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The Practice - 2.12 - Race with the Devil

Publié le 22 décembre 2008 par Heather

Non, vous ne rêvez pas, c'est bien une review d'un épisode de The Practice qui vous attend sur ce blog. On exhume quelques perles des archives aujourd'hui !
Pas de paradoxe temporel donc, même si cet épisode 2.12 de la série, intitulé Race with the devil, fut diffusé pour la première fois aux Etats-Unis le 13 décembre 1997 sur la Fox. Ce qui ne nous rajeunit vraiment pas. Je vous avoue que le simple fait d'écrire cette information -et de prendre conscience que cela fait plus d'une décennie, bon sang vous imaginez !- me donne soudain un énorme coup de vieux.

Comment The Practice est-elle arrivée jusqu'à la note du jour ?
Tout d'abord, c'est la conséquence d'une perte de patience à l'égard des éditieurs de DVD. En effet, j'ai investi dans le premier volume DVD de la série, dès sa sortie il y a déjà plus d'un an. Malheureusement, depuis, nous ne voyons plus rien venir. Aucune date programmée pour l'arrivée de la suite, que ce soit en Europe ou de l'autre côté de l'Atlantique. L'espoir s'amenuisant avec le temps, j'ai donc entrepris de me constituer, avec les moyens et les contraintes du bord, l'intégrale de la série -ou du moins, essayer de rassembler lce qu'il sera possible d'exhumer. Le projet ayant pris forme, j'ai retrouvé le cabinet Donnell & Associés comme je les avais laissés à la fin du visionnage des DVD. Une chose en entraînant une autre, je me suis replongée dedans au cours d'une soirée où il n'y avait rien d'autre de très enthousiasmant. Puis, une autre soirée arriva, et ainsi de suite... Il faut dire que, mis à part quelques antiques VHS perdues dans ma bibliothèque, je n'avais jamais eu l'occasion de me réplonger dans ce vieux coup de coeur, qui a son cierge sur l'autel des séries massacrée par M6, mais également, à un dégré moindre, par Canal Jimmy puisque la diffusion calamiteuse de la série fait que ce n'est que cet automne que Canal Jimmy a entamé la diffusion des dernières saisons.

Avant de retrouver la série, je me demandais si The Practice n'avait pas trop vieilli. C'est vrai que l'on ressent les années 90 dans les intrigues et thématiques abordées comme dans la réalisation, jusque dans les tenues des avocats ou l'allure vaillante de toutes ces têtes connues et autres guest-stars que l'on croise au détour d'un prêtoire, acteurs aux crânes aujourd'hui bien plus dégarnis. Et puis, des années d'études de droit plus tard, je n'avais plus le regard néophyte avec lequel j'avais découvert la série au début du lycée... Oser me replonger dans cette série ne risquait-il pas de me faire perdre la vision totalement idéalisée que j'en avais peu à peu construite -la difficulté pour parvenir à la suivre ayant accentué cette impression- ? C'est pourtant presque naturellement que j'ai retrouvé tout ce que j'adorais dans cette série, qui est ma favorite parmi tous les show de David E. Kelley.

Je n'avais pas du tout prévu de faire de review, mais ce milieu de seconde saison est d'un très haut niveau : de l'épisode des doutes d'Eugene sur leur mission d'avocat en passant par l'épisode spécial relatif à la peine de mort qui est particulièrement fort... C'est un peu l'âge d'or de The Practice qui défile sous nos yeux. Il est difficile de ne pas communiquer un peu de cet enthousiasme. L'épisode 2.12 est de format plus classique, mais son originalité tient au fait que nous nous ne suivrons pas de procès. Nous nous situons au stade précédent : il s'agit d'éviter les poursuites. L'épisode jongle avec trois storylines distinctes : deux plus légères et une centrale, qui donne le ton de l'ensemble.

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L'épisode s'ouvre sur plusieurs coups de téléphone qui vont sceller la journée éprouvante des membres du Cabinet Donnell & Associés. C'est tout d'abord un de ces justiciables impossibles, qui aurait besoin d'un abonnement avec la Justice, mais que personne de sensé ne souhaite avoir comme client, qui exige la présence d'un avocat immédiatement pour régler le dernier problème qu'il vient de créer. Puis, c'est surtout l'appel affolé du prêtre de Bobby qui va lancer l'épisode. Une de ses paroissiennes vient de décéder d'une crise cardiaque dans son église. Profondément lié au prêtre qui l'a aidé lors du décès de sa mère, des années auparavant, Bobby accourt donc pour découvrir une réalité plus trouble que ce que ce bref résumé ne laissait penser.

