Six associations d'aide aux étrangers ont répondu à l'appel d'offres lancé par le ministère de l'Immigration sur la gestion des centres de rétention administrative. Dans le même temps, dix ONG déposent un recours devant le conseil d'Etat contre le décret d'Hortefeux. Dernier espoir avant la mise au pas définitive des associations ?
Le plan de Brice Hortefeux - diviser les associations d'aide aux étrangers en situation illégale enfermés dans les centres de rétention administrative (CRA) - a l'air de fonctionner à merveille. Six associations ont répondu mercredi à l'appel d'offres lancé par le ministère de l'Immigration sur les centres de rétention : la Cimade (Conseil œcuménique d'entraide), Forum Réfugiés, France Terre d'asile et l'Ordre de Malte, l'Assfam (Association service social familial migrants) et le Collectif Respect. Tandis que dix ONG, en opposition avec la réforme d'Hortefeux, ont déposé, mercredi, un recours devant le Conseil d'Etat.Le décret gouvernemental du 22 août a en effet réformé le dispositif d'aide aux étrangers en situation illégale placés dans les CRA. Il a introduit la possibilité qu'« une ou plusieurs personnes morales » y exercent des missions d'information et d'aide. Hortefeux a aussi prévu que les 27 CRA (30 en activité à compter du 1er janvier 2009) soient répartis en 8 « lots ». En clair : le droit des étrangers est réduit à un marché concurrentiel !Mise au pas des associations ?
La vengeance est un plat qui se mange froid. Hortefeux n'a jamais supporté le rôle de la Cimade, qui avait dénoncé les conditions de détention inhumaines des CRA. Bien avant l'incendie du CRA de Vincennes, le 22 juin dernier. «Cette réforme est un coup porté à la Cimade », avait déploré fin septembre son secrétaire général Laurent Giovannoni. Cette association était jusqu'ici la seule habilitée à intervenir auprès des étrangers « retenus ». Contrainte et forcée, au dernier jour de l'appel d'offres mercredi, la Cimade s'est dite prête à accomplir sa mission sur tout le territoire national. Un aveu d'impuissance devant le rouleau-compresseur Hortefeux ?
« Nous poursuivons notre mission, mais nous contestons le dispositif mis en place par le ministère de l'Intérieur parce qu'il interdit le travail interassociatif pour permettre l'exercice des droits des étrangers », précise Laurent Giovannoni. Certes, la réforme voulue par le ministère de l'Immigration rencontre une certaine résistance. Pour preuves : le référé du 13 octobre devant le tribunal administratif de Paris, et le recours du 22 octobre devant le Conseil d'Etat. Un bémol : « Le rapport de force ne nous est pas favorable et, à l'évidence, le ministère a cherché à diviser », avoue d'emblée Pierre Henry, directeur général de France Terre d'asile. Néanmoins, il regrette : « Est-ce une réponse protestataire qu'il fallait apporter ? Je pense que nous pouvions apporter une réponse commune en se présentant ensemble sur un même “lot“. »Un point de vue que ne partagent pas d'autres associatifs. En témoigne le communiqué des dix associations en colère : « Le décret, interdisant la mise en œuvre tant au niveau national que local d'une action conjointe des associations auprès des personnes placés en rétention, ne peut que réduire gravement l'exercice effectif des droits des migrants. » Le Secours catholique, la Ligue des droits de l'homme, la Cimade, entre autres, dénoncent la réforme d'Hortefeux « qui vise à supprimer le rôle spécifique des ONG dans un Etat de droit ». Mais malgré ces protestations de rigueur, les associations candidates à l'appel d'offres ne finissent-elles pas par rentrer dans le rang ? Hortefeux ne peut encore savourer pleinement sa victoire, mais il est en passe de réussir son pari : mettre au pas les associations d'aide aux sans-papiers.ICI