Magazine Humeur

Le volontarisme industriel de Nicolas Sarkozy à l’épreuve des faits… têtus !

Publié le 24 novembre 2008 par Kamizole

nicolas-sarkozy-daher-20-nov-2008.1227517050.jpgJe ne saurais contre-dire Nicolas Sarkozy quand il affirme “Je ne ferai pas de la France une simple réserve pour touristes” dans la mesure où je soutiens depuis fort longtemps qu’une économie sans industrie est moribonde (il suffit de voir le déficit de la balance commerciale se creuser depuis 4 ans pour atteindre des gouffres proprement abyssaux) et à la merci de tous les retournements de conjoncture, sans oublier que les emplois qualifiés – productifs - de «l’économie réelle» sont à l’évidence dans le secteur industriel…

Que Nicolas Sarkozy table également sur le dévelop-pement des infrastructures n’est pas plus critiquable : elle est exigée par la véritable «modernisation» de l’économie, et non pas l’inepte traduction ultra-libérale laquelle consiste, chez les imbéciles qui nous gouvernent, uniquement à mettre le droit social et les emplois à l’encan…

Investir dans le développement durable, la recherche, les universités, la formation, etc… Il faudrait d’ailleurs de toute évidence tirer parti de la disparition programmée du pétrole pour – enfin ! – construire les voies de chemin de fer permettant le ferroutage… Jean-Louis Borloo aurait à cet égard une idée vraiment écolo, bien plus susceptible de faire avancer la défense de l’environnement que ses «bonus-malus» qui ne sont guère plus qu’un moyen supplémentaire de plumer les plus démunis !

Tout en subventionnant la consommation des mieux nantis… illustration supplémentaire de l’aphorisme de Montaigne : “Le profit de l’un est dommage de l’autre”.

D’ailleurs, je noterais d’emblée que Nicolas Sarkozy ne peut s’empêcher de créer une énième «niche fiscale» à leur intention : un crédit d’impôt de 30 000 euros pour les particuliers qui feront des travaux d’isolation chez eux… Je me suis livrée à un rapide calcul sur les tranches de l’impôt sur le revenu de 2008… chassez le naturel, il revient au galop : il faut effectivement avoir un revenu annuel supérieur à 67 505 euros (dernière tranche à 40 %) pour atteindre et/ou dépasser 30 000 euros ! Les pauvres et les classes moyennes pourront se fouiller… comme d’hab ?

Je pointe une autre contradiction : «l’accélération des programmes d’investissement des municipalités récemment élues, l’exemption de taxe professionnelle pour les nouveaux investissements des entreprises en 2009». En effet, déjà les capacités financières des collectivités territoriales qui sont largement tributaires des compensations théoriquement dues par l’Etat des charges générales assumées au titre de la décentra-lisation mais rarement réglées intégralement (pas plus que ne le sont pour la Sécurité sociale les exonérations de charges sociales). En supprimant dès 2009 la taxe professionnelle – une des ressources non négligeables des entreprises – pour les investissements nouveaux, on obère gravement le budget des communes…

Déjà endettées à la limite du raisonnable et souvent proprement «pigeonnées» par les organismes financiers peu scrupuleux qui ont utilisé grosso modo le même système pervers que celui des «subprimes» : un crédit indolore au départ mais dont les taux grimpent très vite ensuite (avec de surcroît des contrats de très longue durée).comment feront les communes pour investir dans des infrastructures, le développement durable, etc ?

Nicolas Sarkozy réinvente la «quadrature du cercle» - vicieux : comment ne pas souligner qu’il pense spécialement aux «municipalités récemment élues.» Lesquelles sont pour une large majorité… de gauche ! Coup de pied de l’âne ?

Nicolas Sarkozy ne perd pas une nouvelle occasion de moquer les experts : «on est passé en quelques mois de la peur de l’inflation au spectre de la déflation.». Il resterait à démontrer que l’ensemble des prix diminuent pour que l’on puisse parler vraiment de déflation. Or, s’agissant de ce qui préoccupe particulièrement les Français : les produits courants et notamment alimentaires, ce n’est guère le cas jusqu’à présent (mais Nicolas Sarkozy ne fait pas ses courses comme le vulgum pecus).

Aidant les banquiers et les industriels (les «nouveaux pauvres» !) Nicolas Sarkozy n’en continue pas moins de taper à bras raccourci sur le pervers «assistanat»

“La meilleure politique sociale, c’est celle qui permet de continuer à investir dans l’industrie. On met de l’argent au service du développement plutôt que dans des politiques dites sociales qui ne font que retarder le drame”

Tout cela au moment même où Bercy admet que l’économie française devrait perdre 90 000 emplois en 2009. Le soutien à l’investissement industriel et le développement des infrastructures est fort souhaitable mais ne peut donner de résultats tangilbes en matière d’emplois qu’à moyen et long termes et à condition que ce soit vraiment l’objectif !

Sans doute Nicolas Sarkozy préfère-t-il que les Français anéantis par la crise économique et sociale soient frappés par le “drame” le plus tôt possible : ils n’en seront que plus aisément taillables et corvéables à merci !

«L’assistanat» tant fustigé par Nicolas Sarkozy est donc une nécessité : que doivent faire et subir les Français en attendant une hypothétique «reprise» ? Continuer à se serrer davantage la ceinture au-delà des limites du raisonnable, accepter n’importe quel job sous peine d’être radié de l’ANPE ? Survivre avec des revenus considérablement amputés par l’inflation depuis le passage à l’euro ?

