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Présomption de culpabilité

Publié le 04 décembre 2008 par Roman Bernard
Étrange convergence des Ultras, hier. Trois blogueurs de ma connaissance, un ultra-libéral, un ultramontain et un ancien militant d'ultra-gauche (de son propre aveu), ont communié dans l'indignation pour dénoncer une descente de gendarmes dans un collège de Marciac (Gers), survenue le 19 novembre dernier, dans le cadre d'une opération de prévention contre les stupéfiants qui s'est muée en contrôle.
L'objet de la clameur de cette coalition bleue-blanche-rouge aussi soudaine qu'éphémère (comme toute concorde nationale en France) : le témoignage d'un enseignant, diffusé sous forme audio sur YouTube, mais avec une photo dont on ne sait pas si elle liée à l'événement en question ou non. Cette photo pose le problème de l'inexistence de plates-formes majeures de partage de fichiers audio comme il peut en exister pour les vidéos avec YouTube ou DailyMotion. Cette photo, avant même d'écouter l'enregistrement, doit aussi rendre l'internaute méfiant sur le crédit à apporter au récit d'un témoin qui utilise un document sans en donner la source, et dont le témoignage n'a d'autre valeur que celle de sa propre parole. Aucun son, aucune image de l'événement ne sont produits. Cela devrait inciter à la plus élémentaire prudence.

Encore l'amalgame avec les « rafles »
Ajoutons que, dans ce témoignage, l'enseignant compare allusivement et implicitement l'événement dont il a été témoin - et, dans son esprit probablement, « victime » -, aux rafles d'enfants juifs dans les écoles françaises, sous le régime de Vichy !
Le même amalgame est d'ailleurs fait lorsque des immigrés clandestins sont, en vertu de la loi républicaine, reconduits dans leurs pays d'origine. Une telle malhonnêteté intellectuelle devrait à tout le moins rendre ce témoignage hautement douteux.
Hormis un autre blogueur ultra-libéral de mes amis, qui, à la différence du premier, est lucide et vigilant sur des sujets sensibles, souvent contre sa propre famille de pensée, il n'est venu à aucun des trois blogueurs précités et de leurs zélés commentateurs d'accorder la présomption d'innocence aux gendarmes. Aucun scrupule sur la véracité des dires de cet enseignant donc, alors que celui-ci ne dispose d'aucun élément probant pour étayer son accusation. Le premier blogueur parle d'« incompréhensible dérapage » devant lequel il reste « sans voix » (avec tout de même assez de voix pour dénoncer l'« asservissement » auquel nous contraindrait la police...), le deuxième fustige des « forces de l'ordre [qui] se croient tout permis » (sic). Quant au troisième, quoiqu'il s'en défende, il laisse à penser que la police - et, par extension, la gendarmerie - n'a simplement pas à pénétrer le Temple scolaire.
Étonnant mépris de la présomption d'innocence, de la part, respectivement, de champions des libertés individuelles (parmi lesquelles celles de n'être considéré coupable qu'après un procès équitable), du Pardon (avant lequel il faudrait déjà avoir établi le péché par action des gendarmes), et encore des libertés individuelles pour le troisième, sauf en matière économique, mais on n'en est pas à une incohérence près.
Je me demande d'ailleurs, concernant ce dernier, quelle aurait été sa réaction si la polémique avait porté plutôt sur le témoignage audio d'un policier ou d'un gendarme racontant un guet-apens dans lequel il aurait été assailli avec sa patrouille.
Aurait-il eu la même prudence que moi et décidé d'attendre les conclusions de l'enquête, ou aurait-il, comme j'avoue le craindre, tenté d'expliquer ce guet-apens par les « violences policières », les « bavures », les « contrôles au faciès » ?
Roman Bernard
Criticus est membre du Réseau LHC.

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