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Baguettes, sexe, etc. : la société jetable

Publié le 01 octobre 2008 par Luming88

Vivons-nous dans une société où tout est jetable, des produits aux individus ? C’est la question que se pose cette internaute, qui se fait de sérieux soucis quant à la direction actuelle de la société chinoise. Des baguettes aux relations d’une nuit, elle explique son appréhension de voir une société devenir aussi “jetable” que les produits qu’elle fabrique.
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Tous les jours, des millions de baguettes jetables...
La première fois que j’ai entendu le terme “une seule fois” (utilisé pour tous les objets utilisables une seule fois, soit “jetable” en français, terme que j’utilise tout au long de ce texte), c’est à la fin des années 1980. A cette époque, je n’avais absolument pas réalisé à quel point ce terme allait devenir fréquent dans notre société, et encore moins que notre pays allaient entrer dans l’ère du jetable.

Puis un grand nombre de produits jetables sont entrés dans notre vie, les plus évidents étant les baguettes. Auparavant, il y avait toujours un pot en bambou contenant des baguettes duquel on prenait une paire. Par la suite, cela a été abandonné et des baguettes jetables ont été emballées dans du papier blanc. Lentement, nous n’avons plus utilisé de mouchoirs en tissu, qui sont devenus quasiment introuvables dans les magasins. Ce sont des mouchoirs en papier jetables que nous avons mis dans nos poches, même s’ils ne portent pas ce nom. Quant aux sacs en plastiques, ils méritent encore plus le nom de jetables. Quoique l’on achète, c’est toujours emballé dans un sac en plastique, et c’est vrai que c’est pratique.

(Les choses changent dans ce domaine, puisque les sacs en plastiques sont maintenant généralement vendus et non pas gratuitement fournis par supermarchés et autres magasins, alors que l’utilisation de sacs en tissu est encouragée.)

Bien sûr, il y a encore bien d’autres choses qui sont jetables, pas la peine de s’étendre. Pour résumer, le jetable a certains avantages pour nous, bien que cela soit un gaspillage de ressources. C’est quasiment devenu la tendance d’une époque.

Voilà quelqu'un qui a trouvé un moyen de les recylcler
Ce que je n’avais vraiment pas imaginé, c’est que cette notion de jetable a également pénétré notre vie sentimentale et notre vie sexuelle est également devenue “jetable”. Qui pouvait imaginer que les relations d’une nuit deviendraient une sorte de mode dans les milieux urbains ? Relations d’une nuit, je veux bien, mais personne n’aurait pu entrevoir que cela deviendrait un capital permettant de faire l’étalage de ses talents. Nombreux sont ceux qui après une aventure d’une nuit affichent leurs impressions et leurs expérience dans la Toile, décrivant aussi certains détails. C’est vraiment honteux ! A l’origine, c’est une affaire privée, mais on ose s’en vanter partout, ce qui, pour une vieille comme moi, ne peut pas être accepté à la légère. 

Tout partager sur Internet
Jusqu’ici, je peux encore suivre. Les relations d’une nuit sont un genre de vie, c’est comme manger et boire de l’alcool. (…) Si certains aiment ce genre de relations, c’est compréhensible, après tout, nous vivons dans une société pluraliste.

Mais il y a quelque chose que je ne peux plus tolérer : quand est-ce que notre pensée est également devenue jetable ? Les livres que nous lisons sont également jetables, il est impossible de le nier. Bien qu’Internet se développe à une incroyable vitesse, les livres restent encore l’outil principal de propagation de la pensée. Mais les livres d’aujourd’hui ne recèlent guère de pensées, ils sont vraiment jetables. On les lit une fois et on ne les retouchera plus jamais. 

Je te jette, tu me jettes, il nous jette...
Les produits jetables évoqués ci-dessus ne font que gaspiller nos ressources et génèrent des détritus matériels dans notre existence. Mais les livres jetables génèrent une pollution spirituelle.

Nous savons qu’il est relativement aisé de traiter les détritus matériels. Mais lorsque notre esprit a été contaminé, c’est loin d’être aussi simple. Cette pollution va guider notre pensée et nous pouvons déjà voir aujourd’hui le danger pour notre pensée : nous n’avons plus de scrupules, nous ne pensons plus à long terme, nous n’avons besoin que d’une victoire et d’une satisfaction “d’une seule fois”. Nous ne voyons pas plus loin que les intérêts au bout de notre nez. Ne parlons pas de dizaines d’années, d’une douzaine d’années, d’un an ou même d’un mois, nous ne songeons même pas à demain. Nous ne voulons que la saveur, la joie et l’excitation du jour.

A quand la consommation finale ?
Lorsque l’eau courante de Wuxi (référence à un cas de pollution dans la ville de Wuxi, située dans la province du Jiangsu) est devenue malodorante, cela a été pour nous une sonnette d’alarme. Si nous ne nous débarassons pas de cette pensée jetable, c’est notre foyer qui va devenir jetable. Le lac Taihu, le Changjiang (= Yangtsé), le Fleuve Jaune… Ils vont tous devenir jetables. N’allons-nous pas devenir jetables nous aussi ?

Si l’humanité devient un produit jetable de Dieu, alors quelle est la différence entre nous et ces produits jetables que nous fabriquons ? La différence, c’est que ces produits sont jetés par l’humanité, alors que nous le sommes par Dieu. Alors même que nous fabriquons ces produits, nous sommes en train de devenir comme eux.

Tragique !

(FIN)

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Petite notre sur le paragraphe final :
je ne sais pas si vous aurez la même réaction que moi, mais ce paragraphe m’a quelque peu surpris, car je ne vois pas bien le rapport entre le problème soulevé et Dieu. Mais les références à Dieu et à la religion sont relativement fréquentes dans la société contemporaine en Chine. Un indice montrant que le nombre de personnes cherchant une voie autre que le pur développement matériel augmente de jour en jour. Et qu’importe la bizarreté de la référence, elle me paraît intéressante, raison pour laquelle je l’ai également traduite - alors que j’ai uniquement résumé les deux premiers paragraphes du texte original. 


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