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La tectonique des sentiments

Publié le 08 octobre 2008 par Antonia Savey

Week-end au bord de l'épuisement, départ du vendredi soir gare tgv lyonnaise bondée, retrouvailles fébriles 6OO bornes plus au nord sur quai de gare venteux, 2 grasses matinées, rien à faire qu'à glander sous la couette tiède, week-end de petits plats cuisinés, week-end branché sur un truc qui ressemble à s'y méprendre à la vie normale, week-end de tant et tant d'attentes inassouvies exacerbées sublimées, week-end d'hiver précoce saupoudré à l'humex nez qui coule, week-end studieux à bosser du marketing stratégique pour un exam à J - 6 semaines, week-end de temps qui file à l'anglaise cet enfoiré, dimanche de gare tgv parisienne déprimante, tgv qui n'en finit pas de me ramener à mon point de départ, retour à l'autre réalité pieds sur la banquette écouteurs à fond sur fond de bleuette avec Zazie... jusqu'au point de raliement de cette autre gare, aussi bondée que l'avant veille, plus déprimante encore le dimanche soir.
Latectoniquesentiments Quand ce vendredi 18h, un Eric Emmanuel Schmitt en couverture de la Tectonique des Sentiments me hèle du haut de sa pile dans un VirginMegaStore, moi en consommatrice acoutumée de sa prose, je cède à ses sirènes sans résistance aucune. Certes, pas ouvert du week-end, trop occupée à rien glander. Mais voilà 172 pages idéales pour cramer 2h de tgv Paris Lyon, tête vide pour éviter de ressasser ce que je laisse derrière moi, oreilles pleines via MP3.

Cette tectonique des sentiments m'a scotchée à mon siège sans que je puisse la lâcher un instant. C'est qu'il a l'art, EES, de me ferrer dès le 1er chapitre. Diane et Richard jouent à deux avec le feu, déguisent par crainte, par orgueil leurs sentiments pour mieux faire avouer l'autre, le torturer, le hair, mieux l'aimer au bout de tous leurs comptes.
J'ai retrouvé dans la bouche d'Elina, l'un des personnages, cette citation de Musset qu'ado j'affectionnais tant et qui n'a rien perdu, 30 années plus tard, de son écho en moi :

"Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux e lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompés en amour, souvent blessé et souvent malheureux : mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. J'ai aimé."

Dernières pages douces-amères, englouties à l'arrivée en gare de Lyon Part Dieu, dénouement inéluctable, just in time... J'aime pas trop ça les romans trop courts, pas le temps de se laisser séduire, apprivoiser, imprégner par les émotions, les lieux, les êtres.

Comme ce week end au goût de trop peu...


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