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Michel Rocard dit Oui à l’adhésion de la Turquie à l’UE

Publié le 16 septembre 2008 par Hmoreigne

rocard.1221557961.jpgMichel Rocard, à 78 ans, est un homme prolixe d’une incroyable verdeur intellectuelle. Aucun sujet ne semble pouvoir échapper à son analyse, toujours aussi lucide, facilitée par l’expérience du pouvoir et des décennies d’engagement politique. Dernière production en date, un plaidoyer pour l’adhésion de la Turquie, à contre-courant du sentiment dominant des Français à cet égard. Le titre de l’ouvrage « Oui à la Turquie » est sans ambiguïté sur le contenu. A la fin pourtant, le doute subsiste.

Il flotte sur le livre de Michel Rocard un sentiment étrange. L’ouvrage se lit sans peine, sans effets littéraires fastidieux. Et pourtant, l’impression qui domine au fil des pages c’est que l’ancien premier ministre signe là plus un coup de cœur qu’une démonstration à la mécanique implacable. On regrettera  notamment que l’affirmation selon laquelle la question de l’adhésion de la Turquie à l’UE est l’occasion de s’interroger sur l’identité de l’Europe ne soit pas sujette à plus de développements.

A juste titre, Michel Rocard rappelle que la Turquie n’est pas un Etat qu’il faut mépriser. Qu’elle est au contraire riche d’une histoire glorieuse et d’une culture dont elle n’a pas à rougir. L’auteur relève les fortes potentialités d’un pays vaste et bien peuplé, trait d’union entre l’Europe et l’Asie, tournée vers l’Europe depuis plusieurs siècles, ce qu’il définit comme “un mystérieux tropisme européen”.

“Et alors ?”, a-t-on envie de répondre. Certes, la Turquie s’illustre par un remarquable dynamisme économique avec une croissance qui flirtait ces dernières années avec les 7%. Mais, le seul intérêt de l’UE serait-il de faire du business, de sécuriser les routes énergétiques et de faire passer au deuxième plan une communauté de destins ?

Selon l’ancien premier ministre, l’Europe ne saurait se réduire à un seul club chrétien mais doit au contraire démontrer sa capacité à intégrer un Etat musulman. Le défi paraît pourtant institutionnellement insurmontable. L’intégration du plus vaste et du plus peuplé (71 millions d’habitants) de tous les nouveaux pays se traduirait par un poids politique en droit de vote, égal à celui de l’Allemagne et supérieur à la France, la Grande-Bretagne et l’Italie…

A terme, face au déclin démographique de la vieille Europe, la Turquie aurait donc vocation à devenir la première puissance démographique du nouvel ensemble.

Hors ouvrage, Michel Rocard indique que « l’Europe peut vivre sans mais, qu’elle a un vif intérêt à vivre avec ». Outre l’intérêt économique, l’ancien premier secrétaire du parti socialiste souligne que « chrétiens et musulmans vivent actuellement une période d’incompréhensions graves. Graves et dangereuses » car toute guerre a des faits générateurs bien antérieurs. Dans cette vision personnelle, Michel Rocard voit dans la Turquie un pays clef pour assurer la paix et la stabilité dans une région stratégique.

Il n’empêche, Michel Rocard ne répond pas aux craintes légitimes que constituerait le fait de faire nôtre les frontières de la Turquie avec l’une des zones les explosives de la planète. Faute de réponses à des questions aussi sensibles, Michel Rocard assigne un calendrier sage en tablant une entrée sur 2023. Une quinzaine d’années indispensable car « pour que la Turquie puisse adhérer, il faut qu’elle nous ressemble un peu plus ».

Oui à la Turquie - Michel Rocard-  Hachette Littératures (collection Tapage)

http://www.ouialaturquie.fr/ (blog consacré au livre)


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