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Sarkozy. Le roi nu.

Publié le 26 mars 2008 par Gezajans

Le véritable pouvoir n’est pas à l’Elysée, il est dans les mains de l’Opinion. C’est elle qui décide tout. Qui monte, qui descend.  Qui est méchant, qui est gentil. Qui est ringard, qui est génial.

Face à cette opinion capricieuse, exigeante et versatile, les besoins en crédibilité sont grands. Et constants.

Un homme politique comme Nicolas Sarkozy sait mieux que quiconque combien la crédibilité est essentielle. Les médias l’ont d’ailleurs longtemps considéré comme un grand expert en matière de communication. Il est vrai que lorsqu’il était ministre de l’Intérieur et ensuite candidat, il a effectué un parcours décoiffant, presque sans faute. Sa crédibilité paraissait blindée, difficile à contester. Son image était d’une grande précision.

Cohérent, conquérant, convainquant.

Presse, télévisions et une belle partie de l’opinion furent sous le charme. A l’unisson. J’ai eu parfois l’impression que les seules voix discordantes audibles furent celles de Ségolène Royal et du Canard Enchaîné… L’enthousiasme fut viral, comme on dit sur le net. Le phénomène a même atteint des intensités frôlant la saturation.

Aujourd’hui cet état de grâce n’est plus qu’un souvenir. La crédibilité de Nicolas Sarkozy est entrée dans des zones de turbulences.

Or, je ne pense pas que l’on puisse attribuer ces turbulences à une stratégie agressive d’une opposition regaillardie. L’explication me semble plus technique. Il y eut quelques sérieux ratés moteur.

Problèmes de rôdage ? Le grand communicateur aurait-il soudain perdu la main ? N’est-il pas aussi doué qu’on le pensait en matière de com ? Fut-il confronté trop durement aux réalités ? S’est-il relâché ? A-t-il voulu trop en faire ? Trop vite ? La presse est focalisée sur ces questions et bien d’autres. Je laisse aux fins analystes politiques le soin d’évaluer et de nous éclairer.

Ce qui m’intéresse par contre c’est de parler de certains actes qui ont pesés sur sa crédibilité. Je propose d’en examiner trois.

1. La présentation du rapport Attali.  

Comme beaucoup de gens, j’ai suivi en direct la présentation du rapport. Je n’aurais pour rien au monde manqué cette présentation. Ne parlait-on pas d’idées nouvelles qui allaient “libérer” la croissance. Attali et Sarkozy en live sur le même plateau ! Je m’attendais à une présentation canon. Un moment d’histoire car on y parle de remettre en cause nos manières sclérosées de penser…

J’ai été fort déçu. J’ai eu une étrange impression de légèreté, d’improvisation et de politique spectacle. Ce fut pour moi un vrai flop.

2. L’augmentation des revenus du Président.

Cette augmentation aurait pu passer comme une simple, logique et raisonnable mise à niveau. L’histoire a immédiatement nagé avec peine à contre courant de l’opinion. Elle fut perçue comme une auto-décision extravagante et en déphasage total avec les réalités du pays. Ce fut selon moi, un important échec de la communication. L’histoire est revenue en boucle jusqu’à plus soif dans les médias. Nicolas Sarkozy a été exposé, livré au verdict de l’opinion avec une légèreté qui donne froid dans le dos. Que l’augmentation fut justifiée ou pas importe peu.

Ce qui importe c’est la perception de l’augmentation.

3. Le style bagarreur.

Se battre avec des journalistes aux Etats-Unis, se coltiner avec un marin-pêcheur en Bretagne, traiter un citoyen de pauvre con, c’est pas bon. Le côté mec qui se fait respecter, ça existe, on en connaît, souvent ça fait rire, mais ce n’est pas le registre que l’opinion attend d’un Président de la République. Cohérent, conquérant, convaincant, il était parfait. Bagarreur, c’est moins évident. L’image se brouille. C’est un comportement qui dérange, qui interpelle, qui amène à se poser une question peu banale: ce type est-il crédible ? Sulfureuse question.

Trois moments où le moteur a manifesté des faiblesses. Trois ratés.

La presse, elle, ne l’a en tout cas pas raté. Elle s’est soudain déchaînée sur le sujet mais dans l’autre sens. L’enthousiasme se portant absent a ainsi libéré de l’espace pour les questions. L’esprit critique, la dérision ont faits un retour remarqué. Même dans Le Figaro ! On se serait cru au temps où la gauche était au pouvoir.

Les magazines people, genre Paris Match ont accentués avec cruauté la perception négative du fonctionnement présidentiel en véhiculant une image frivole et superficielle. Ils ont faits dans l’opinion des dégâts considérables. Cette mise en scène rutilante fut très décevante pour l’électorat le plus à droite que l’on sait attaché aux valeurs familiales et qui n’aime pas les excès.

Le web a contribué intensivement à ce travail d’érosion. C’est dans sa nature. Il fait et défait les réputations avec une puissance et une vitesse incontrôlables. Il accentue.

Un concept corrosif comme le président bling bling a fait le tour du monde en quelques jours.

Résultat des courses: Nicolas Sarkozy est à poil. Selon moi, sa crédibilité l’habillait. Elle accompagnait très bien ses jolis costumes. Elle le magnifiait.

Les carottes sont-elles cuites? L’inversion de tendance, l’embellie est-elle encore possible ?  Si on regarde du côté de la Bourse, et des valeurs qui, chaque jour exposent, construisent, solidifient leur crédibilité, on aura sûrement des éléments de réponse.


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