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Crise financière : des prêts et du baratin.
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Miguel Garroté – J’apprends ce matin que la Banque centrale européenne accorde dès aujourd’hui mardi 21 octobre 2008 un montant de 124 milliards de dollars de prêts sur quatre semaines dans le cadre de la politique financière coordonnée avec la Réserve Fédérale américaine. Les prêts sont accordés aux banques implantées dans la zone euro au taux fixe de 2,11%. Ailleurs, je lis, à propos de ce qui est généralement appelé - de manière on ne peut plus floue - les marchés financiers, que « créés par certains gouvernements », les « fonds souverains » sont des fonds d'investissement spéciaux pour gérer les avoirs extérieurs des Etats. Leurs actifs sont estimés aujourd'hui à 5000 milliards de dollars et « sont très développés en Asie et dans les pays producteurs de pétrole » notamment. En clair, ceci signifie que les « marchés financiers » cités à tors et à travers, ce sont, en ce moment, essentiellement les Banques centrales et les Banques d’Etat de Nations arabes et asiatiques.
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Formulé de façon encore plus concrète, ceci signifie que dans l’actuelle crise financière, les « marchés financiers », ce sont, en grande partie, des dollars certes américains mais d’origine principalement musulmane et chinoise. Ces dollars américains d’origine principalement musulmane et chinoise, pudiquement appelés « fonds souverains », sont évalués à 5000 milliards de dollars. La question est : à part les Arabes et les Chinois, personne d’autre n’a-t-il des fonds souverains pour secourir l’Union Européenne ? Car vu sous cet angle, inutile de dire que nos dirigeants politiques pourront, si nécessaire, continuer allègrement à annoncer des prêts de 100 milliards de dollars par-ci par-là. Au regard des 5000 milliards de dollars arabo-chinois susmentionnés, quelques centaines de milliards de dollars, c’est peanuts. On comprend mieux, dès lors, la décontraction avec laquelle le président français et son gouvernement annoncent régulièrement avoir trouvé du pognon pour colmater les brèches. Cela étant dit, vu la provenance des fonds qui colmatent, nous paierons un jour le prix politique d’une dépendance financière encore accrue vis-à-vis des Etats arabes et de la Chine communiste.
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Mais ce n’est pas tout. Les pays réunis aujourd’hui mardi 21 octobre 2008 à Paris à l'initiative de l'Allemagne et de la France demandent à l'OCDE de réviser sa liste noire des paradis fiscaux non coopératifs d'ici mi-2009. C’est le ministre français du Budget Eric Woerth qui l’indique aujourd’hui mardi. Et pour revenir à la rubrique « distribution de caramels mous », l'Etat français est prêt à injecter dans les banques françaises une nouvelle tranche de 10,5 milliards d'euros en 2009, si les tensions de marché venaient à persister, annonce la ministre française de l'Economie Christine Lagarde dans un communiqué. Je note en passant que Sarkozy veut unifier la planète dans sa réglementation à lui de la crise mais que lui, ses ministres et ses députés (voir plus bas avec Coppé) ne coordonnent pas pour autant leurs déclarations.
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Revenons sur terre. George Bush a accepté samedi 18 octobre 2008 l'idée d'une réunion internationale, voulue de façon quasi obsessionnelle par Sarkozy. Bush est même disposé à accueillir la sarkoréunion internationale - une de plus - aux USA. Mais Bush a seulement parlé d'un sommet dans un avenir proche, Sarkozy, lui, l'a souhaité avant fin novembre, lors de la conférence de presse commune tenue samedi dernier à Camp David. George Bush, dans son allocution radiophonique du samedi 18 octobre, a en outre rappelé, c’est là où nous revenons sur terre, qu’il croit fermement dans la liberté des marchés et Bush a aussi mis en garde contre les effets pervers que de nouvelles réglementations pourraient avoir sur l'activité économique. les deux remarques de Bush ne sont pas anodines.
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Car Sarkozy, depuis le début de cette crise financière, ne cesse de brandir la menace de nouvelles réglementations, exactement ce à quoi Bush - avec raison - ne croit pas. La prestation Bush Sarkozy à Camp David, lors de leur conférence de presse commune samedi dernier, avec le gentil Baroso en retrait, était éloquente. Sarkozy, gesticulant et pompeux comme à son habitude, s’en prit violemment aux paradis fiscaux, sous le regard compatissant et amusé de Bush. Après de nouvelles réglementations dans un système déjà sur-réglementé, Sarkozy veut maintenant, en plus, karcheriser les petits paradis fiscaux des Caraïbes qui, soit dit en passant, n’engrangent de loin pas les 5000 milliards de dollars d’origine arabe et asiatique, et paradis fiscaux, qui sont, le résultat inévitable, d’un système sur-réglementé justement…. C’est l’Etat crocodile français - et non pas les îles Caïman - qui se comporte comme un alligator.
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Mais depuis samedi, Sarkozy a encore eu plein de nouvelles idées. Aujourd’hui mardi 21 octobre à 10:46 on apprend ainsi que Sarkozy appelle à la création d'un « gouvernement économique clairement identifié » dans la zone euro, gouvernement travaillant aux côtés de la Banque Centrale Européenne. Intéressant, Sarkozy, président et de la France et de l’Union européenne veut désormais un gouvernement économique européen. même Ségolène Royal n’a pas osé cela dans sa campagne présidentielle.
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Et puis, sur leparisien.fr aujourd’hui mardi 21 octobre on peut lire les déclarations de Jean-François Coppé, président du groupe UMP à l’Assemblée nationale : « Il faut poursuivre les réformes de structure, pour aller chercher des recettes nouvelles, non pas par des taxes mais par des économies : la réforme hospitalière et la réduction du millefeuille administratif vont le permettre. Je vais avec mes amis députés UMP lancer les « états généraux de la dépense publique ». Nous y associerons l’ensemble des Français qui veulent devenir des acteurs de la réforme. Partout où il y a de la dépense publique inutile, on s’engage à la réduire. L’argent économisé servira au désendettement et aux baisses d’impôts ». Ah ? Mais c’est ce que Sarkozy n’a cessé de promettre durant sa campagne présidentielle en 2007 !
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En fait, c’est la bonne nouvelle du jour : Sarkozy est devenu socialiste mais Coppé est resté sarkozyste. On tachera de s’en souvenir aux présidentielles de 2012. D’autant que d’ici-là, les « fonds souverains » arabo-chinois avec leurs 5000 milliards de dollars présenteront peut-être leur candidat (Sarkozy ?) à l’Elysée. Faudrait pas qu’à la télé on nous entube une deuxième fois avec le même leurre. Et si vraiment en 2012 il n’y a toujours pas de candidat de droite - y en a-t-il jamais eu d’ailleurs ? - on pourra toujours voter pour DSK. A tout prendre, je préfère encore, pour redresser l’économie française, un social-démocrate à la fois modéré et compétent (raison pour laquelle en ce moment même certains l’enquiquinent) plutôt qu’un énième clone de Giscard.
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© Miguel Garroté 2008
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