Tu as remarqué, chichophile occasionnel ? Comme ça commence à cailler sec là-dehors ? A quelle vitesse les maigrichons se sont empressés de ressortir les parkas et les écharpes ?
Ca pue l’automne, cette saison où l’environnement s’amuse à mourir lentement pour se distraire. Il flotte déjà dans l’air humide ce parfum incomparable de fumée froide, de feu éteint. Mama Gaïa laisse crever notre hémisphère pour quelques mois et c’est un long cortège funèbre de minuscules calamités qui se met alors en branle. Revoilà les narines pleines de mucus, les gorges irritées, le moral qui décape le bitume, l’ensoleillement qui commence après qu’on se lève et qui se termine avant qu’on se couche.
Normalement, c’est aussi le signal du départ pour pas mal d’oiseaux migrateurs. En ce qui concerne les piafs de mauvaise augure, c’est plutôt l’inverse. Le temps dégueulasse, ça leur donne des ailes plus vigousses, ça leur refile l’inspiration nécessaire à croasser de plus belle, ça les fait voler bas pis que des hirondelles quand les nuages électriques ramènent leur fraise.
Tu as pigé l’affaire, gars, l’Insultron suprême, le Vieux-Con-Avant-l’Âge, le plus ardent militant de la Connard Pride a été sorti de la morgue. Tu peux revenir à la page d’accueil maintenant.
Samedi prochain, ce sera l’équinoxe, début très officiel de la saison. De ce jour jusqu’au 21 décembre, je décrète que cet Automne 2008 sera la Saison Internationale de la Fatigue, où tous et toutes, unis par un bel élan de solidarité transcendant les préférences pour la mayonnaise ou le ketchup, nous rendrons un solennel hommage à toutes les formes de l’épuisement.
Nous honorerons les Fatigués de Naissance, ceux qui n’ont jamais pu voir cette existence en peinture et qui ne se lèvent que pour angoisser en pensant que la nuit prochaine sera tout aussi courte et peu réparatrice. Nous évoquerons la mémoire de Cioran, qui rêvait d’être “libre comme un mort-né.” Nous saluerons la clairvoyance démentielle de Schopenhauer, pour qui notre quotidien se résume nécessairement à une alternance “entre souffrance et ennui.”
Nous aurons aussi une pensée émue pour les optimistes brisés, les joyeux devenus aigris, les innocents salis et dégoutés, tous ceux qui ont tout donné à leur job, leur passion, leurs amours et qui ont trouvé au fond d’un verre le courage d’admettre qu’ils ont perdu leur temps pour des peanuts. Salut à vous, Déserteurs de toutes les batailles !
Enfin, nous réserverons nos glaires les plus âcres pour Dame Nature, qui non contente de ne pas faire pousser l’argent sur les arbres et couler l’Armagnac dans les ruisseaux, se fout de notre gueule en permettant d’hiberner aux marmottes et aux lézards mais pas à nous autres, enflés de bipèdes. Notez qu’avec ce printemps minable et cet été merdique, on aurait mieux fait de prolonger la cuite de Nouvel an jusqu’au printemps 2009.
Dans le prochain épisode, je vous expliquerai pourquoi l’avortement est immoral et pourquoi faire des enfants est idiot. Ou un truc comme ça, je sais pas.