Des phrases qui n’en finissent pas, une sensation de monologue nostalgique sur une période révolue (la Guerre froide), une relative fascination béate des services russes qui tranche avec l’amateurisme et la description cruelle qu’il fait des services occidentaux, une amertume à peine voilée sur le Général De Gaulle qui n’a pas compris l’importance d’un service de renseignement moderne proposé par Melnik, etc.
A lire les premières pages du livre de Constantin Melnik, la déception pointe. Malgré tout, une idée force est à retenir : la nécessité d’avoir, pour tout pays, un service de renseignement moderne, c’est-à-dire dirigé et composé des meilleurs éléments de la société civile (et non militaire) et orientée vers la connaissance objective du monde. Pour Melnik, l’espionnage reste un « métier » de seigneur où n’ont rien à faire les barbouzes. En effet, analyste de l’Union soviétique et du communisme international pour le compte du Vatican puis de la RAND, Constantin Melnik s’est vu confier par De Gaulle la coordination de l’ensemble des services de police et de renseignement durant la phase terminale de la guerre d’Algérie et du maintien de la paix civile malgré les terrorismes FLN et OAS. De ce fait, il a été marqué par les actions violentes menées par les différents protagonistes pour des résultats désastreux et peu efficaces. D’un autre côté, il a été convaincu par les méthodes des services russes qui ont réussi la pénétration des services occidentaux (britanniques avec les 5 de Cambridge, le BND allemand, la CIA mais aussi les services français, l’espionnage atomique, etc.) avec « délicatesse » durant la Guerre froide. A croire que les Soviétiques et alliés n’ont utilisé que des méthodes de gentlemen et que seuls les services occidentaux étaient emportés et imprécis.
On notera aussi le descriptif des services français (relégué en annexe, c’est dire le mépris qu’il leur porte) selon l’auteur, jamais à la hauteur des évènements qui ont cours à travers le monde, ainsi que la définition qu’il fait de l’intelligence économique : « tarte à la crème de certains milieux français à prétention intellectuelle gravitant autour du monde du renseignement et celui des affaires » (p. 371).
Malgré des passages et descriptions de personnages ou actions de haut vol, le livre de Constantin Melnik laisse sur sa fin, empêtré dans l’amertume qu’il a envers la République, qui ne lui a pas permis de créer un vrai service de renseignement, et la nostalgie d’une époque révolue, mais pas du tout sereine, comme il le laisse à penser. Certaines pages laissent le lecteur dans l’incompréhension et l’expectative quand quelques feuilles sont, malgré tout, assez brillantes dans la description de ce que doit être un service de renseignement efficace.
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