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Révélation

Publié le 05 décembre 2008 par Malesherbes
J’ai été suffoqué en entendant jeudi matin 4 décembre sur France-Info que des salariés de PSA « allaient cesser le travail ». Comment un journaliste peut-il employer pour des salariés mis en chômage partiel le vocabulaire qui désigne d’ordinaire des grévistes ?
Autre sujet d’irritation. Plusieurs organes de presse, avant l’intervention du Président de la République, titraient : « Nicolas Sarkozy dévoile ce jeudi son plan de relance ». Maladresse ou flagornerie congénitale ? Si ce n’est pas accidentel, je retrouve dans cette formule le besoin constant de célébrer et magnifier les décisions du génie immortel qui nous gouverne. En fait, on ne peut dévoiler que ce qui était précédemment caché. Etant donné que ce plan nous concerne tous, qu’on ne voit guère en quoi il aurait été menacé par des indiscrétions, que, de surcroît, il a dû être élaboré plutôt rapidement, on ne comprend pas pourquoi il aurait dû et pu être tenu secret. Il ne rime donc à rien de parler ici de dévoilement.
Dans la même tonalité, mais insistant davantage encore sur l’aspect de confidence indiscrète, ces maîtres de la plume auraient pu recourir au verbe divulguer, lequel a vu son sens initial de « porter à la connaissance du public » dériver vers celui de « trahir un secret ». Mais certains d’entre eux ont choisi d’aller encore plus loin, ou plutôt plus haut, en parlant de révélation. Ce dernier terme, qui, à partir du grec, nous a fourni « apocalypse », est porteur d’un sens beaucoup plus élevé. Selon le Grand Robert, il signifie aussi « Faire connaître, par une voie surnaturelle (ce qui était ignoré des hommes et inconnaissable par la raison) ». Selon les Ecritures, lorsque l’ange Gabriel s’adresse à la Vierge Marie pour lui apprendre qu’elle est enceinte du fils du Très Haut, on ne parle pas alors d’une révélation mais simplement d’une annonce. Par contre, parlant de la loi divine, celle-ci est révélée à Moïse sur le Mont Sinaï. Pour nos journalistes, utiliser à propos de Nicolas Sarkozy le verbe annoncer, dont pourtant un ange s’est satisfait, est notoirement insuffisant. Ce n’est pas rendre à sa grandeur les honneurs qui lui sont dus. Seuls conviennent les mots évoquant le Créateur.
Pourtant, ce mot d’annonce est si bien accordé à notre Président, lui qui passe l’essentiel de son temps à se propulser en tous lieux, à grand renfort d’escorte et d’avion, pour y exposer complaisamment, gesticulations et sourire niais à l’appui, les fruits de sa merveilleuse sagacité, sans se préoccuper ni des coûts, ni des dégagements de CO2. Des révélations ? Non, du bavardage.

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