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PS : en route vers la clarification

Publié le 17 novembre 2008 par Hmoreigne

royal.1226911127.jpgDu débat jaillit la lumière. Quel socialiste ne connaît pas cette maxime célèbre de Jean Jaurès. Quel socialiste ne serait pas légitimement en proie aux doutes et aux angoisses s’il s’en tenait à la majorité d’une presse qui ne parle que de chaos alors que de celui-ci semble se profiler la clarification si attendue dans le grand malstrom socialiste. Le train de l’histoire est passé à Reims. Si trois passagers sont montés, un seul arrivera au terminus.

Ségolène ou Martine, Martine ou Ségolène. Le combat s’avère rude mais, il l’a toujours été dans la vieille maison socialiste. Pas plus, pas moins que lorsqu’il opposait la gauche dite moderne de Michel Rocard à celle décrite comme classique ou archaïque de François Mitterrand. Ne dites surtout pas à l’ancien Premier ministre qu’il présente des analogies avec Ségolène Royal, sa santé risquerait d’en souffrir. Pourtant, le choix qui va être proposé aux militants les 2O et sans doute 21 novembre prochain, sera du même acabit. Deux conceptions de la politique totalement opposées et incompatibles sont en lice.

L’une, celle de Martine Aubry, est porteuse de la nostalgie d’un parti socialiste du XXéme siècle discipliné, verrouillé, laborieux. L’autre fait place à la fantaisie de l’air du temps, à l’ouverture et surtout aux médias. Mais, contrairement au choc Rocard-Mitterrand, l’avantage devrait revenir à la modernité grâce à la suprématie de l‘arme médiatique sur l’arithmétique des réseaux.

L’épisode de la carte à 20 € était annonciateur du choix présent. Quelle dimension souhaite-t-on donner au parti socialiste ? Une taille réduite savamment contrôlée pour les partisans de Martine Aubry. Une maison portes et fenêtres grandes ouvertes pour Ségolène Royal. Le choix n’a rien d’anecdotique. L’arrivée massive de nouvelles têtes dans les sections prônée par Ségolène Royal bouscule des équilibres savamment entretenus, des répartitions de pouvoir toujours délicates en vue de l’obtention de fauteuils ou de strapontins. Elle est souvent ressentie de façon douloureuse, comme une dépossession, par les « vieux » militants qui s’estiment seuls légitimes car titulaires d’une culture politique. Dans ce schéma, le nouvel arrivant, au lieu d’être le bienvenu, est toujours perçu au départ comme suspect, dérangeant.

Ségolène Royal propose de mettre un coup de pied dans ce système ronronnant qui a défaut de faire du PS un parti de gouvernement en a fait une machine à gagner au plan local. Devenu au fil du temps un parti de notables et d’obligés le PS s’est peu à peu coupé du monde réel. Singulièrement, c’est par le virtuel, la technologie de l’image et de l’internet que Ségolène Royal a réussi à retisser des liens. Il existe de ce côté-là, un phénomène Royal. L’ex candidate aux présidentielles est l’une des rares femmes politiques capable de drainer des foules et paradoxalement, cette qualité est ressentie comme gênante par son parti.

Dans ce clivage générationnel, Ségolène Royal joue le rôle d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, abordant sans tabou et parfois sans finesse, des sujets qui constituaient jusqu’à présent le fond de commerce socialiste. Face à elle, Martine Aubry a beau jeu de se poser en gardienne du temple, en rempart pour défendre la vocation sociale de la gauche traditionnelle à moins que ce ne soit traditionaliste : les syndicats, les associations… Ce sont malheureusement tous ces piliers qui aujourd’hui vacillent et, les incantations, mêmes fortes, ne sauraient suffire à elles seules à les sauver.

Un monde ancien s’achève et un nouveau reste à inventer. Ségolène Royal l’a mieux que les autres pressenti. Le fait qu’un accord ait été trouvé entre les représentants de la motion Royal et ceux de la motion du pôle écologique, la vraie nouveauté de ce congrès, est symptomatique. Les représentants du pôle écologique justifient cet accord par le fait que Ségolène Royal incarne un renouvellement dans les pratiques et que son score en tête dans le vote des motions lui donne une légitimité à constituer autour d’elle une majorité.

Contrairement à l’appel au compromis lancé par Bertrand Delanoë, Henri Emmanuelli, au nom de la motion Hamon, a demandé avec insistance une clarification « Nous ne devons pas nous reposer sur une ambiguïté », « Oui, nous avons besoin d’un ligne politique claire et d’un projet qui soit lisible mais aussi, d’un renouvellement » et surtout, de « passer aux actes ».

Les opposants à Ségolène Royal ont essayé de revêtir cette clarification des habits de la question des alliances, allant jusqu’à avancer que, ce sont les alliances qui donnent ou qui retirent de la crédibilité à une ligne politique. C’est vrai lorsqu’on est la force d’appoint. Ca l’est moins, lorsqu’on est le noyau central qui donne l’impulsion.

Il reste que si le vote des militants va illustrer un choix, celui-ci risque d’être en opposition avec la structure du parti, le Conseil National. L’introduction en 1995 par Lionel Jospin du vote des militants sur la personne du Premier secrétaire avait pour objectif de faire ratifier le choix du Premier secrétaire qui résulte du Congrès. Pas de trancher ce que le Congrès n’a pas permis de trancher. Or, dans le cas présent, on pourrait bien se trouver dans le cas de figure d’une Ségolène Royal élue par les militants comme Premier Secrétaire et un Conseil National (où elle ne pèse que 30%) hostile.

Consciente de ce risque Ségolène Royal a dévoilé avec « bravitude » devant les délégués son arme de dissuasion à savoir la possibilité de consulter directement les militants sur des orientations stratégiques telles que celle des alliances. L’enjeu du vote de ce jeudi est aussi là, savoir si le pouvoir au sein du PS doit rester aux mains des apparatchiks ou s’il peut glisser du côté des militants.


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