Martin, 8 ans, rêvait d’apprendre l’arabe. Non, lui a répondu son école, au motif qu’il n’était pas arabe. En France, 80 000 enfants de migrants bénéficient de ces cours de langue étrangère. Mais ils devraient bientôt s’ouvrir à tous.
TU N’AS PAS le droit d’apprendre l’arabe parce que tu n’es pas arabe ! » Voilà ce qu’une directrice d’école de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) a répondu à un petit garçon de 8 ans, il y a un mois, lorsqu’elle a appris que l’enfant suivait un cours d’enseignement des langues et cultures d’origine (Elco) en arabe.
Martin, élève en CE 2, souhaitait apprendre cette langue depuis l’année dernière. Pour aller plus loin que les rudiments enseignés par sa nounou d’origine tunisienne, qui vient le chercher après les cours. Christophe Auxerre, papa du garçonnet, est encore abasourdi par la réaction de la directrice : « Je trouve ça choquant et discriminatoire ! Un enfant de 8 ans qui demande à apprendre une langue étrangère, c’est une ouverture de l’esprit et là, on la bloque. Quel dommage… »
« Des accords ont été passés cet été avec le Maroc, la Tunisie et l’Algérie »
L’Elco n’est pas un cours de langue comme les autres puisqu’il est, à l’origine, exclusivement réservé aux enfants dont les parents ont émigré en France. Les professeurs sont d’ailleurs payés par l’ambassade du pays dont la langue est enseignée. Contacté par le père de Martin, le service culturel de l’ambassade d’Algérie a affirmé « ne pas comprendre le refus », et lui a assuré que les cours étaient « ouverts à tous, tant qu’il y a de la place ». Christophe Auxerre a alors appelé l’inspection académique du Val-de-Marne où on lui a signifié le contraire : d’après les textes réglementaires, l’Elco est réservé aux enfants de migrants. « Je trouve que c’est une application bête et méchante du texte, indique le père de famille. Si mon fils avait pris la place d’un autre enfant, j’aurais compris, mais ça n’était pas le cas ! » Martin s’est donc rendu à son deuxième cours d’arabe accompagné de ses deux parents. Ces derniers ont finalement reçu l’accord « exceptionnel » de l’inspecteur de circonscription. Mais le combat ne s’est pas arrêté là. Christophe Auxerre a en effet saisi la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) ainsi que le médiateur de la République. Ces deux plaintes n’auront peut-être bientôt plus lieu d’être. Car, selon René Macron, chef du bureau des écoles au ministère de l’Education nationale, « des accords ont été passés cet été avec le Maroc, la Tunisie et l’Algérie afin d’ouvrir les cours d’arabe à tous, dans la limite des places disponibles ». La circulaire prenant en compte cette réforme de l’Elco entrera en vigueur à la rentrée 2009.
Le Parisien