Magazine

Institutions : les élections sont-elles toutes égales dans les perceptions des Français ?

Publié le 24 septembre 2008 par Délis

Alors que se tenaient ce week-end les élections sénatoriales, afin de renouveler un tiers des membres de cette institution, le désintérêt des Français à l’égard de l’enjeu électoral que cela pouvait représenter met en évidence leurs jugements sur le fonctionnement de la démocratie dans notre pays. Au-delà de cette indifférence, l’analyse des taux d’abstention enregistrés aux différentes élections depuis 1958 montre que les Français établissent une hiérarchie dans les différentes institutions républicaines.

Un régime hyper-présidentiel ?

L’un des enseignements qui a le plus souvent été tiré à la suite de l’élection présidentielle de 2007 a sans aucun doute été le net regain d’intérêt des Français vis-à-vis de la politique en général, comme en atteste le très faible score de l’abstention enregistré lors des deux tours de cette élection (respectivement 16,2% et 16%). Cet épisode a surtout été l’occasion d’observer la prépondérance de l’élection présidentielle dans la vie politique française. En effet, depuis 1958 et la naissance de la Vème République, l’élection présidentielle est celle qui mobilise le plus largement les électeurs Même après les périodes de cohabitation les niveaux d’abstention recueillis ont toujours été largement plus faibles que ceux observés lors des autres élections : 18,6% et 15,9% en 1988, 21,6% et 20,3% en 1995 et 28,4% et 20,3% en 2002. L’analyse dans le temps de cet indicateur montre l’attachement des Français à cette élection, souvent considérée comme le moment le plus important de la vie politique française.
Aujourd’hui couplées avec l’élection présidentielle, les élections législatives bénéficient également d’un fort intérêt de la part des Français qui se déplacent généralement massivement pour désigner leurs représentants à l’Assemblée. Mais si les taux d’abstention enregistrés entre 1958 et 1981 étaient presque systématiquement inférieurs à 25%, à l’exception du scrutin de 1962, depuis 1981, le taux d’abstention aux élections législatives ne cesse d’augmenter, toujours au-delà de 30% depuis 1988. En 2007, l’abstention a atteint un niveau record lors des deux tours, frôlant même la barre des 40% le 17 juin 2007 (respectueusement 39,5% et 40% au premier et au second tour), soulignant ainsi un attachement moindre des citoyens à l’égard de ce type d’élection.

Des rapports inégaux avec les différents échelons de la politique locale

Au-delà du caractère politique et des contre-pouvoirs que peuvent représenter les conseils municipaux et généraux, les Français se montrent particulièrement motivés par les élections locales, notamment les élections municipales, comme en témoignent les résultats de la participation à ces élections depuis 1959. On retrouve toutefois dans ces chiffres une augmentation régulière de l’abstention, confirmant ainsi la tendance au désintérêt de la population envers la politique en général, la barre des 30% dépassée en 1995 (30,6% et 30%) ayant été à nouveau franchie en 2001 (32,6% et 34%) et en 2008 (33,5% et 38%).
Cette importance des élections locales est également notable dans le score de l’abstention aux élections cantonales depuis 1976, puisque environ 65% des électeurs se déplacent généralement au premier tour de ces élections. Les scores de l’abstention aux élections cantonales et régionales sont fortement irréguliers, ce qui peut s’expliquer par le contexte politique de vote à ces scrutins. En effet, il ne faut pas oublier que ces élections cantonales et régionales ont souvent lieu en même temps que d’autres élections, ce qui peut participer à une hausse de la participation. En 2008 par exemple, les élections cantonales étaient organisées en même temps que les élections municipales.

Européennes et sénatoriales, l’indifférence des Français

Enfin, les élections visant à élire les membres des assemblées sénatoriales et européennes ne suscitent en revanche qu’un intérêt limité de la part des Français. Dissemblables par leur mode du scrutin, ces deux élections semblent très proches en matière d’indifférence auprès des Français. Les scores atteints par l’abstention aux élections européennes dépassent régulièrement 50%, et les 57,3% enregistrés en 2004 sont dans la droite ligne de l’évolution des résultats recueillis. D’ailleurs, le peu d’attention porté par nos concitoyens à l’actuelle Présidence Française de l’Union Européenne peut nous faire craindre un score encore plus élevé en mars 2008.
L’intérêt des Français à l’égard des élections sénatoriales n’est pas évalué de la même façon. Seuls les grands électeurs sont conviés à se rendre aux urnes, l’abstention n’est donc pas signe de l’intérêt des citoyens. En revanche, le sondage Ifop - Profession politique sur les perceptions des Français envers le Sénat, montre que 15 jours auparavant, seuls 24% des personnes interrogées se disaient concernées par les élections de ce week-end.

Au-delà du simple aspect statistique et de l’évolution chiffrée de l’abstention dans le temps, qui est un bon moyen de juger de la vitalité de la démocratie, ces différents éléments permettent également de se rendre compte que les perceptions qu’ont les Français des différentes institutions et acteurs de la vie politique ne sont pas forcément celles qui sont souvent présentées. Au regard de l’intérêt qu’ils portent à chacune des élections, nous vivons dans un régime hyper-présidentiel, dans lequel l’Assemblée Nationale a de plus en plus de mal à convaincre de son rôle, où le poids de la politique locale garde un aspect important, mais où le Parlement Européen et le Sénat ne semblent pas avoir un poids suffisant. Peut-être que la réforme des institutions votée cet été pourra-t-elle changer cela…

Les chiffres utilisés dans ce document sont issus du dossier TNS Sofres sur l’astention en France depuis 1958.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Délis 5050 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog