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Télévision, suppression, précipitation… consternation !

Publié le 29 juin 2008 par Nicolas007bis

Richard

La réforme de la télévision publique a été menée en dépit du bon sens !

Non seulement elle s’appuie sur des bases discutables et sur des motivations douteuses mais la solution choisie est incertaine et tout à fait contestable.

Tout à commencé un beau matin de janvier et plus précisément au cours de la séance des bons vœux de notre Présidents Sarkozy.

Le voilà, tout jubilant, qui sort de son chapeau une décision d’importance capitale pour la télévision publique, sans concertation préalable, sans avoir établi de plan de financement précis, sans justifier en quoi le fait de supprimer la publicité aura une influence bénéfique sur la qualité des programmes !

Dans n’importe quelle entreprise, il eut été inconcevable d’engager un projet stratégique d’une telle envergure sans justification sérieuse et sans le moindre élément financier mais lui, apparemment, ça ne l’a pas gêné !

A ce niveau de l’histoire on hésite entre 2 hypothèses :

Soit Nicolas Sarkozy qui était déjà, à cette époque, brinquebalant dans les sondages, s’est demandé, le matin même, comment il allait pouvoir occuper le terrain de la rupture, de préférence par une annonce qui ferait oublier tous les autres sujets et qui de surcroît mettrait encore un peu plus de confusion dans l’esprit de ses opposants !

Et abracadabra turlututu chapeau pointu …il sort de sa besace la suppression de la pub sur France Télévision qui effectivement entre tout fait dans la catégorie rupture, qui effectivement fait beaucoup gloser et qui effectivement va ravir les lecteurs de TELERAMA !

Soit, il a une motivation plus profonde, quasi idéologique, qui est qu’en matière de médias, il faut séparer radicalement le privé du public… et en corolaire, que le financement par la publicité empêche la télévision publique d’assurer son rôle de Service public !
Dans les 2 cas, ce n’est pas très sérieux !

Tout d’abord parce qu’une telle mesure doit être justifiée par autre chose qu’une affirmation péremptoire du type « la publicité impose la course à l’audience qui impose des programmes médiocres » !

Sans publicité France Télévision va-t-elle être exemptée de faire de l’audience ?

La réponse on la trouve dans un entretien donné à l’Express (du 24 janvier) par José Freches considéré comme un des instigateurs de cette réforme.

"...dans les futurs cahiers des charges des chaînes, actuellement en préparation, figureront vraisemblablement des objectifs d'audience, imposés aux patrons de ces entreprises."

La réponse est claire, la télévision publique ne sera pas dispensée de faire de l’audience.

Pourtant, il me semblait bien que ce que l’on reproche à la publicité c’est justement de pousser à faire de l’audience et que faire de l’audience passe nécessairement par des programmes de « mauvaise qualité » ou disons faciles !

Cela signifie t’il qu’il y a de la bonne et de la mauvaise audience ?...que l’audience justifiée par la publicité n’est pas la même que celle qui sera demandée par l’Etat ?

Si on peut faire de l’audience sans être uniquement guidé par la pression des annonceurs, quel est l’intérêt de se priver du financement de la publicité ?

Sauf à en faire une affaire de principe, c’est à dire à considérer que la publicité est un mode de financement « sale » et qu’il ne faut surtout pas que la télévision publique se commette avec ces horribles représentants du grand capital international, avec ces apôtres de la Société de consommation qui corrompent tout ce qu’ils touchent !

Je ne pense pas que ce soit l’état d’esprit de Nicolas Sarkozy et en conséquence, j’ai le sentiment que sa motivation tient plus de la volonté de faire un coup d’éclat et de laisser son nom dans l’histoire que de la réelle conviction !

Il y a bien une autre option qui n’est pas exclusive des 2 autres qui pourrait consister à penser que Nicolas Sarkozy a cédé aux amicales pressions (version mauvais esprit) ou du moins s’est rendu aux arguments (version indulgente) des TF1 et autres M6.

Rappelons quand même que TF1 avait plaidé dans un livre blanc que le Groupe a remis à l'Elysée fin 2007, pour la suppression de la publicité sur les chaînes publiques.

Quoi qu’il en soit, le moins que l’on puisse dire (encore mon indulgence naturelle), c’est que les motivations, les raisons de cette réforme ne semblent pas extrêmement claires.

D’autant plus que, d’emblée, et comme si s’était une évidence, la question du mode de financement de l’audiovisuel public a été étroitement liée à celle de son mode de fonctionnement, de son organisation et de ses objectifs !

Et non seulement ces sujets ont été liés de manière indissociable mais on a commencé par la fin, tout a été fait à l’envers !

Au lieu de commencer par définir les exigences nouvelles, puis de redéfinir le cahier des charges des différentes composantes de France Télévision, puis de se demander qu‘elle est la meilleure organisation, quel est le budget nécessaire et puis, enfin, de se poser la question du mode de financement, on a commencé par amputer d’1/3 le budget de France Télévision !

