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Jeudi 30 octobre 2008, Grenade : Tourisme d’Al-Andalus

Publié le 12 novembre 2008 par Memoiredeurope @echternach

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Avant de quitter Grenade pour rejoindre le Portugal, je pensais un instant à tenter de mesurer l’écart entre l’effort mis en œuvre par mes amis de l’équipe de l’itinéraire de l’Héritage Al-Andalus et la réalité de la fréquentation touristique. 

Ce que je sais, pour avoir côtoyé Jeronimo Paez depuis bientôt 14 ans, c’est l’incroyable ténacité de cet homme que je rencontre à chaque fois – quand il n’est pas pris dans une présentation officielle – assis dans un restaurant ou un café. Non pas dans l’avant salle, mais tout au contraire, en train de traiter ses affaires dans un recoin, dans le fin fond ; là où il attend son interlocuteur et ses collaborateurs pour faire le point avant de goûter l’huile d’olive posée sur la table et de donner son verdict au patron.Et en affaire, comme en ce qui concerne l’huile d’olive, il est prêt à changer aussitôt de producteur ou de collaborateur si le goût ne correspond pas à son attente. 

Hier soir encore, nous l’avons rejoint pour le repas du soir, au retour de Priego. Les personnes qui étaient présentes autour de la table, et surtout les représentants de l’itinéraire Saint Martin, de la Via Francigena et des Phéniciens, ont découvert la majesté, le pouvoir et l’aura du maître de maison. J’étais placé à sa droite. Le Directeur des Phéniciens à sa gauche. Et il a fallu passer les tapas pour décider que l’exposition qui sera consacrée à l’ensemble des itinéraires culturels aurait lieu à partir de mai 2010, avec une sorte de répétition en mai prochain, lors d’un colloque organisé avec l’université de Grenade.

Il s’agit d’une décision tout en demi-teinte, qu’il faudra poursuivre dans les mois qui viennent, mais dont je sais déjà que si nous concluons un accord en janvier prochain, la couronne espagnole sera présente, en même temps que quelques ambassadeurs des pays arabes et pourquoi pas, quelques ministres de la culture européens.

Tout le monde attend de lui des oracles. Mais chacun sait qu’il est en effet l’ami du Roi d’Espagne. Cela suffit.Et c’est cette amitié, tout comme celle qui l’a lié à Felipe Gonzàlez en son temps, outre ses compétences de juriste, qui lui ont valu de diriger en 1995 et 1996 les Jeux mondiaux d’hiver qui se déroulaient dans la Sierre Nevada. Avec une année de retard, faute de neige. Mais cette année lui a permis de mettre en place un projet de Fondation qui, aujourd’hui, bénéficie de l’attention continue du gouvernement autonome.

Ténacité, disais-je. Elle porte sur le sentiment constant d’une urgence, celle de provoquer des ponts, de faire travailler ensemble ; au-delà même de l’Europe, dans le grand rapport au monde arabe, Espagnols et Maghrébins, Européens au sens plus large avec les Africains et les peuples du Moyen-Orient, musulmans, juifs ou chrétiens.

Et toutes ses actions, de la pédagogie à l’exposition, de la recherche, à la publication, vont dans ce sens.Je ne crois pas en effet avoir de partenaire qui soit aussi attentif à la recherche et à la richesse de l’interprétation.

Mais qu’en est-il du tourisme ? Je crois que là, au-delà de la proposition d’un parcours individuel, que peut suivre tout passionné qui a entre ses mains les nombreux ouvrages historiques publiés, Jeronimo a réellement du mal à cerner les besoins collectifs et ceux des professionnels du tourisme.

La Fondation parle alors de “Route” et non plus d’itinéraire, et avec raison, puisque l’on propose un parcours dont la narration est le parcours même, dans ses aspects polysémiques, et non plus un point de vue scientifique. Mais il va pourtant de soi que la Route (Rutas), balisée et présentée dans de nombreux guides, produit par elle-même un message fort de tolérance, en confrontant la vision des époques, en racontant la force de la convivance que j’évoquais hier, jusqu’à à la période catholique et la Reconquista, qui était le sujet abordé par Gabrielle Nanchen.

Mais le tourisme c’est aussi le paysage, la gastronomie, l’accueil, la rencontre, une forme et un rythme de parcours. C’est de fait ce que nous tentons aujourd’hui, après vingt années de recherche et de développement, de mettre en œuvre comme un nouveau tourisme de l’Europe. Ou, pour reprendre le titre de l’exposition de Santiago : « L’Europe est le chemin ». Encore faut-il le faire ressentir par ceux qui découvrent l’Europe, au moins celle-là, exigeante et diverse, complexe et heurtée.Alors il faudra bien que nous mettions ensemble au plus vite de manière accessible sur le site de l’Institut où elles sont maintenant enfouies, ces interventions de 1996 prononcées au château de Bourglinster à l’aube de la création de l’Institut des itinéraires culturels : « Au lendemain de la Reconquista, une grande partie des musulmans et des juifs d’Andalousie émigrèrent au Maroc. Le terre marocaine a alors accueilli ces rejetés avec leurs savoirs, leurs coutumes et leurs traditions andalouses et les adopta. C’est ce qui fait que le Maroc est aujourd’hui encore le plus andalous des pays du Maghreb. Toutefois, notre histoire commune avec la péninsule ibérique ne s’arrête pas là. Nous nous sommes implantés sur le sol ibérique au Moyen-Âge mais les Ibériques se sont postés sur notre sol à partir de 1416 et y sont restés quelques années. Maintes traces de ce passage sont présentes sur le sol marocain et c’est une part de notre histoire que nous revendiquons. Pour cela, et à titre de parenthèse seulement, je dirais que nous avons créé avec nos amis portugais, un centre spécialisé à El Jabida, l’ancienne Mazagas , pour la sauvegarde et la préservation du patrimoine maroco-lusitanien. » Ce sont les paroles de Abdelaziz Touri qui était Directeur du Patrimoine du Maroc à l’époque.

Et Jeronimo Paez, intervenant en anglais, citait en réponse une phrase de Antonio Gala, écrivain né à Ciudad Real en 1932  : « Al-Andalus has the custom - between fortune and misfortune: among doing, undoing and re-doing - of universality. It also has the historical mission of creating bridges, that is to say, strictly speaking, as a pontifax: the bridge between Europe and Islam, the bridge toward America, the bridge between the past and present, whose fruit is tomorrow.”

Avec des pensées fortes ont peut en effet rechercher un nouveau tourisme !

Photographies : Alcazar de Séville.


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