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Réchauffement climatique (trois)

Publié le 21 octobre 2008 par Saucrates

Réflexion vingt-trois (21 juillet 2007)
La piste de la séquestration naturelle du carbone (suite 2)

3. La séquestration naturelle du carbone dans les océans
La séquestration du carbone par les océans est un sujet particulièrement complexe et cette esquisse de présentation devra être prise, plus encore que pour les autres, avec une grande indulgence. Beaucoup de données sur le rôle des océans dans le cycle du carbone sont encore aujourd'hui méconnues.
La première chose que l'on peut rappeler, c'est que les océans sont le principal poumon en matière de carbone de notre système planétaire. Une mesure réalisée en 1990 des stocks de carbone (le dioxyde de carbone, mais aussi le méthane, le monoxyde de carbone ou les chlorofluorocarbones), retenus dans les différents puits de carbone terrestres, estimait la quantité de carbone séquestrée dans les eaux profondes des océans à 38.000 gigatonnes, soit près de 93% de l'ensemble du carbone en circulation dans la biosphère (hors le carbone inorganique de la croute terrestre et des sédiments au fond des océans), atmosphère comprise. En regard, les eaux superficielles des océans ne contiendraient selon ces estimations que 200 gigatonnes (à comparer également à 2.000 gigatonnes sequestrées dans le sol). Même si ces estimations ont certainement été modifiées à ce jour par rapport à ces mesures de 1990, notamment pour le sol et les gisements fossiles, elles donnent toutefois un ordre de comparaison de l'importance de la séquestration réalisée au sein des eaux profondes des océans de notre planète. La lithosphère terrestre renfermerait 20.000.000 gigatonnes de carbone, au sein des roches et les sédiments.
La séquestration du carbone dans les océans obéit à plusieurs mécanismes, parmi lesquels on trouve les coraux et le plancton (notamment phytoplancton). Le phytoplancton stocke le carbone de la même manière que la végétation terrestre par le principe de la photosynthèse. Des études ont aussi observé que le développement du phytoplancton s'accélérait en présence de minerais de fer, et qu'un atome de fer permettait d'aider à stocker de 10.000 à 100.000 atomes de fer supplémentaires. Certains scientifiques préconisent donc d'ensemencer en fer les océans (des expériences ont déjà été menées dans la région arctique) pour accroître la capture de carbone par la biomasse des océans. Les coraux participent également à la séquestration du carbone dans les océans, que cet animal microscopique utilise pour construire son squelette.
Toutefois, l'augmentation de la teneur en carbone des océans risque d'avoir une incidence sur leur PH (qui a peut-être commencé) ; l'augmentation de l'acidité des océans, qui pourrait résulter d'une hausse du carbone atmosphérique, empêchant le phytoplancton, les coraux et tous les invertébrés à coquille, de fabriquer leur squelette ou coquille ... Par ailleurs, les coraux sont également touchés par un phénomène de blanchiment, qui peut être dû à la chaleur ou à l'acidité. On estime ainsi que la grande barrière de corail australienne pourrait mourir et disparaître au cours des prochaines décennies du fait du réchauffement climatique.
Un troisième mécanisme de séquestration du carbone est appelé la 'pompe de solubilité', qui est régie par l’équilibre thermodynamique du CO² à l’interface entre l'océan et l'atmosphère. Le CO² dissout réagit avec l’eau pour donner de l’acide carbonique (H2CO3), lui-même en équilibre acido-basique avec le carbonate (CO3) et le bicarbonate (HCO3), qui représente près de 95% du carbone océanique. Schématiquement, à l'équateur, les océans sont une source de CO², dues au réchauffement des masses d’eau et à la remontée d’eau profonde riche en carbonates, tandis qu'ils sont des puits de CO² aux moyennes et hautes latitudes (du fait du refroidissement et de l'activité biologique du phytoplancton). L’océan austral serait ainsi le principal puits de CO² anthropique. Mais cette pompe de solubilité est également perturbée par l’excès de CO2 atmosphérique qui se dissout dans les eaux de surface.
Par ailleurs, la capacité de séquestration du carbone par les océans est différent entre les eaux de surface et les eaux profondes. Les eaux de surface ne représentent qu'une faible proportion de la masse océanique (de l'ordre de 2%). Elles ne disposent donc que d'une capacité de dilution du carbone négligeable, et sont en contact rapide avec l’atmosphère (de l’ordre de l’année). Le mélange avec les eaux de sub-surface, intermédiaires ou profondes est plus efficace, mais beaucoup plus lent (jusqu'à plusieurs siècles). Mais le réchauffement climatique risque justement de bloquer ces mécanismes de transfert entre les différentes strates d'eau dans les océans, avec le danger justement que des océans stratifiés ne permettent plus les échanges entre couches océaniques ni de stocker convenablement le carbone dans les eaux profondes des océans.
Enfin, le changement du climat et le réchauffement qui en découlerait pourrait modifier la circulation des courants océaniques, dans une mesure que l'on ignore encore pratiquement, et perturber notablement les champs de nutritifs et de carbonates, et donc la capacité de séquestration du carbone par les océans.

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