En résumé, sans même indiquer en quoi la télévision sans pub sera différente de la télévision avec pub, et sans savoir par quoi remplacer ces recettes, on annonce que l’on va se priver de plus de 800 millions (même si un étonnant retour arrière semble avoir été fait pour ne plus avoir besoin que de 470 millions).

800 millions d’euros ça ne se trouve pas sous les sabots d’un cheval et par les temps qui courent alors que les caisses sont vides (sic Nicolas Sarkozy) et que les prélèvements obligatoires sont trop importants (sic Nicolas Sarkozy) je ne suis pas certain qu’il soit heureux de priver la télévision publique d’une telle manne financière !

Une fois l’annonce faite, il a quand même fallut s’interroger sur le financement de substitution et ça a été le rôle de la Commission Copé. Ses conclusions validées par Nicolas Sarkozy sont révélatrices des contradictions françaises.

Comme d’habitude, la solution qui a été trouvée c’est d’instaurer une taxe !

Pourtant si on veut faire jouer à l’audiovisuel public un rôle de service public, c’est en toute logique, un financement public qui doit être trouvé …et en l’occurrence il y en a un qui fait pour ça, c’est la redevance !

Pourquoi aller taxer des entreprises privées qui iront de toute façon répercuter ce coût supplémentaire sur leurs tarifs ? … et à quel titre ?

Certes les fournisseurs d’accès à l’Internet ont enrichis leur offre en rediffusant les contenus audiovisuels des télévisions, mais d’une part ils considèrent que cette taxe est complètement disproportionné avec le chiffre d’affaires généré par les flux télévisuels (selon eux il serait d'à peu près 500 millions d'euros) et d’autre part ces opérateurs rediffusent également et surtout des chaines privées qui elles, en toute logique, devraient également réclamer leur part !

Même si on admet que les fournisseurs d’accès Internet doivent une rémunération aux chaines qu’ils rediffusent via leur canal, cette rémunération est du ressort du contrat privé entre les chaines et les opérateurs, elle ne justifie pas une taxe !

De plus, assoir une partie importante du budget de l’audiovisuel public sur une base qui par définition est mouvante d’une année sur l’autre, crée une incertitude préjudiciable à un audiovisuel public qui a besoin d’une visibilité à moyen terme pour engager nombre de ses programmes.

Si le gouvernement avait voulu être cohérent, il aurait assumé son choix de supprimer la pub en augmentant la redevance, mais évidemment il est beaucoup plus simple d’instaurer une taxe supplémentaire qui ne touche pas directement les français et leur triste pouvoir d’achat.

Cette mesure n’aurait pas été franchement populaire et Nicolas Sarkozy aurait du expliquer clairement ses choix !

Et il aurait eu du mal à le faire, à convaincre que supprimer la pub permettra d’obtenir de facto une télé de qualité. C’est évidemment simpliste. La télévision de qualité suppose évidemment bien d’autres conditions que la simple suppression de la publicité. Elle suppose une autre organisation et peut être également d’autres moyens !

Même si l’argent ne fait pas tout, rappelons quand même que le budget de TF1 fait grosso modo 3 fois celui de France Télévision. Etait-ce vraiment le bon moment pour réduire le budget de France Télévision ?

Cette réforme est l’exemple parfait de ce qu’il ne faut pas faire !

On lance un projet sans réflexion préalable, on le justifie comme étant la condition sine qua non à une télévision publique de qualité et on commence par amputer celle-ci d’une partie de son financement, on ne se pose qu’ensuite la question de savoir par quoi la remplacer et on ne trouve rien de mieux que de taxer des Sociétés privées de manière tout à fait arbitraire, le tout avant même d’avoir défini ce qu’on entend par « télévision de qualité » et avant d’avoir spécifié les nouveaux objectifs qui devront être fixés à l’audiovisuel public !

Et en la matière on peut avoir les pires craintes si on en croit ce même José Freches déjà cité plus haut qui dans ce même entretien à l’Express nous dit :

"... il faut que France 2 innove. Qu'elle contribue à l'émergence d'une nouvelle génération d'animateurs et de producteurs. Qu'elle fasse la part belle à l'innovation, à la création, à l'investigation journalistique et aux nouveaux formats d'émission. Pour ma part, j'ai toujours regretté que France 2 se soit refusée à faire de la téléréalité et tourne le dos à des programmes comme la Star Academy, qui n'ont rien d’infamant.»

Le premier regret de José Freches est donc qu'il n'y ait pas sur France 2 la même téléréalité (programme de qualité s’il en est) que sur les chaînes privées !

Si la télé de qualité donnée en exemple à France Télévision est celle que produit TF1 et bien je ne suis pas certain que tout ce bazar soit bien utile !!!


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