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Dimanche 27 juillet 2008, Chahine à cœur ouvert

Publié le 03 octobre 2008 par Memoiredeurope @echternach

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J’avais bien compris que le cinéaste égyptien Youssef Chahine était en mauvaise posture. Mais la nouvelle de sa mort m’atteint ce dimanche à Madrid. Cette actualité peut paraître banale, mais elle me touche autant que la disparition du cinéaste indien Satyajit Ray que j’ai vécue en direct sur les télévisions indiennes, à New Dehli en 1992. 

Je connaissais Chahine de réputation et j’avais compris qu’il était le bien aimé de la Berlinade. Mais c’est la découverte d’un groupe de DVD en 2005 qui m’a permis d’en savoir plus. Non pas que je me sois précipité sur les quatre films, tout à la suite, mais au contraire parce que la vision étalée de « Alexandrie pourquoi ? », puis de « la Mémoire », d’ « Alexandrie encore et toujours » et enfin de « Alexandrie…New York » m’a pris pratiquement trois années. Il est vrai qu’entre temps j’avais prêté le coffret.

Le temps est donc passé et des résonances se sont mises en place d’elles-mêmes. Le décalage temporel m’a paradoxalement aidé à mettre des noms sur les visages d’une famille qui vit dans la confusion des rôles autour d’un fils prodigue, émigré à New York et issu à la fois d’un mélange des cultures et des religions, propres aux fusions entre terre d’Islam et terres Sépharades.

Mais un titre ne pouvait me laisser indifférent : « La mémoire ».

Je navigue ainsi au plus près de ce que recherche le cinéaste, en miroir de ce que je recherche : les racines familiales, les événements fondateurs, l’appel du large, l’éducation sentimentale, le rythme de la création et les superpositions du temps.

Si Alexandrie New York m’a retenu plus que les autres, c’est en raison de sa clarté. La ligne est claire, comme on dirait d’un dessin. Le motif est en quelque sorte dansé. Et la vie se vit à plusieurs niveaux, dans la fusion et la distance. Tout ce que le cinéma a de meilleur !

Mais « la mémoire » est une plongée dans un univers un peu fellinien où une opération à cœur ouvert, ouvre en effet le cœur ! Et aussi la tête.J’avais commencé à le regarder à la veille d’une opération qui n’était pas à cœur ouvert celle-là, fort heureusement, mais qui me laissait cependant désemparé. Mais je n’ai pas voulu voir la fin avant d’avoir quitté l’hôpital. Par superstition certainement. 

Je suis revenu, ainsi, longtemps après dans les dédales des ruelles d’Alexandrie, dans la fascination maladive des acteurs, dans les excès de langage et les excès de tout que Chahine manie si bien, à la ronde, dans une ronde perpétuelle.

A Madrid, je ne veux pas dire qu’il y a un petit morceau d’Alexandrie à chaque coin de rue. Et pourtant un fil semble directement relié à l’autre rive.

Je me sens comme au bord d’une côte quand le phare annonce qu’une ville pleine de mystères est en vue.

Bien des paradoxes restaient certainement présents dans la tête du cinéaste, ainsi que des images prêtes à nous aider à vivre et à comprendre. 

CMais c’est ainsi que nous échangeons nos mystères et qu’une disparition leur donne encore plus d’opacité. 


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