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That lucky old sun

Publié le 27 octobre 2008 par Castor
Brian Wilson sort un nouvel album "that lucky old sun". A son écoute, une question de nouveau m'envahit: ne serait-il pas merveilleux d’appuyer sur une touche pause pour arrêter le temps ?
De le faire lorsque notre état de créativité est à son maximum ?
Ne serait-il pas merveilleux de retrouver les garçons de la plage, jeunes et bronzés avec leurs chemises hawaïennes et imaginer que l’éternité est enfin accessible lorsque l’on regarde le soleil se coucher sur la mer en écoutant le rouleau des vagues ?
Lorsque les Beatles brillent tout en haut, un seul groupe peu encore rivaliser avec eux. Ils alignent les tubes sans faillir : Surfin' USA, fun, fun, fun, Barbara Ann, California Girls, I Get Around,…
C’est l'album Pet Sounds qui a, selon Paul McCartney lui-même, directement inspiré l'album des Beatles Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band, le même McCartney a d'ailleurs offert un exemplaire de Pet Sounds à chacun de ses enfants pour leur "éducation musicale", il considère aussi la chanson God Only Knows comme la meilleure chanson pop jamais écrite).
Brian Wilson tutoie alors les étoiles et s’épuise dans sa quête de la mélodie parfaite. Il allie sa maîtrise des tessitures vocales entremêlées à son génie de la composition et à son travail maniaque et perfectionniste en studio : il veut dépasser le Wall of sound de Phil Spector, engagé pour produire l’album.
C’est un chef d’œuvre encore souvent considéré comme le plus bel album pop jamais écrit. Il s'agissait ici de la plus notable tentative de Brian de s'éloigner de la surf music popularisée par ses Beach Boys pour traiter de sujets plus profonds que la Californie et de ses jolies filles.
Hélas, on ne peut toujours maintenir la touche pause enfoncée et lorsque l’on appuie sur la touche lecture s’ensuit un projet ambitieux, trop ambitieux.
Brian Wilson se consacre désormais à une grand-oeuvre, "une symphonie adolescente à Dieu", sur l'album Dumb Angel, très vite rebaptisé Smile...
Des sessions d'enregistrement sortent le single "Good Vibrations", énorme carton des deux côtés de l'Atlantique. On découvre alors que le travail de Wilson est extraordinaire et éminemment complexe. Plus de soixante mouvements sont composés pour couvrir une même section sonore. Wilson et son parolier Van Dyke Parks (20 ans au compteur contre 24 à Wilson) assemblent les morceaux à l'oreille au cours de sessions dont ils ne verront jamais la fin. L'année 1966 est passée en studio. Mc Cartney vient espionner le duo, jouant de la courge et de la carotte (il frappe des légumes les uns contre les autres sur Vegetables, l'un des 17 titres de Smile !), avant de retourner en studio avec Lennon et de doubler les Américains sur tous les tableaux autour d'une même idée directrice avec Sergent Pepper. En mai 1967, puis en juin, Wilson et Van Dyke Parks sont toujours au boulot.
Mais durant l'enregistrement, les objections du groupe s'ajoutent aux dérives paranoïaques et aux crises de folie de Brian Wilson (en studio, il allume un feu de bois dans la corbeille et oblige les membres du groupe, coiffés de casques de pompiers, à en sentir la fumée... pour la chanson "Fire").
Brian Wilson pique une crise lorsque Mc Cartney lui interprête "She's leaving home" au piano. Le projet est clôt. En septembre1967, la « première symphonie divine pour adolescents » est enterrée. Wilson se perd peu à peu dans ses milliers d'heures de bandes sonores. Il ne parvient pas à boucler l'album, arrête quelques titres (Heroes and Villains, Surf's Up), tous des chefs d'œuvres, et effraie ses compères qui ne voient pas où il veut les emmener. En septembre, la maison de disques sort affolée un album temporaire Smile Smiley, tronqué et qui marque la fin de l'Age d'Or pour le groupe et son leader. Des titres sortiront ensuite, disséminés sur des albums différents, sans qu'on puisse jamais savoir à quoi Smile aurait ressemblé s'il était sorti en 1967.
Brian Wilson sombre ensuite dans la dépression. A la manière d'un Syd Barett, il s'enferme chez lui, passe trois ans dans sa chambre sans jamais la quitter ! Il ne se lave plus (sa femme devait le jeter de force sous la douche) et prend beaucoup de poids. Cette grave période de dépression est à mettre au crédit de sa maladie mentale et sa prise conséquente de drogue.
Smile est mort avant d'être né. La légende naît d'un album avorté qui aurait pu changer la donne de la pop. Peut-être. L'un des plus grands génies de la musique du XXème siècle, dixit Léonard Bernstein, s'enfonce dans les ténèbres.
Et contre toute attente, en 2004, l’album sort enfin !
« Smile est-il le chef-d’œuvre annoncé ? Oui, il enfonce même tous les pronostics. Question subsidiaire : Smile est-t-il supérieur à Pet Sounds, le disque qui est déjà supérieur à tous les autres ? On s’en fout, en vérité, car ces deux albums bâtis dans un même élan de folie créatrice (et de folie tout court) par un jeune mec de 24 ans foudroyé par la grâce sont désormais réunis, jumelés, indissociables. Longtemps constitué de bribes de morceaux orphelins, éparpillés sur plusieurs disques des Beach Boys ou sur des pirates de toute dimension, Smile retrouve enfin son déroulé, dont seul Brian Wilson possédait le plan. Aidé par Darian Sahanaja, le clavier des Wondermints et directeur musical du projet, il a rassemblé les morceaux dans l’ordre et tenté de reconnecter ses neurones pour leur apporter le liant nécessaire ».
Christophe Conte – 29/09/04 - Les Inrocks
Alors, reposons la question : ne serait-il pas merveilleux d’appuyer sur une touche pause pour arrêter le temps ?
De le faire lorsque notre état de créativité est à son maximum ?
En voici l’occasion :
Dernière chose : les Beach Boys n'ont jamais surfé ! Dennis Wilson était le seul du groupe à dompter les vagues, et c'est lui qui a suggéré au reste du groupe d'évoquer son sport favori dans leurs chansons. Il est mort noyé en 1983.
Brian Wilson sort de nouveau un album en cette année 2008, décidemment pleine de bonnes surprises.


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