaminés et des accros à la coco escaladent des cols hors-catégorie, ceux qui n'aiment pas les cotations mais qui cherchent en toutes circonstances quelque chose à lire dans toutes les situations quand ils ne cèdent pas au désespoir et gribouillent eux même, point d'hésitation, il y a quelque chose pour vous dans le Jacqueminet.
1) Vous êtes coincés dans un compartiment de train. Trois grimpeurs de premier plan se sont endormis à vos côtés. Empruntez l'ouvrage quelques minutes, jetez-vous sur la préface. 2) Etant donné la quasi-disparition des compartiments de chemin de fer, transposez la scène sous une tente. Les trois grimpeurs ont renoncé à leur programme. Ils dorment. Ils sont trop las pour vous proposer les activités habituelles du camping ; l'objet servant d'oreiller, soyez simplement délicat en vous en emparant et jetez vous sur, vous l'avez compris, la préface. 3) La scène peut encore se dérouler ailleurs. En haut d'un 3.000. Auquel cas, vous ne vous jetterez pas sur la préface, mais à la page 230 pour vérifier que l'itinéraire que vous imaginez d'emprunter pour rejoindre le refuge d'Espingo ne vous laissera pas pantelant au milieu d'une barrière rocheuse.
Si vous appartenez aux deux premières catégories, vous ferez votre miel de cette préface. Dans les Pyrénées, un certain nombre de sommets avoisinent les 3 000 mètres. Il y a même une "liste officielle et définitive" de ces 3 000 pyrénéens. En 1935, le Bulletin de l'Union excursionniste catalane recensait 41 sommets nous apprend Jacqueminet. Des anonymes publièrent collectivement en 1968 une liste concurrente : cette fois, 57 sommets de plus de 3000 surgissaient de la chaîne. Cinq ans plus tard, un certain Salvador Moralès en décomptera 92. La liste atteint le chiffre de 122 en 1977 (Manuel Cortès), 125 en 1978. Juan Mari Feliu en cette année 1978 manifeste un certain essoufflement, il n'en dénombre que 115.
En 1980, Jacques Jolfre trouve lui 92 "vrais pics" mais il conserve le moral et additionnés au sommets secondaires, sa liste monte jusqu'à 132. Plus forts encore, Joan Garcia en 1982 : 138. A croire qu'ils les construisent. Josep Vila, en 1982, sans doute oeuvrait-il dans les travaux publics, recense 161 pics.  Etc. 
Croyez-le ou non, une commission de spécialistes finit par se réunir. Des critères objectifs furent déterminés pour qu'un pic entrent dans le prestigieux catalogue des 3000 pyrénéens. 
1 - Le sommet devait posséder un nom qui permettent de l'identifier. Jusque là, on peut rêver, voire redouter qu'au bout de la lecture de ce billet, ne fleurissent quelques 3000 supplémentaires ;
2 - il doit figurer sur au moins une carte ou un guide de montagne ; hélas, dites adieu au Balmeyer's Peak ou à la Punta Zoridae ;
3 - attention, ça se corse : 10 mètres de dénivellation au moins doivent séparer la cime de l'arête ; je cite l'auteur : "Par ailleurs, les sommets principaux dont des cupsides, autrement dit des pointes qui voient aboutir au moins trois arêtes." Pour ne pas définitivement dégoûter Bouvard et Pécuchet de ce sujet, poursuivons la citation : "Les sommets secondaires ne remplissent pas entièrement ces obligations et sont des antécimes, pointes, aiguilles, tours... Quant aux cotes restantes, elles sont des sommets secondaires sans nom."
Florian Jacqueminet nous livre abruptement le nombre de 3000 après que l'examen des variations saisonnières mentionnées plus haut : - 129 sommets principaux ;- 67 sommets secondaires ;- 117 sommets sans nom.Quelle aubaine ! 117 "cotes restantes". La commission se lance immédiatement dans des baptêmes. Le Pic Ollivier et le Pic Audoubert apparaissent. Dommage car le premier, c'est à n'y rien comprendre, avait déjà un nom (Pic du Portillon d'Oô). Le second consacre un gendarme (c'est-à-dire un bloc rocheux) sur une crête au-dessus lui aussi non loin du Refuge du Portillon. Vous vous imaginez que les deux augustes Pyrénéens sont des opportunistes. (Ils faisaient en effet partie de la fameuse commission  - avec Jean et Pierre Ravier, Jacques Jolfre, Miguel Angulo, Jean-Victor Parant, je ne cite que ceux dont j'ai entendu parler du côté français, l'équipe regroupant aussi des Espagnols, je veux dire, des Aragonais, des Catalans, des Basques...). 
Les deux hommes quittent le groupe. Epilogue : le catalogue des 3000 est reconnu par la FFME (Fédération française de la montagne et de l'escalade) et son homologue espagnol (la FEM), le CAF (Club Alpin français), d'autres clubs régionaux au-delà des Pyrénées.
Si vous allez consulter une encyclopédie en ligne, vous trouverez sans doute des chiffres différents. La Fédération internationale de la montagne et de l'escalade (UIAA : International Mountaineering and Climbing Federation) n'a pas homologué le travail de la fameuse commission. Résultat des courses : la bataille semble close concernant les sommets principaux. Quelques échauffourées se produisent encore concernant les sommets secondaires. 
Rien ne vous empêche de les baptiser selon votre humeur, à l'instar d'un guide pyrénéen, qui gagnait dans sa jeunesse quelques sous, en faisant visiter l'observatoire du Pic du Midi de Bigorre. Devant l'avalanche de questions des visiteurs qui cherchaient à connaître le nom de tous les pics et ceci jusqu'à la frontière espagnole, il finissait par improviser :- Celui-ci, c'est le Pico Buenos Dias, celui-là, le Pico Buenas Noches...
Pour que Florian Jacqueminet me pardonne d'avoir caviardé ces merveilleux passages. L'ouvrage n'est guère destiné au promeneur ou au randonneur. La plupart du temps, on vous suggérera de vous munir d'une carte IGN, vous qui aimez la lecture, cela ne vous rebutera guère, mais aussi d'un brin de corde de 30 mètres de 8,2 mm, d'un casque, de quelques sangles... Sans parler de la marche. Ce sont surtout des itinéraires que propose l'auteur, par exemple, 4 heures de marche le premier jour, 8 heures le second. L'Aneto vous est proposé en 7 h 45. En ce qui me concerne, je confesse ne faire aucune confiance à ces cotations horaires. Je me contente de multiplier ces chiffres par trois puis de les diviser par deux pour finir par mettre encore davantage de temps !
La partie du guide que j'ai très partiellement expérimentée m'est apparue très bien faite (8-Massif du Perdiguère). Il donne des idées car l'auteur a privilégié la description de circuits plutôt que la description de tel ou tel sommet. Chacun peut combiner les itinéraires à sa guise. Les schémas sont clairs même pour un esprit obscur comme le mien. 
[Pyrénées, d'un 3000 à l'autre.Par Florian JACQUEMINET,sous-titré : "Les 129 principaux 3000 de la chaîne en 44 courses faciles (F) à assez difficiles (AD)" - publié en 2008 chez l'éditeur Monhélios à Oloron Sainte Marie (64)]photos : Brad Cross et Grand glacier du Port d'Oô

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