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The girl next door.

Publié le 16 septembre 2008 par Didier Vincent
Le film polémique vu au Festival du film américain de Deauville.


J'aurais dû me douter. Je ne me suis douté de rien, comme d'hab. Je ne suis pas méfiant. On m'a appris après, que le réalisateur est sorti de la salle encadré par 6 gorilles pour le protéger. Parce que le film a fait polémique. Parce qu'il a été aussi fortement hué par pas mal, qu'applaudi par quelques uns. Et très fortement des deux côtés. J'avoue avoir voulu quitter la salle à plusieurs moments tant c'était difficile. Et le fait de ne l'avoir pas quitté, l'écran, des yeux, m'a autorisé à ne pas huer. C'est un film impossible. Le plus impossible qu'il m'ait été donné de voir depuis...Salo de Pasolini, non que ce film-ci soit à la hauteur. Mais qu'il soit in-regardable. Même pas indécent : totalement in-regardable. Alors, première réaction : pourquoi les gens qui l'ont hué et tenté de prendre à partie le réalisateur sont-ils restés jusqu‘au bout ? J'avoue d'abord être entré dans la salle sans aucune info. Je n'ai pas regardé le programme, lu le scénario. C'est un festival : on est là comme des vers à avaler des films à la chaîne tels des fumeurs qui cherchent l'extase en une fuite impossible de l'accumulation... Donc, j'entre, m'assois, et me trouve face à l'objet filmique. Le titre ? The girl next door. Au début du film, le sommeil me gagne, comme d'habitude. A voir 5 films par jour, le train-train s'installe vite. La cinéphilie s'abreuve ainsi d'un manque de jugement psychanalytique. Les films étant les névrosés, et vous, spectateur, le psychanalyste voyant les patients défiler. Je m'assoupis donc, perdant le début, somnolant devant cette famille américaine typique. Le petit voisin tape l'incruste à cause de la jolie ado et de ses trois frères, camarades de jeux. Et puis, un jeu : La petite fille doit jouer à cache cache, les yeux bandés. Elle doit attraper les autres en leur lançant des pommes. Les yeux bandés. Ils appellent ça « The Game », le jeu. Fortement scénarisé, le jeu. Et puis la mère qui propose de la bière à ses enfants. La comédie américaine bizarre, en somme. Rien de bien méchant. La petite fille a une sœur de 6 ans handicapée motrice, affublée d'attelles aux jambes. Elle se prend une fessée cul nu pour avoir soutenu sa sœur. 20 coups de bâton. On est mal à l'aise devant la méchanceté des cette marâtres. Et puis, tout dégénère. Mais dégénère vraiment. Ne lisez pas la suite. Ce film ne sortira pas en France. Il circulera sur le net. C'est le partage de ceux qui dénoncent la méticulosité ravageuse de ce film à décrire les tortures par le menu et de ceux qui ont applaudi cette dénonciation de la torture familiale, du déchirement que connaît l'enfance sous le joug du silence. Que dire maintenant ? Décrire ? L'adolescente est dans une cave, attachée par des cordes qui lui tirent les bras. Elle doit avouer qu'elle éprouve du plaisir à se masturber. On la dénude. La caméra montre tout. Lentement. J'avais mal au cœur. Des gens sortaient de la salle. Je restai. Pourquoi ? J'étais pris entre ces deux envies de dire : 1-ce n'est pas un film. 2-ce film est courageux dans cette dénonciation froidement méticuleuse de la torture des enfants dans certaines familles. Et puis, holà c'est insoutenable, elle est violée par un gamin de 15 ans, sous les yeux de sa mère et de ses frères et sœurs. C'est indigeste. Marquée au fer rouge. Putain, j'en pleure d'écrire ça. Excisée. Je ferme les yeux. Mourante, exangue. C'est un film, ça ? C'est quoi ce massacre ? Je suis resté. J'ai honte. Le réalisateur est sorti, encadré de solides vigiles, lui qui avait dit avant le film, qu'il était prêt à dialoguer, après. J'ai honte. C'est de l'ordre de l'indicible que de voir ainsi torturer une adolescente. Alors on dira que ce film n'existe pas, qu'il y a dénonciation et dénonciation. Ou que ce film existe : la preuve, il a fait réagir fortement. Et qu'est-ce qu'un film ? La question est ici posée et n'a pas fini d'être résolue.

 

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