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Mon coiffeur a 24 ans. Le chef d'à côté en à 60

Publié le 01 octobre 2008 par Thomas Bertrand

Gap

Le conflit des générations au Japon n'est pas celui qu'on croit. J'ai comme l'impression que les «20 ans et quelques choses» font partie d'une génération plus que troublée par l'éducation qu'ils ont reçu dans une Ecole qui cherche à créer un groupe et une organisation pas très rationnelle.
Chez le coiffeur du coin, ils sont sept employés. Trois clients peuvent s'y faire couper les cheveux. Cela fait souvent deux employés près de l'ordinateur à l'entrée plus un au téléphone. Un qui coupe, un qui lui passe le gel. Un autre peut crier «お疲れさまです» à chaque occasion: descente des escaliers depuis le coin shampoing, levée du siège, enfilage de la blouse, tout en bon pour gratifier le client d'une remarque qui lui fait entendre que l'on s'occupe de lui.

Puis vient le moment où l'on aimerait être au calme. La coupe. Chaque fois, les questions sont les mêmes. Le jeu consiste alors à s'inventer la vie que le garçon s'étonnera d'apprendre. Mentir à son coiffeur ne semble pas être un vice. Le but ici est de se faire couper les cheveux, pas de gagner un nouvel ami. Et lui préfère certainement entendre des trucs hallucinants que des banalités.
Quand vient le tour des questions au coiffeur, on rentre dans la banalité. Pas d'imagination et pas de vie en dehors de ce salon où ils sont sept à se croiser tous les jours. Comme d'habitude, les lundis sont jour des repos pour les coiffeurs nippons. Ici, le lundi, c'est plutôt jour de repos pour les clients qui ne peuvent y aller. Les employés, eux, se donnent généralement rendez-vous au salon pour des réunions, des concours de la meilleur mèche façon Dragon Ball ou des tests de coiffure sur tête en silicone.

Mon coiffeur vient au salon en voiture. Il pourrait venir en bus, mais souvent, le travail terminé, il n'y a plus de bus. Le salon ferme à 21 heures. Le bus ne circule plus après 23h30. J'imagine le temps passé à balayer les cheveux tombés. Je retrouve une organisation du travail, à sept, qui me rappelle ce que je vivais en travaillant à Osaka...
Cet employé de 20 ans et quelque chose avoue qu'il ne sait pas vraiment ce qu'est le mot «tard». Et puis, le supermarché d'à côté est ouvert toute la nuit depuis peu. Tant qu'on peut manger à 2 heures du matin, pourquoi se presser de rentrer ?
Certes, il avoue que ce sont des ulcères à l'estomac qui l'on souvent forcés à ne pas venir travailler. Coupe terminée. Heureusement, je n'ai pas beaucoup de cheveux, je ne resterai pas plus longtemps ici et je n'aurai pas à lui avouer que cet été, je suis resté plus de deux semaines au bord de la mer, un concept que les sept employés de ce salon, tous au look similaire, tous sortis d'une pub pour Beams, ne pourraient pas comprendre.

Dans ce salon, on coupe les cheveux comme ailleurs, mais pas forcément mieux, en témoigne la permanente ratée de ma voisine de coupe qui a déclenché des excuses mêlées de larmes de la part de sa coiffeuse de 25 ans. En revanche, l'intérêt d'y aller réside dans ce plaisir sadique à voir sept 20 ans et quelque chose passer du temps au travail et quémander aux clients qu'ils coupent, des récits de ce qui se passe dehors. Outre les paroles, je retiendrai aussi cette subtile manière de l'employée féminin qui exécute des petits pas rapidement qui veulent dire «je me presse à la tâche» mais qui la font avancer moins vite qu'une marche classique, adulte.

Encore une fois, il faut trouver un bon petit restaurant pour se réconcilier avec le Japon. Super conseil que celui qui nous dirige vers あん. La façade était connue, mais dehors, rien, pas de menu, mais de fenêtre montrant que sept employés s'affèrent à attendre les clients. En revanche, derrière la porte coulissante, un chef de 60 ans et quelque chose. Seul, derrière son comptoir pour servir les nombreux estomacs. Il faut attendre dehors que des places se libèrent. très bon signe. Deux clients sortent, très joyeux, plein de saké. Ils rentrent en taxi. Très bon signe également: je pensais qu'il s'agissait d'un de ses restaurants qui accueillent les amis du voisinage et où l'on y mange comme à la maison en moins bon qu'à la maison.

あん n'est pas sur le net, mais c'est plein, succulent et très accueillant. Le menu écrit à la main posé sur la table donne peu d'indications, même pas les prix, si ce n'est qu'il est possible de faire une multitude de plats avec du poulet. La soupe servie en attendant la commande est parfaite, tout le reste aussi. Manger et boire à quatre pour 5500 yen n'est pas compréhensible (deux fois moins cher qu'une permanente). J'ai trouvé une cantine.

あん 京都市左京区浄土寺下南田町33     TEL: 075-751-7869


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