Puisque l'associé principal du cabinet est pris par une autre affaire, c'est Eugène qui hérite du client impossible, à la suite d'une défaite au jeu qui sert à répartir ces affaires dont personne ne veut, l'inusable "Pierre-Feuille-Ciseaux". Cette petite storyline sert à dénoncer les excès de la judiciarisation de la société américaine ; en plein examen médical, le patient s'est soudain fâché et exige désormais de dresser judicairement un constat de la situation dans laquelle il se trouve, pour un procès futur, alors qu'un instrument d'oscultation est toujours enfoncé dans le rectum (et pas seulement métaphoriquement parlant...). Comédie de l'absurde, caricature de ces poursuites judiciaires incessantes contre les praticiens, qui permet d'évoquer le problème déjà -et toujours- actuel des compagnies d'assurances de plus en plus frileuses et des primes à payer qui s'envolent. Il faut toute la diplomatie d'Eugène et tout l'attirail procédural de deux avocats et de deux médecins pour parvenir à résoudre une "crise" qui durera toute la journée. Les sériephiles apprécieront d'y croiser des têtes connues : Paul McCrane dans le rôle du patient/client ingérable (le Romano des Urgences, toujours aussi irrascible, quelque soit la série dans laquelle il apparaît), mais aussi John de Lancie (croisé en guest dans des tas de séries depuis, Al Kiefer d'A la Maison Blanche par exemple).

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L'autre intrigue judicaire va cependant être celle qui va véritablement rythmer tout l'épisode. Dès le coup de téléphone reçu, Bobby est parti immédiatement pour l'église. En arrivant, il découvre un prêtre particulièrement agité et angoissé qui lui raconte les circonstances très particulières de la mort de sa paroissienne. En effet, il était en train de réaliser un vértable exorcisme lorsque la crise cardiaque est survenue. Un exorcisme, qui plus est, non autorisé par l'évêché, mais que la victime le pressait de pratiquer, persuadée d'être possédée. Or, cette dernière avait également été diagnostiquée comme atteinte de schizophrénie. Le prêtre, espérant faire jouer un hypothétique effet placebo, en accédant à sa requête, décida de passer outre l'interdiction épiscopale et organisa donc l'exorcisme. Mais c'est durant la cérémonie que tout dérapa. Il n'eut pas les bons réflexes, confronté à une situation dont il ne mesura pas pleinement les conséquences à temps, et la femme fit une crise cardiaque qui lui fut fatale. Rien n'indique que les agissements du prêtre aient, de façon certaine, causé la crise cardiaque, cependant un lien au moins indirect paraît pouvoir être discuté par la police, voire devant un tribunal.
C'est alors que Bobby prend les choses en main, excellant dans un exercice pourtant quelque peu différent de son registre habituel. Nous ne sommes pas dans le cadre d'un procès. Au contraire. L'objectif est de mettre à profit les quelques heures dont ils disposent, avant que la question d'ouvrir une enquête soit soulevée par la police, pour orienter les premières constatations afin d'obtenir le classement immédiat du décès, comme simple crise cardiaque. En effet, une enquête révèlerait l'attitude pouvant prêter à confusion de l'homme d'Eglise et aurait toutes les chances de déboucher sur des poursuites pénales. Il importerait ensuite peu que Bobby obtienne la relaxe du prêtre dans un hypothétique procès, le scandale se serait déjà répandu dans la presse -la simple ouverture d'une enquête pourrait d'ailleurs avoir ce résultat si mention était faite de la pratique de l'exorcisme. Il serait alors trop tard pour cet homme auquel l'avocat tient tant ; et il perdrait au moins son église, sa réputation, s'il échappait à la condamnation. Bobby va donc exploiter sa connaissance précise des rouages du système judiciaire afin d'organiser une véritable "défense préventive" pour stopper net toute investigation plus poussée.

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Cette défense préventive va le conduire à user de toutes les techniques auxquelles un avocat peut recourir pour parvenir à ses fins. Manipulations, légers arrangements avec la vérité, menaces à peine voilées, et même extorsion d'informations d'un de ses clients "habituels", Bobby pose méthodiquement les jalons qui vont constituer la version officielle du drame. A l'évêché, il s'agit de s'assurer de l'appui de la hiérarchie ecclésastique et, dans un premier temps, de convaincre le supérieur du prêtre de se poser "spontanément" en témoin de moralité pour ce dernier lorsque les policiers solliciteront son avis. Les réticences face au potentiel scandale donne à chacun l'envie de se couvrir. Mais la corde sensible de l'évêque réside dans les perspectives de poursuites civiles qui pourraient coûter une petite fortune en dommages-intérêts à payer à la famille de la victime. Bobby joue habilement sur les risques de voir impliquée l'Eglise dans son ensemble et formule sans remords des menaces sous-jacentes. Le cabinet s'assure également de la version que le psychiatre de la victime donnera à la police, de façon à corroborer les renseignements que le prêtre livrera volontairement aux autorités : "Oui, la femme était schizophrène" ; "Oui, elle était persuadée d'être possédée", devra confirmer son médecin... Bobby va jusqu'à faire passer un test au détecteur de mensonge à son client afin d'anticiper la demande de la police et d'être certain qu'il n'y aura pas de mauvaise suprise. Mais, s'il s'arrange pour que l'inspecteur à qui le prêtre se confiera soit un de ses amis (James Pickens Jr., le "Chef" de Grey's Anatomy, avec 10 ans de moins, que je n'avais absolument pas reconnu aux premiers abords), Bobby doit cependant être en mesure d'offrir une contre-partie à ce demi-marché qu'il passe implicitement avec le policier : une faveur (oublier de creuser cette affaire qui n'est sans doute pas criminelle et d'où ne résulterait qu'une mauvaise publicité pour le prêtre) contre une faveur. Pour cela, il convoque un de ses clients avec pour mission de lui trouver des informations intéressant potentiellement les policiers.