Je conçois qu’une politique de «relance» de la consommation ne soit pas la bonne solution dans la mesure où elle profiterait d’avantage aux importations de produits à bas coût (par exemple chinois) comme ce fut le cas en 1981-83 avec ce que l’on a nommé à l’époque «la contrainte extérieure», les mêmes causes produisant les mêmes effets.

Il n’en reste pas moins vrai qu’il n’y aurait d’autre solution sur les plans économiques et sociaux que de réactiver ce que pour ma part je nommerais plutôt «filet de protection sociale» ou Etat-providence (chargé de tous les péchés du monde par les partisans du néolibéralisme !) dont l’insigne avantage est de permettre de palier les coups du sort qu’ils soient personnels (maladies ou handicaps) et collectifs : chômage de masse. En même temps que les revenus de substitution ne peuvent qu’avoir un effet positif sur l’économie qui semble bien partie pour être en totale déconfiture.

Il faut donc cesser de traiter les chômeurs comme des délinquants en puissance : ils razzieraient les finances publiques ! Et si l’ambition réelle de Nicolas Sarkozy était réellement de recréer des emplois industriels, il serait peut-être mieux venu, dans le même temps qu’il envisage d’arroser copieusement ses amis industriels (sans oublier les banquiers) de donner des subsides en conséquence à la formation professionnelle continue pour que les personnes privées d’emploi bénéficient de vrais stages (et pas la foultitude de stages bidons - parking -tels qu’on les a connus dans les années 1975-1985…)

L’hyperentrepreneur
LE MONDE | 22.11.08 ©
Le Monde.fr
Nicolas Sarkozy veut une France industrielle et pas une “réserve pour touristes”
LE MONDE | 21.11.08 ©
Le Monde.fr

Certes, le fond souverain, piloté par la Caisse des Dépôts et Consignations a pour objectif le financement des entreprises innovantes (on espère qu’il s’agira priori-tairement des PME, et pourquoi pas ? des PMI) mais, ce que l’article d’Arnaud Leparmentier ne dit pas et qui est développé en introduction de l’Edito : l’objectif (principal ?) consiste bien à protéger les grands groupes français des offres publiques d’achat (OPA) hostiles…

En un mot tout est dit : la manne publique ira aux multinationales françaises, le haut du panier du COUAC/40, les mêmes entreprises qui par leurs délocalisations successives ont contribué à désindus-trialiser la France… Cherchez l’erreur.

Comment voudriez-vous que Nicolas Sarkozy oublie ses petits amis ? Limites de la posture – UM/Posture - du volontarisme industriel… L’Etat risque donc de mettre à fonds perdus (par pour tout le monde) des sommes gigantesques dans des entreprises qui font de substantiels bénéfices et se fichent comme de l’An 40 du sort des salariés français qu’ils ont contribué à mettre sur la paille et continueront à licencier si tel est le bon plaisir des actionnaires toujours plus avides.

Il serait logique que l’Etat entre dans le capital des entreprises aidées à proportion des subventions consenties, pour disposer d’une minorité de blocage et donc peser sur les décisions les plus importantes. Cela n’a rien à voir avec une quelconque nationalisation, laquelle n’offre d’intérêt pour la collectivité que s’agissant des services publics.

Je doute que ce soit le cas. Les précédents ne manquent pas, d’entreprises aidées à s’installer dans telle ou telle région et qui ont plié bagage dès que les conditions n’étaient plus aussi intéressantes sans qu’on leur demandât aucun remboursement des généreux avantages consentis.

Et tout dernièrement, j’ai été outrée que la recapitalisation des banques ne s’accompagnât pas d’un droit de vote de l’Etat actionnaire. Ce serait pourtant la moindre des choses quand on y place l’argent public : celui de tous les contribuables et détenteurs de livrets d’épargne (le capital de la Caisse des Dépôts et Consignation).

Je ne sais qui est l’auteur de l’Edito du Monde mais qu’en revanche, il s’agisse d’un adepte de l’ultralibéralisme et de la «mondialisation heureuse» ne me semble point faire de doute à la lecture : l’Etat devrait se garder d’intervenir dans le secteur industriel et notamment s’agissant des grands groupes…

La démonstration tient en deux axiomes :

«La présence de l’Etat ou sa menace d’intervention risquent de ralentir les regroupements industriels (…)Au XXIe siècle, le terrain de jeu est mondial, au minimum européen. La porte du néoprotectionnisme serait ouverte»

«La seconde inquiétude porte sur le développement des entreprises. (…) il faut se méfier de l’Etat entrepreneur, incarné un temps par le succès d’Airbus. Les difficultés actuelles de l’avionneur montrent que l’Etat n’est pas forcément à même de dénicher les pépites de demain.»

Parlons précisément d’Airbus : l’entreprise naguère française (et dans le giron public) n’en serait pas là si elle n’avait été bradée – par Jospin et DSK ! – à Lagardère pour être apportée comme sur un plateau à la nébuleuse EADS dont on sait comment elle a procédé ensuite pour couler définitivement la production française : les futurs Airbus seront bientôt construits en Asie et au Maghreb, faibles salaires et charges sociales aidant….

Il est probable que l’éditorialiste souhaite un bel avenir aux délocalisations !

Il faut parfois avoir le courage d’être protectionniste quand les intérêts de la France et de la population l’exigent. Les américains l’ont compris depuis longtemps.


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