Premier essai critique et qui s’assume comme telle après les blâmes que j’ai formulés à l’encontre de ceux qui martyrisent les ouvrages ; Tentons de ne pas se laisser happer par tous les défauts qui entourent cette charge, surtout celui désigné « damnation » qui nous attend les bras ouverts d’autant plus que je n’ai pas été appâtée par mon livre et que la même impression m’a accompagnée tout au long de sa lecture. Il s’agit de La Mer détraquée, premier libre et nouvelle de Maurizzio Braucci, un écrivain napolitain né en 1966.
La Mer détraquée est un livre qui suinte la fatalité : L’auteur raconte les dernières heures de deux personnages, dont l’un vit pour la mafia et l’autre pour la drogue.
D’abord le titre, « la Mer détraquée » renvoi à l’idée d’un dérèglement d’abord incontrôlable en raison de l’immensité de la Mer, puis grave car la Mer représente un espace de vie avec son écosystème. On imagine donc un dérèglement qui nécessiterait beaucoup d’efforts, un combat de titan contre un élément qui nous surpasse pour inverser sa tendance destructrice. L’auteur a certainement voulu avec ce titre représenter le combat que mène la société italienne contre la mafia et le trafic de drogue mais aussi peut être la futilité de ce combat, perdu d’avance. Car, il s’agit d’un combat contre la soif de pouvoir des hommes qui génère corruption, trahison et destruction. Un combat donc difficile pour lequel l’auteur n’a pas beaucoup d’espoir.
La forme du livre rappelle aussi la fatalité : L’histoire est courte comme pour nous signifier qu’une fin inéluctable ne trouve pas de rebond inattendu : La durée de l’action est d’une journée et demie. Les chapitres sont nommés sous forme de lois divines qui laisse de côté toute liberté ; A la lecture de ces lois, j’imaginais que ce serait celles qui me seraient dites le jour du jugement dernier pour décider de mon sort : Elles n’inspirent ni désinvolture, ni douceur car la sentence semble n’être que la mort. On comprend que les personnages dans ce livre n’ont plus de liberté, leur sort est décidé, ils ne sont plus que des animaux jouant le rôle qu’il leur a été donné. D’ailleurs, lorsqu’on lit la première phrase du livre, on comprend que l’histoire va suivre un enchaînement presque déterministe.
« C’est la même histoire, que cette planète soit une boule de métal
suspendue face au soleil, qui se chauffe à blanc peu à peu pour devenir soleil
elle aussi en un battement de cil, en un instant seulement, et que nous nous
évaporions tous puis nous condensions jusqu’à ne plus avoir d’endroit où
retourner et nous dispersions alors dans l’univers comme un voile de brume parmi
les nébuleuses. »
Maurizzio Braucci « La Mer détraquée » Paris Métailié, 2002 p11
Livre court, mais phrases longues comme vous pouvez lire, rythmée et remplies d’images pour parler des dernières heures de deux personnages évoluant autour de personnes terrifiées et mortifiées par la violence du quotidien. Souvent, l’auteur quitte la réalité, comme dans ce passage ci-dessus comme pour nous signifier que la description de la réalité n'anime rien de beau. Les richesses artistiques, culturel et gastronomique ne sont jamais pointées dans ce livre, comme si le trafic de drogue de la mafia ruinait l’existence même de Naples pour ne devenir qu’une scène mortuaire. Difficile d’imaginer qu’un auteur qui parle de sa ville puissse à ce point dénudé Naples de ses grâces.
Ce livre sent le scepticisme comme si l’existence de la mafia plaquait une logique implacable sur le sort des personnes ; Comme si la drogue réduisait l’homme et annulait sa liberté. La fuite de Sergio, dans une cabane prés de la mer laissait penser qu’une lueur d’espoir existait, mais il ne s’agit que d’une falsification : Il doit mourir et il mourra sans explosion, sans bruit et sans surprises.
Ce livre a donc beaucoup de force car il semble être réglait par une même mécanique terrible faite de trois courroies : le pouvoir, la mafia et la drogue. On a même pas envie que cela se termine bien, un happy end ne se laisse entrevoir à aucun moment.
J’ai acheté ce livre à Fontenoy la Joute (le "merveilleux" village du livre), chez le vendeur préféré de mon dulce. J’ai été attirée d'abord par le titre puis par cet écrivain italien
engagé dans le développement de son quartier. J’ai aimé sur le quatrième de couverture les détails concernant le lieu de l’histoire, le « Quatiere Santo » à Naples, la référence au plus beau golf du monde car j’aime beaucoup qu’une histoire prenne pieds dans un endroit connu intimement de l’auteur ; Elles ont une saveur si personnelle…
J’ai dit que je n’ai pas été séduite par le livre et c’est vrai : Je préfère des personnages plus denses et les hasards plus inopinés. C’est pourquoi j’ai commencé « Le baron perché » de Italo Calvino. Encore un Italien.