L’actualité m’amène à revenir sur un sujet sur lequel je me suis déjà
rapidement exprimé en Janvier, généralement appelé « le service minimum à
l’école » ou de son petit nom "SMA" comme "Service minimum
d'accueil".
La demande du gouvernement faite aux municipalités d’organiser un système de
« garde » des enfants en cas de grève des enseignants avait déjà été
violemment critiquée par les enseignants et leurs syndicats ainsi que par la
gauche et ses municipalités. Celles-ci, à l’image de Delanoë à Paris, ont pour
la plupart refusé de mettre en place un tel système.
La réaction de Nicolas Sarkozy a été immédiate, puisqu’en pleine journée
d’action des enseignants, il annonce un projet de loi pour le « droit
d'accueil » dans le primaire en cas de grève qui impose notamment aux
enseignants de se déclarer grévistes au moins 48 heures avant le
mouvement.
C’est peu de dire que les réactions ont été vives dans l’opposition et chez
les enseignants les uns et les autres dénonçant une atteinte au droit de grève
« … Il n'y a pas de raison que des fonctionnaires municipaux brisent un
mouvement de grève de fonctionnaires nationaux" ou accusant le gouvernement de
« … jouer les usagers contre les grévistes… » .
Je ne me prononcerai pas sur le fond du différent qui oppose les enseignants
et le gouvernement, sur l’opportunité ou non de diminuer les effectifs de
l’Education Nationale. Les uns et les autres campant sur leurs positions, cela
se finira pour le gouvernement soit par un abandon en rase campagne soit par un
passage en force. La deuxième hypothèse me semble à la fois la plus probable et
la plus souhaitable.
Par contre, à propos de ce fameux « service minimum » je voudrais
exprimer 2 ou 3 petites choses :
Il n’était vraiment pas opportun de la part de Nicolas Sarkozy de prendre la
parole le soir même des manifestations pour annoncer son intention de demander
« au gouvernement de déposer avant l'été un projet de loi qui instituera
un droit à l'accueil des enfants inscrits dans nos écoles » …sans évoquer
en aucune manière le fond du problème, sans expliquer (réexpliquer) sa
position, sans justifier les diminutions d’effectifs et sans rappeler les
tenants et les aboutissants de sa politique.
Certes je suis persuadé qu’il n’aurait pas pour autant convaincu mais il
aurait au moins donné l’impression non pas de céder devant les manifestants
mais de les avoir écouté…et c’est son rôle !
Au lieu de cela, son annonce passe pour une provocation pure et simple qui
le moins que l’on puisse dire ne va pas contribuer à décrisper le
débat.
En clair, ce n’était pas la bonne réponse au bon moment !
Pour autant, sur ce sujet, j’ai du mal à comprendre les réactions
suscitées.
Outre le fait qu’un Service du public devrait pouvoir assurer une certaine
continuité, en quoi un service minimum que se soit dans les transports ou dans
l’Education nationale est-il une atteinte au droit de grève, surtout si on
demande à du personnel non-enseignant de l’assurer ?
En quoi la grève serait moins efficace selon que les enfants sont
« gardés » ou non ?
Considérer que le fait que les enfants soient « gardés » minimise
l’intérêt de la grève des enseignants, c’est d’une certaine manière mettre sur
un pied d’égalité la garde et les cours ! …ce qui est à la fois absurde et
méprisant pour les instits !
D’autre part, l’argument répété par François Hollande ou Julien Dray comme
quoi c’est opposer les usagers aux grévistes me parait à la fois grossier et
erroné.
Que ce soit le banlieusard qui va se presser, stresser, attendre sur un quai
qu’un métro, un train ou un RER bondé veuille bien l’amener dans des conditions
épouvantables jusqu’à son lieu de travail et surtout le ramener chez lui le
soir, ou que se soit la mère de famille qui constate le matin même que l’école
est fermée pour cause de grève et qui va devoir crapahuter et éventuellement
payer (prendre une journée de congé) pour garder ou faire garder son enfant, il
me semble que l’un et l’autre serait mieux disposé vis-à-vis des grévistes s’il
pouvait bénéficier d’un service minimum bien organisé.
N’est ce pas plutôt le sentiment qu’ont les usagers d’être « pris en
otage » par les grévistes, qui les opposent et les rend, du coup peu
enclins, à essayer de comprendre leurs motivations d'autant plus qu'elles sont
souvent largement corporatistes !
Quand à ceux qui prétextent une mise en œuvre compliquée pour refuser la
mesure, je leur répondrais que cette mise en œuvre est d’autant plus laborieuse
qu’il y a des réticences et des blocages et que si tout le monde voulait bien
agir dans le même sens, pour le service du public, je suis certain que des
solutions seraient vite trouvées.
Enfin, il me semble que l’image du Service Public que beaucoup considèrent
comme menacé dès qu’il s’agit de le faire évoluer, ne peut que ressortir
renforcée de la mise en place d’une telle organisation.