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Rachida Dati et les histoires de famille des Hauts de Seine

Publié le 15 décembre 2008 par Hmoreigne

 C’était un faux scoop mais, il aura eu l’effet escompté. Le Point s’est fait une bonne publicité vendredi en attribuant à la Garde des Sceaux, dans un portrait au vitriol, de peulouables intentions« Rachida Dati, qui connaît les histoires de famille et du département des Hauts-de-Seine (…), saura, le cas échéant, se rappeler aux bons soins de son protecteur ». Suffisamment flou pour jeter le trouble mais, insuffisamment précis pour un hebdomadaire qui se veut respectable.

Le département des Hauts de Seine est, par nature, hors normes. Créé en 1968, il entoure à moitié la ville de Paris, déjà tout un symbole. Bien qu’il soit le plus petit département de la couronne parisienne, il est également le plus peuplé mais surtout le plus riche. Très riche.  Son PIB par habitant est trois fois plus élevé que la moyenne nationale. Signe d’opulence, le département accueille plus de 6 000 sièges sociaux d’entreprises. Dans ce cadre financièrement idyllique, le conseil général avec plus de 1,7 milliard d’euros de budget et 5 500 agents est une institution stratégique. Un intérêt subitement renforcé par les lois de décentralisation qui vont transférer à l’institution, dès 1982, beaucoup de pouvoir.

Le département est plus que stable politiquement. Non seulement la droite le maîtrise totalement mais, seuls quatre hommes vont se succéder à la tête de l’exécutif depuis 1982 : Paul Graziani, Charles Pasqua, Nicolas Sarkozy et Patrick Devedjian. L’absence d’alternance et surtout la personnalité de Charles Pasqua, Président pendant seize ans, ont-elles favorisé les dérives ? C’est ce que différents éléments laissent penser.

Patrick Devedjian successeur de Nicolas Sarkozy fait d’étranges confessions dans le numéro de l’Express du 17 juillet 2008. “Je souhaite rendre au département des Hauts-de-Seine une bonne réputation; or celle-ci a été malmenée”. Dans la continuité de ce qu’avait engagé Nicolas Sarkozy, je suis amené à nettoyer les écuries d’Augias“. Et le député-président développe ses pensées “J’ai trouvé, en ouvrant les placards, des anomalies anciennes que je m’emploie à rectifier”, “Il y a trois procédures judiciaires pénales lourdes actuellement diligentées dans le département“. “Je faciliterai les investigations de la justice. Evidemment, cela ne plaît pas à tout le monde“. “J‘évalue aussi le fonctionnement des services et j’ai découvert beaucoup de bizarreries. Là encore, cela ne plaît pas à tout le monde, mais une très large majorité me soutient“.

Malmené au Conseil Général par ceux qui ont vu leur échapper l’exécutif, l’élu précise, toujours en juillet, dans un entretien au quotidien Le Monde: “toutes les attaques dont je suis l’objet résultent de ma lutte contre la corruption“. Fait important, la précision essentielle apportée par le député à savoir que la remise en ordre s’effectue “Dans la continuité de ce qu’avait engagé Nicolas Sarkozy”. Autrement dit, sont visés Charles Pasqua et ses amis. Invité de la Tribune BFM dimanche soir, Patrick Devedjian a rappelé que les procédures judiciaires en cours engagées par le département ont été lancées par son prédécesseur, Nicolas Sarkozy et que donc le nettoyage qu’il revendique ne vise pas le Président de la République.

C’est dans ce contexte que doivent être replacées les intentions prêtées à Rachida Dati par Le Point. Hurlant avec les loups, l’hebdomadaire a choisi de crucifier, une fois à terre, une ministre à laquelle il trouvait tant de qualités quelques mois plus tôt. Le quotidien use d’une méthode douteuse, l’insinuation, ne se fondant à aucun moment ni sur des éléments concrets, ni même des propos de l’intéressée.

Face à l’ampleur prise par le dossier Rachida Dati s’est trouvée contrainte à réagir de la façon la plus ferme à travers un courrier adressé directement au journaliste Denis Demonpion. “Je me permets de vous faire part de ma surprise, pour ne pas dire plus… Vous insinuez que je serais en mesure de faire un usage déloyal d’informations en lien avec mes fonctions de directrice générale adjointe des services au conseil général des Hauts-de-Seine. Ceci est totalement faux“, écrit  notamment la ministre de la Justice. Rachida Dati  souligne en outre n’avoir eu aucun contact avec le journaliste et affirme : Ma fonction (…), mon statut, mes convictions personnelles et ma loyauté sans faille à l’égard du chef de l’Etat sont à l’opposé de ce que vous insinuez“.

La réponse était rendue nécessaire par la tournure politique prise par l’affaire dès vendredi. Après un simple pas de commentaire de la chancellerie Arnaud Montebourg, était monté au créneau. “Soit Rachida Dati a connaissance d’irrégularités de nature à mettre en cause le président de la République (…) et elle s’empresse de faire ouvrir une enquête, soit elle doit démentir immédiatement. Il était suivi en fin d’après-midi, par 6 conseillers généraux socialistes des Hauts-de-Seine qui  demandaient que le président du conseil général, saisisse le procureur de la République de Nanterre afin d’ouvrir une enquête judiciaire concernant les informations dont disposerait Rachida Dati.

Jeudi 11 décembre pourtant, Denis Demonpion assurait à ses confrères du Nouvel Obs.com , qu’il ne retirait pas une ligneà ses écrits, assurant même que Rachida Dati n’a pas démenti et ne démentira pas. Dommage pour l’auteur de l’article et surtout dommage pour la presse en général décrédibilisée en l’espèce par des affirmations hasardeuses et surtout non étayées. Un écran de fumée qui occulte le fonds du dossier,  les écuries d’Augias.


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