Wone ko wonnoo do ( Il était une fois…)
Aux enfants qui fêtent Noel, à toi Mame Penda Ba, la petite peule de Saint-Maur et à tous les autres enfants qui comme toi, fêteront plus Noël que les fêtes traditionnelles de leurs parents. Ce conte est bien réel même s'il commence par « Il était une fois … » Bon Noel à vous et à tous les autres.
En ces temps de Noël , on déverse des millions d’animaux en peluche aux enfants. Les enfants sont heureux de cette douceur synthétique à laquelle ils opposent leur vraie tendresse. Aujourd’hui, et ce n’est pas le fruit du hasard, j’aime à me souvenir de mon « contact » réel avec une jeune panthère.
Nous étions tous les deux jeunes. Moi j’avais 8 ou 9 ans, la panthère n’a pas décliné son identité, mais c’était une jeune aussi. Mon chemin avait croisé le sien au milieu de la brousse touffue, juste au moment où le soleil brûlant se situe au dessus des têtes. Nous, nous sommes regardés, peut-être reconnus, qui sait ! Il y avait de la tendresse dans ses yeux, aucune peur dans les miens. L’animal a continué son chemin, et moi, le mien.
Un moment furtif pendant lequel j’ai éprouvé la douceur chaleureuse. Celle là même, que ressent l’enfant au contact de son animal peluche. Une tendresse calme au milieu de la brousse endormie. La jeune panthère avait sans-doute profité du repos de sa mère pour s’échapper un moment. Comme j’avais profité de l’inattention des adultes avec qui j’étais pour traîner, rêvasser, cueillir des jujubes, sentir les baddi…
Les adultes (Niaka et Ramatel) étaient trop occupées à sermonner leur copine M. Aissé qui avait renversé leur calebasse de lait « itaaka wataka » prévu pour le casse croute de la journée. Elles en voulurent à ses longues jambes « aveugles » qui n’avaient pas su éviter un nœud de lianes qui entraîna sa chute. La dispute allait si bon train qu’elles n’avaient même pas remarqué que j’étais restée loin derrière. J’avais plus de mal à suivre les enjambées de ces trois girafes que mes cousines (Labouda et Boonguel) qui restaient collés aux pagnes des grandes. Si je préférais traîner et rêvasser, les deux choisissaient toulours la compagnie des adultes qui leur conférait leur air responsable.
Quand je leur ai raconté que j’avais croisé « un gros chat de ma taille », les tantes écarquillèrent les yeux, se mirent à marmonner des incantations. Il ne s’agissait plus de marcher vite mais de courir pour arriver à temps au hameau de Faayol Sal, la peule rouge aux plusieurs cheptels. Celle qui avait la réputation de ni vendre, ni échanger son lait. La peule à l’accent des nomades de jeery l’offrait gracieusement.
Finalement elles en oublièrent leur lait renversé qui avait été le sujet de conversation toute la matinée.
Quand elles retrouvèrent la parole, c’était pour trouver un autre itinéraire qui contournerait l’endroit devenu pour elles « La fosse aux panthères adultes. »
En évitant ce lieu, ces adultes n’avaient pourtant pas réussi à souiller de peur cette rencontre entre une jeune féline et un enfant. Car je pense encore tendrement à cette scène d’antan.
Safi
PS : Pour la correction, merci à Marianne Frey plus habituée à écrire pour les enfants, et merci à Thillo Ba pour la photo de Mame Penda.