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Ainsi, Bobby s'agite, s'investissant pleinement professionnellement et émotionnellement, dans ces quelques heures cruciales qui déterminent l'ouveture ou non de l'enquête suite au décès de la paroissienne. Cette croisade improvisée se terminera bien, puisque sa maîtrise des rouages de la Justice américaine -qui n'est plus à démontrer- lui permet de presser les bons boutons pour étouffer dans l'oeuf l'affaire, avant même qu'elle ne se déclenche. Cependant, l'épisode s'offre une conclusion étrangement chargée d'amertume qui donne une dimension supplémentaire à l'épisode et remet en perspective la journée éprouvante qui vient de se dérouler. Témoin des agissements de Bobby et de son flirt constant avec la ligne jaune de l'éthique tout au long de l'épisode, son prêtre, une fois tranquilisé sur sa situation, s'interroge soudain sur la vie que mène son ancien protégé ; même si c'est pour lui que ce dernier a fait tout cela. Il constate quel homme, celui qu'il avait voulu guider après le décès de sa mère, est devenu au contact des méandres du système judiciaire américain. Bobby modèle son comportement sur les limites posées par une loi qu'il interprète à son avantage. Il raisonne en avocat : peu importe la déloyauté des procédés utilisés, moralement répréhensibles, tant que l'on demeure dans la légalité. Or, pour le prêtre, toutes ces arguties juridiques, qui résument l'activité d'un avocat, ne sont que sophismes et ont changé Bobby. Il y a une forme de déception dans le jugement ainsi porté par le ministre du culte, un jugement dont la profonde injustice frappe le téléspectateur. Même Bobby ne semble pas véritablement comprendre les reproches qui lui sont adressés. Sans sa vitesse de réaction, il est probable que le prêtre aurait été inquiété par la police. Il a fait ce qu'il devait faire et cela lui apparaît parfaitement normal. Cette conclusion met en scène la confrontation de deux normes sociales qui divergent ici. L'un suit des normes religieuses, le second a appris à jongler avec les normes juridiques. Les premières normes condamnent moralement certains comportements qui ne sont pas réprimés par les dernières... Ce dualisme jusqu'alors sous-jacent s'exprime pleinement dans cette scène très forte, donnant une dimension supplémentaire à la storyline.

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Pour alléger un peu l'ambiance lourde que cette histoire fait peu à peu peser sur l'épisode, les scénaristes  introduisent une troisième intrigue en mettant à profit le talent de comique par maladresse de Jimmy pour nous changer les idées et s'offrir quelques sourires. Ce petit fil rouge ménage quelques pauses à la tension de l'épisode, tandis que Jimmy se débat pour parvenir à réciter à peu près correctement un texte de manière attractive et confiante devant une caméra. Il souhaite faire diffuser sa publicité à la télévision afin d'inciter de nouveaux clients à le contacter. Sans conséquence, cette storyline permet quelques passes d'armes avec Lindsey notamment, particulièrement perplexe sur le recours à ce procédé marketing, Jimmy continuant de s'intégrer maladroitement mais sûrement dans le cabinet. Et puis, c'est aussi l'occasion d'inviter Aida Turturro (plus connue pour incarner la soeur de Tony Soprano) en réalisatrice dont la patience s'amenuise au fil des ratés successifs de Jimmy.

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Bilan : Un très bon épisode qui rompt un peu avec le formula-show habituel de la série pour se placer dans la phase "avant procès". Le but n'est pas de faire acquitter le client, mais d'empêcher l'ouverture d'une enquête. Cet angle d'attaque, plutôt original, est le support d'une histoire qui implique émotionnellement Bobby et, par ricochet, le téléspectateur, jusqu'à cette conclusion qui laisse une certaine amertume, jugement du prêtre qui prend en traître, frappant où on ne s'y attendait pas. Le ton de l'ensemble est bien dosé, subtil équilibre entre l'intrigue principale, chargée d'intensité, et les deux autres histoires secondaires, au ton plus léger -même si, évidemment, on est dans The Pratice, une série qui a toujours cultivé une atmosphère sombre.

Pour vous remettre dans l'ambiance, souvenez-vous du générique (ce n'est pas celui de la saison 2, mais c'est le ton qui compte!) :

Et vous, vous connaissiez The Practice ?
Gardez-vous quelques souvenirs de cette série judiciaire (qui connut quelques ratés par la suite, certes, mais qui durant ses belles années était incontestablement une des grandes références du genre) ?

[Je reviewerai peut-être d'autres épisodes au fil du visionnage, je verrais suivant l'impulsion du moment. Mais il est vrai que cette série majeure dans la construction de ma sériephilie méritait bien une place sur ce blog.]


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