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Le plan Paulson Chinois

Publié le 10 novembre 2008 par Graphseo

Avec le ralentissement prévisible de ses exportations, fortement dépendantes du consommateur américain, Nouriel Roubini prévoyait un « hard landing » pour l’économie chinoise, qui doit impérativement croître à un rythme de 9% afin d’absorber les 20 millions de nouveaux travailleurs qui la rejoignent chaque année . Conscients du danger, les autorités chinoises viennent de décider d’un plan de relance d’une ampleur inégalée.
Le plan Paulson Chinois

Par Paul Jorion, 10 novembre 2008
Ce texte est un « article presslib’ » (*)
J’écrivais dans « Vers la crise du capitalisme américain ? » (La Découverte 2007) :

Dans un monde où les États-Unis risquent de perdre leur leadership sur le plan technologique, la Chine a encore besoin de la locomotive que constitue la consommation des ménages américains. Un jour cependant, le marché indien ainsi que son propre marché intérieur, suffiront amplement à ses ambitions. Elle pourra alors se désintéresser des États-Unis. Son retrait du marché de la dette américaine, où son intervention massive aujourd’hui contribue à maintenir des taux d’intérêt artificiellement bas, précipitera encore davantage la crise déjà amorcée aux États-Unis.

Les choses ne se sont pas passés ainsi : avec l’éclatement de la bulle de l’immobilier, les ménages américains ont vu se tarir la corne d’abondance que constituait la valeur captive dans les murs de leur logement et qui leur permettait d’acheter jusqu’à plus soif des produits de consommation manufacturés en Chine. Du coup, celle-ci est obligée de se tourner vers son marché intérieur beaucoup plus tôt que prévu. Elle l’a apparemment bien compris et alors que l’on attend du nouveau président américain qu’il lance, à l’instar de Franklin D. Roosevelt en 1933, un New Deal, un programme planifié de relance de l’économie, axé sur le plein emploi et une politique de grands travaux, c’est de Chine que vient aujourd’hui l’annonce d’un New Deal.
La croissance en Chine a été de 9 % durant le troisième trimestre 2008, soit 27 % de la croissance mondiale, significativement moins cependant que les 12 % de 2007, mais beaucoup plus que les 0,8 % des États-Unis ou les 1,4 % de l’Union Européenne. Mais la Chine estime que pour atteindre son objectif d’une amélioration globale de la situation de la population chinoise il lui faut maintenir un minimum de 8 % de croissance. Elle a donc décidé de lancer, bien avant le reste du monde, son propre New Deal en y consacrant d’ici à 2010 un budget de 4 000 milliards de yuan, soit 454 milliards d’euros ou 586 milliards de dollars. Une telle somme équivaut à 16 % de son PIB en 2007.
Ce budget sera consacré à la construction de HLM, à la rénovation de l’infrastructure routière et ferroviaire, à une aide à l’agriculture, à l’irrigation et à l’achat de graine en particulier, à un programme de santé et de pensions et à des prêts aux PME. Les taxes sur l’achat de machines-outils et d’équipement industriel en général seront également réduites.
Il était prévu avant l’annonce de ce plan que le PIB de la Chine pour 2009 serait de 7,5 %. Le nouveau programme bonifiera ce chiffre de 2 % pour atteindre 9,5 %, au-dessus donc des 8 % jugés souhaitables pour la bonne santé du pays par ses dirigeants. C’est à l’aune de ce New Deal à la chinoise que celui de Mr. Obama sera désormais jaugé.
Rappel essentiel bien sûr pour toute discussion portant sur des chiffres de croissance : selon le principe qui veut que « faire et défaire, c’est toujours travailler », ces chiffres combinent destruction de l’environnement et efforts encore beaucoup trop maigres de le restaurer. C’est à nous de rappeler sans cesse à nos dirigeants que toute croissance doit viser désormais l’atteinte d’un état stable pour notre planète à un niveau de pollution réduit par rapport à ce qu’il est aujourd’hui.
Lire aussi :
Brad Setser : How severe a slump in China ?
Yves Smith : Roubini Foresees Chinese Hard Landing
Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment La crise. Des subprimes au séisme financier planétaire L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008) et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).

* Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


Article communiqué par Paul Jorion

Illustration : ouvriére chinoise


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