divulgué le 5 août 2007 par Kinopoivre
Le film idéal pour un chroniqueur du site que tes yeux éblouis, lecteur aimé, parcourent en ce moment même. En effet, surtout s'il est tire-au-flanc (le chroniqueur, pas le film), il aura la fin de l'histoire et la conclusion du présent article dès les trois premières minutes de la pellicule.
L'héroïne - le personnage central, si vous préférez qu'on évite toute équivoque - se nomme Zineb Agha, mais elle se fait appeler " madame Aldjéria ". À ce détail, lecteurs adorés, les plus futés d'entre vous, à supposer que certains ne le soient pas (futés, mais repoussons d'un pied méprisant cette hypothèse farfelue), devinent que l'action se passe à Alger. De son appartement du dix-septième étage avec terrasse qui domine le port, où malheureusement l'ascenseur est aussi souvent en panne que l'ascenseur social, elle fait des " affaires ", secondée par un jeune avocat véreux et homosexuel, maître Djaffar ; une collaboratrice, Shéhérazade, qu'elle a tirée de la prostitution ; sa sœur sourde-muette, qui lui sert de nounou ; et son fils Riyad, conçu avec un Italien de passage, et qui semble vouloir incarner l'idéal de Jacques Brel en ceci, qu'il est " beau et con à la fois ".
Mais quelles affaires ? vous enquerrez-vous, lecteurs idolâtrés. Surtout des magouilles, sinon il n'y aurait pas de film. Qui a déjà vu un film traitant d'affaires honnêtes ? Poser la question, c'est y répondre. Exemple : une quinquagénaire, propriétaire d'un cinéma, veut divorcer afin de refaire sa vie avec son jeune caissier, projet qu'on ne peut qu'applaudir à deux mains, si vous le voulez bien ; madame Aldjéria va lui arranger ça en fourrant une jolie fille, la Paloma du titre, dans les bras du mari, et, le moment venu, immortaliser l'instant avec l'aide d'un photographe qui se trouve être son avocat ! Rien que du classique.
Naturellement, elle excelle à l'arrosage des personnes bien placées, style ancien ministre des Droits de l'Homme et de la Solidarité nationale. Et toujours en liquide, prélevé dans son coffre-fort bourré à craquer. Dialogue : " Madame Aldjéria, en tant qu'ancien ministre des Droits de l'Homme et de la Solidarité nationale, je ne peux qu'être sensible aux projets d'une vieille putain comme vous. - Pas "vieille", seulement putain ! "
Le cinéma étant un puissant instrument d'éducation et le vecteur idéal des leçons de moralité, on se doute que madame Algéria va tomber, au sens policier du terme. On s'en doute d'autant plus que, tout le film étant raconté en flashback, on l'a vue sortir de prison dans la première scène, après trois ans de cabane. Que s'était-il passé ? La magouille de trop : madame Algéria a voulu racheter, retaper et rebaptiser à son nom les Thermes de Caracalla où elle a passé son enfance, pour en faire un endroit à la mode. Les Bains-Douches ont dû l'inspirer. Illico, et vu qu'en Algérie la corruption est totalement inconnue, on la flanque au trou pour avoir graissé les pattes qui se tendaient. Lorsqu'elle en sort, sa complice Shéhérazade est devenue mère de jumeaux et femme voilée, son appartement est en ruines, et sa fortune s'est évidemment envolée. Il ne lui reste plus qu'à imaginer que son fils, qui s'est enfui en barque au moment crucial, a réussi à gagner l'Italie et qu'il y est heureux.
C'est aussi la grâce que l'on vous souhaite, mais la barque n'est pas obligatoire, sauf à vouloir à toute force faire un détour par Allocine, où ils sortent les rames plus souvent qu'à leur tour.
Choisis ton arme et flingue la fin du film