Magazine Analyses graphiques

Point sur l'économie US - septembre

Publié le 27 septembre 2008 par Loïc Abadie
La semaine qui vient de s'achever a amené son lot devenu « routinier » de faillites avec Washington Mutual, la 6ème banque US, qui a battu le record de la plus grosse faillite bancaire de l'histoire US...mais l'aspect bancaie de la crise ne doit pas nous faire oublier l'économie « réelle ».
1) Le PIB

- le PIB US a finalement augmenté de 2,8% en rythme annualisé au T2 2008.
Cette bonne performance est en réalité un trompe-l'œil : 

L'amélioration de la balance commerciale a eu un rôle essentiel au T2 2008 (contribution évaluée à 3% de croissance), ainsi que le « plan Bush » qui a consisté à donner 150 milliards de $ aux ménages US pour qu'ils maintiennent un trimestre de plus leur niveau de consommation.
Les exportations ont notamment effectué un bond de 15 % (favorisé par la faiblesse du $), et les importations ont reculé à cause de la crise qui freine la consommation des ménages US. (Voir cet article) .
Pour les trimestres à venir, on peut attendre des importations restant faibles, mais des exportations aussi plus faibles à cause du grand nombre de partenaires économiques des USA entrant en récession, et il n'y aura plus de « chèques Bush » tombant du ciel pour « booster » le PIB artificiellement.
Mais le point essentiel qui « cloche » dans les chiffres du PIB du T2 2008 est le déflateur choisi : ce déflateur mesure l'inflation sur les biens produits, qui sert de base à l'estimation du PIB en monnaie constante.
Cette inflation sur le prix des biens produits a été évaluée à 1,3% seulement en rythme annualisé au T2 2008, à un moment où l'inflation dépassait 5% (sur 12 mois glissants) et même 7% sur le T2 2008 en rythme annualisé. Cette « curiosité statistique » explique en grande partie l'étonnante tenue du PIB au T2 2008, et il y a très peu de chances qu'elle se répète par la suite, les courbes de l'inflation et du déflateur GDP étant en général voisines.
Article de seeking alpha

2) Les autres indicateurs L'« exploit statistique » réalisé par le PIB ne doit pas masquer l'essentiel : Selon tous les autres critères, les USA sont en récession depuis plusieurs mois, sans doute depuis le début 2008, et cette récession est en train de monter en puissance : 


- L'immobilier continue sa plongée avec des ventes de logement neufs en chute libre, des ventes de logements anciens très faibles (malgré un apport artificiel lié aux ventes sur saisies qui génère 1/3 du volume total), et des stocks qui se maintiennent au plus haut. Voir ce graphique sur les ventes de logements neufs  et cet article de calculated risk sur les logements anciens.
- Les ventes de véhicules ont connu une baisse jamais observée depuis le début des années 90 (malgré un petit rebond en août) : voir ce graphique de la FED.
- Les ventes au détail, exprimées en monnaie constante chutent maintenant à un rythme de 3,5%/an, et elles constituent le cœur de l'économie US. Point sur l'économie US - septembre
- Le chômage connait une progression très rapide, avec un pic de croissance mensuelle de plus de 800 000 chômeurs, ce qui n'avait jamais été observé depuis 1975.
Point sur l'économie US - septembre
Depuis mars 2007, le nombre de chômeurs a déjà augmenté de 39% aux USA, ce qui représente déjà 2 638 000 chômeurs de plus. Sur les seuls mois d'avril à août 2008, 1,75 millions de travailleurs ont perdu leur emploi, ce qui représente un accroissement de 23% du nombre de chômeurs en 4 mois. Nous pourrions dépasser les niveaux de 1980 si la crise se déroule comme attendu (flèche rouge que j'ai ajoutée sur le graphique).


Point sur l'économie US - septembre Les commandes de biens durables exprimées en monnaie constante se sont aussi largement retournées à la baisse : null
Retournement confirmé par le taux d'utilisation de la capacité industrielle, qui est en baisse depuis fin 2007...Sur ce graphique, on notera que les pics de chaque haut de cycle sur le taux d'utilisation sont de plus en plus bas depuis la fin des années 70, ce qui traduit l'affaiblissement à long terme de la dynamique économique au fur et à mesure que le cycle économique de long terme s'essoufle.
En conclusion : La récession a déjà des conséquences bien réelles aux USA, et il devient plus que difficile de nier son existence. Et comme attendu, le système économique ne répond à présent plus à aucun des "traitements" que les autorités lui administrent (baisses de taux, renflouements de la FED ou du trésor US, plans de relance)...Tout simplement parce qu'on ne règle pas les problèmes d'un ménage surendetté en lui accordant un nouveau crédit ou en lui offrant une ou deux mensualités gratuites dans l'espoir que "ça s'arrange" ! Dans ce contexte, les niveaux de valorisation actuels sur le SP500 (PER à 23 et rendement de 2,4%) apparaissent bien déconnectés de la réalité.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Loïc Abadie 414 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte