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Sommet de Vichy : une pastille difficile à avaler

Publié le 03 novembre 2008 par Hmoreigne

petain_laval.1225702419.jpgBrice Hortefeux, ministre de l’immigration et de l’identité nationale ne ménage pas ses peines, pour tenter de promouvoir sa bonne région auvergnate. A son initiative, la ville de Vichy (03) accueille les 3 et 4 novembre la 3ème conférence européenne sur l’intégration. Une thématique osée pour une ville qui peine à se débarrasser de l’image de la révolution nationale du maréchal Pétain.

Brice Hortefeux, conseiller régional d’opposition, explique son choix par sa volonté « de mettre fin à 60 ans d’ostracisme », « Il ne faut rien oublier de l’Histoire, sans pour autant faire supporter aux habitants de Vichy le poids du passé ».

Selon le quotidien régional La Montagne, “Cet événement majeur est particulièrement symbolique pour Vichy, qui n’avait pas accueilli une réunion internationale de ce niveau depuis la Seconde Guerre Mondiale”. Claude Malhuret, maire UMP de Vichy se félicite d’un tel choix. « Les Vichyssois ont le sentiment de recouvrer leur dignité ». Selon l’édile, il s’agit de mettre fin à des tabous mais aussi d’une reconnaissance des qualités de sa ville en matière d’accueil.

Le critère est pertinent. Le régime Pétainiste ne s’en était jamais plaint. Le repli en pleine débâcle des autorités françaises dans cette ville d’eaux avait été notamment guidé par la capacité hôtelière de la cité et la modernité de son central téléphonique. Par la proximité également avec la commune de Chateldon, fief de Pierre Laval.

Certes, il faut savoir tourner les pages de l’histoire. Peut-on pour autant balayer d’un simple revers de main des symboles encore forts dans la mémoire collective ? Vichy et ses habitants ont évidemment droit à autre chose qu’à un rappel permanent à l’une des périodes des plus sombres de l’histoire de France.

Fallait-il pourtant, dans un contexte de stigmatisation de l’étranger et d’accentuation des mesures à l’encontre des immigrés résidant en Europe, prendre le risque d’ouvrir la porte à de vieux démons en accueillant une conférence internationale sur un sujet aussi sensible que l’intégration des populations étrangères ?

C’est s’affranchir un peu vite, à la sauvette, du fait que le régime de Vichy, sous l’impulsion de Pierre Laval, élu du cru, restera à jamais dans les livres d’histoire comme l’un des rares régimes de pays occupé qui aura collaboré avec les nazis sur la question juive. Les hommes ont certes disparus, pas l’hôtel du Parc, simplement transformé en résidence privée.

Prévenir les bégaiements de l’histoire constitue l’une des motivations des opposants à la tenue du sommet. A l’appel de plusieurs partis de gauche et d’organisations de défense des droits de l’homme, un contre-sommet est organisé. «Nous nous élevons contre les politiques xénophobes et l’Europe forteresse qui impose des quotas et criminalise les sans-papiers», indique Michel Beau, le coordinateur (communiste) de cette manifestation.

La réunion internationale de Vichy a pour objet d’échanger sur les « bonnes pratiques » à promouvoir à l’échelle de l’Union européenne sur la question de l’immigration mais, elle s’inscrit dans une période porteuse d’inquiétudes. On est loin de l’Europe des Lumières. En France, la chasse aux sans papiers, l’utilisation de charters pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière suscitent un réel malaise renforcé par le « pragmatisme » prôné par Nicolas Sarkozy à travers son Pacte Européen sur l’immigration et l’Asile.

Les « bonnes pratiques » qui doivent être esquissées par le sommet de Vichy ont pour unique objet de rendre plus acceptable la politique européenne en matière d’immigration bancale à ce jour, uniquement orientée vers l’élévation des murs d’enceinte d’une hypothétique forteresse. Souhaitons, sans trop d’illusions, à cette Conférence de réussir.

On regrettera toutefois pour la Ville de Vichy que, la thématique retenue n’ait pas été celle, maintes fois évoquée mais jamais mise en œuvre, du co-développement. Les vieux fantômes, les ambiances lourdes ont la peau dure. Il fallait ouvrir les fenêtres. Brice Hortefeux aura préféré un parfum d’intérieur de mauvais goût.


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