"Ca n'a rien à voir avec la Bosnie, le Kosovo, le Liban ou le Tchad. Ici en Afghanistan, le danger est permanent" : l'adjudant-chef français Pascal X. vient de conduire son convoi jusqu'à la base avancée de Nijrab, une mission logistique parmi 700 menées depuis juin.
La piste pierreuse qui serpente à travers montagnes et défilés met à rude épreuve essieux et soldats.
"Le danger principal pour un convoi logistique, ce sont les IED (Improvised Explosive Device)", ces mines artisanales qui jalonnent les routes d'Afghanistan, explique l'adjudant-chef.
Mais la liste des périls qui guettent les convois logistiques est longue, des attentats-suicide aux embuscades, et l'imagination des insurgés sans limite : jeudi, un âne piégé a tué un policier afghan à Kandahar, dans le sud.
"En Bosnie, il nous arrivait de partir avec 35 ou 40 camions pour 4 ou 5 véhicules blindés, ici, c'est l'inverse, on a 4 camions pour 16 blindés", constate le sous-officier du 511e régiment du train.
Fin août, un convoi logistique a été "accroché" entre Nijrab et Tagab, la seconde base avancée française dans cette région de l'est de l'Afghanistan. Plus de peur que de mal : une roquette a frappé le blindage d'un véhicule, sans exploser. Un petit miracle.
Les 20 véhicules du convoi de jeudi transportaient du fret, un conteneur de munitions, une "laverie de campagne" et divers matériels.
Mais depuis la fin juin, les 500 hommes du nouveau bataillon de commandement et de soutien qui assure la logistique des 2.700 soldats français déployés sur le sol afghan ont déplacé des montagnes. Parcourant 135.000 kilomètres, ils ont transporté plus de 8.500 tonnes de fret.
Dans les convois, les camions porte-conteneurs attirent l'attention : leurs cabines sont dépourvues de blindage. Dans le jargon des logisticiens, on les a baptisés les "vecteurs mous", par opposition aux blindés.
En attendant les poids-lourds blindés, promis pour les prochaines semaines, les troupes françaises ont renoué avec le "système D".
Deux gilets pare-balles sur chacune des portières latérales offrent un semblant de protection. Un homme équipé d'un Famas, le fusil d'assaut de l'armée française, est juché à travers la lunette de toit, position particulièrement inconfortable dans la poussière omniprésente.
"Les personnels ont l'habitude, mais on verra arriver le nouvel engin avec plaisir, surtout ceux qui le serviront", observe l'adjudant-chef.
D'autres moyens, plus discrets, concourent à la sécurité. Chaque véhicule est équipé d'un brouilleur, censé empêcher que des engins explosifs ne soient déclenchés à distance, par radio ou téléphone portable.
Dans le ciel, avions de chasse, drones et hélicoptères sont mis à contribution pour observer tout mouvement suspect sur les hauteurs.
Le convoi de jeudi comprenait une équipe de l'armée de l'air prête à requérir un soutien aérien et à guider le tir des avions s'il était "engagé" par les insurgés. Ce jour-là, un hélicoptère jouait les anges gardiens.
L'autre mesure de sécurité, ce sont les consignes, inlassablement répétées. Comment réagir en cas d'explosion d'un engin artisanal ou d'embuscade? "C'est de la marteau-thérapie mais il faut éviter à tout prix le relâchement", explique l'adjudant-chef.
Source du texte : LE POINT.FR