Le travail à distance pour un journal canadien, la rédaction d'une note de lecture pour Marianne, auraient dû m'éloigner du blog aujourd'hui. Je tiens tout de même à vous inviter à lire le dernier billet de Lomig sur le monopole de la sécurité par l'Etat, la discussion qui s'ensuit, et ma toute dernière réaction, que je reproduis ci-dessous, expliquant pourquoi, à mon sens, l'Etat doit pouvoir réguler les flux migratoires et assurer seul la sécurité des citoyens.
@ Lomig : je salue ton pragmatisme, mais je note que, depuis que j’ai découvert ton blog, tu appliques de manière de plus en plus systématique les arguments des penseurs libéraux, voire libertariens.
C’est une démarche qui peut mener au sectarisme. Il n’y a pas que les libéraux qui pensent, et les arguments des autres méritent d’être pris en considération, et d’être mis en pratique dans bien des cas. L’éclectisme que je prône ici est d’ailleurs une attitude assez libérale dans l’esprit.
Tu dis que l’Etat n’a pas à réguler les flux d’individus, et là je te dis “attention”. L’immigration n’est pas qu’un phénomène économique, elle est aussi un phénomène culturel, civilisationnel. C’est une approche qui manque dans ton raisonnement. Si dix millions de Français décidaient tous en même temps d’aller s’installer au Japon, il y aurait nécessairement une vague de francophobie là-bas, et probablement des violences ethniques.
Et cela indépendamment du niveau d’emploi de leur société d’accueil. Regarde une société plus libérale que la nôtre, en matière d’économie comme d’immigration, le Royaume-Uni : le plein-emploi y règne, mais l’intégration marche beaucoup moins bien qu’en France. J’attire ici ton attention sur le fait que cet échec de l’intégration explique l’islamisme.
Tout ça pour te dire, une fois de plus, que nous sommes plus que des individus, nous sommes des personnes : c’est-à-dire des individus marqués de façon indélébile par notre culture, notre éducation, notre milieu, nos expériences. Ces déterminismes ne signifient pas pour autant que nous ne soyons pas libres : nous sommes libres dans la mesure où nous savons surmonter, et même tirer parti de tous ces déterminismes.
Quant à la police publique : l’Etat, dans notre société, doit rendre des comptes régulièrement par l’intermédiaire de ses dirigeants élus. Ce ne serait pas le cas de milices privées, qui s’accapareraient le monopole de la violence. Pour éviter qu’elles ne puissent en faire mauvais usage, il faudrait donc une autorité unique, légitimée par un vote démocratique, et disposant du recours à la force : c’est-à-dire, ni plus ni moins, un Etat…
Roman Bernard
Criticus est membre du Réseau LHC.