" Le libéral est mécontent de tout régime; l'anarque en traverse la série, si possible sans jamais se cogner, comme il ferait d'une colonnade. C'est la bonne recette pour qui s'intéresse à l'essence du monde plutôt qu'à ses apparences - le philosophe, l'artiste, le croyant. E Jünger, Eumeswill."
Pas facile la posture de l’anarque. Au passage, la métaphore de l’homme libre traversant la colonnade est lumineuse…
Mon dernier post au sujet de certains matins de merde en est le reflet. Je ne suis pas progressiste, pas décliniste non plus donc, c’est important de le préciser. Ca n’était pas mieux avant, et demain ne sera pas radieux, pas forcément tout au moins…
Et il n’y a pas un matin où je ne sois pas saisi –le mot est faible, plutôt pétrifié, meurtri, écoeuré- par le Spectacle de ce monde moderne haïssable par bien des aspects.
C’est dire à quel point il me reste du chemin pour atteindre ce détachement, cette vision supérieure du monde, cette weltanschauung du philosophe de l’artiste ou du croyant, au delà des apparences. Toucher à l’essence, tourner le dos à l’homo laborans et à l’homo faber, à l'hubris démocratique…
" L'anarque [...] a le temps d'attendre. Il a son èthos propre, mais pas de morale. Il reconnaît le droit et non la loi; méprise les règlements. Dès que l'èthos descend au niveau des règlements et des commandements, c'est qu'il est déjà corrompu."
Comment vivre au milieu des autres, et au milieu de ruines pour qui regarde la longue durée, en n’étant pas affecté par la veulerie et la médiocrité de ce monde ?
Comment ne pas se sentir concerné? Comment passer au travers de la colonnade ? Faut-il s’en battre les couilles ? Faut-il être nostalgique ?
L’anarque est pleinement conscient du monde qui l’entoure et réagit au besoin favorablement ou pas. Il n’est pas indifférent à son milieu, il est d’une autre nature, d’une autre essence. Intouchable, à la fois proche et lointain, parce qu’il en a décidé ainsi…
L’anarque a son èthos (état d'âme) propre, indifférent à la loi commune. Comme Antigone affrontant Créon pour donner une sépulture à son frère, arguant de l’existence de lois supérieures à celles des hommes. Et finir emmurée. Je mesure ma corruption…
« La vie est trop courte et trop belle pour qu'on la sacrifie à des idées, bien qu'on puisse toujours éviter d'en être contaminé.»
Sûrement.