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Critique // Sept Vies (2009)

Publié le 01 janvier 2009 par Noidor
Critique // Sept Vies (2009)

Tout démarre avec une phrase brutale, offensive, aiguisée: "En 7 jours, Dieu créa le monde. En 7 secondes, je détruisis le mien."
Pourquoi, comment, quand, qu'est-ce que c'est? Rien du tout, à vrai dire; parce que malgré l'effet de suspense soutenu que provoque ce genre d'entrées en matière, le propos du film ne tient pas véritablement compte du pourquoi ni du comment.
Le personnage principal, Ben Thomas (Will Smith), débarque l'air de rien, te glisse à l'oreille que son monde s'est écroulé en 7 secondes, mais sans t'expliquer pourquoi; puis il te laisse seul avec ta perplexitude (oui on dit comme ça) et se lance dans ce qui semble être une toute autre histoire, qui n'a pas vraiment de rapport logique avec l'histoire du monde qui s'écroule.
Dès le départ, donc, niveau compréhension globale des événements, on repassera. Parce qu'on y comprend, mais alors, peau de zob. Rien du tout. (Je ne parle que de l'enchaînement logique des événements, hein, qu'on soit bien d'accord là-dessus.) 10 minutes après que le film ait démarré, tu te retrouves connement scotché à ton siège (sans trop savoir pourquoi) et à te demander pourquoi comment qu'est-ce qui se passe là-dedans. La sensation est loin d'être désagréable quand l'effet de manipulation est maîtrisé et assumé, ce qui le cas à 100% dans Sept Vies.
Critique // Sept Vies (2009)

Oui, le spectateur est perdu dès le début, c'est normal, c'est voulu. Oui, le début du film est monté avec des scènes épileptiques qui s'enchaînent à tout va, c'est normal, c'est voulu. Et oui, tout ça va s'arranger au fur et à mesure, c'est prévu, c'est susurré à demi-mot en filigrane. Ouf.

Dans ce genre de situations, toi, en tant que spectateur lambda (non, ce n'est pas une insulte), tu es à la fois pris par l'intrigue (alors qu'elle est à peine dévoilée) et conforté par la promesse, qui revêt la forme de courts flash-backs à peine visibles, que viendra un moment dans le film où tout se révélera, où l'équation sera résolue et où tous les éléments se rejoindront pour former une toile logique pleinement appréciable.
Bon, je cause, je cause, mais ça nous avance pas trop tout ça.
Sept Vies, c'est une sorte d'histoire de destins croisés, mais pas du tout à la manière de Alejandro Gonzalez Inarritu (c'est son dada les destins croisés); Sept Vies ne met pas en parallèle des vies qui finiront par se croiser au milieu du film, mais un personnage central, Ben Thomas, qui élit lui-même les vies qu'il veut croiser. Une sorte de destin forcé, je te dis pas le paradoxe philosophique à faire bouillir les neurones.
Mais libre au spectateur de voir en ce film une histoire de destins, ou une aventure humaine, ou un tableau social, ou une peinture de sentiments, ou tout simplement un morceau de vie. La douceur et la retenue - dépourvue de toute mièvrerie, et le défi était difficile - du film sont telles que tout se déroule dans l'esprit du spectateur, qui est autorisé à ne voir que ce qu'il a envie de voir sans pour autant dénaturer la rhétorique du film. Tout est bon à prendre.
Critique // Sept Vies (2009)

Bon, je dois quand même avouer qu'en découvrant la prestation de Will Smith, j'ai eu un petit doute quant à la sincérité qu'il voulait exprimer. Tu le vois apparaître sur l'écran, il a pas l'air bien du tout dis donc. Alors là tu te dis: "Mais pourquoi il a le visage tout tordu comme ça?" A chaque fois on aurait dit qu'il s'était écrasé le petit orteil contre le coin du fauteuil, c'est crispant à la fin. Et en fait, plus tu le regardes, Will Smith, et plus te demandes: "Et si... Et si... Serait-ce possible?" Et c'est là que vient l'illumination: "Ah mais en fait il fait pas la grimace, il est triste!"
Diantre, c'était limite; t'as presque failli passer 2 heures à te demander s'il avait une rage de dents ou un truc comme ça.
Je suis peut-être un peu intransigeant sur ce point-là (faut bien être méchant des fois, ça paie, paraît-il), mais même si Will Smith offre une prestation d'une justesse rare, il y a des fois où on sait pas trop s'il est en plein deuil ou s'il est en train de se faire arracher les poils des jambes un par un. Pas très glop tout ça. Mais on lui pardonne, parce que malgré tout, il est excellent dans son rôle. (Et sache que j'aime pas trop cet acteur à la base, alors c'est un double compliment de ma part.)
Rosario Dawson, quant à elle, est magistrale (OUI! J'ose les grands mots), ainsi que Barry Pepper et Woody Harrelson, tout deux géniaux malgré la courte durée de leurs interventions.
Critique // Sept Vies (2009)

Il y a, à un moment donné, la venue soudaine et grandiose d'une chanson qu'on connaît tous: Feeling Good, interprétée par Muse. La particularité de cette chanson dans le film, c'est qu'elle se pointe sans raison apparente, elle n'est même pas en rythme avec les événements, elle ressemble à une espèce de transition médiocre ou à un bug dans la bande son.
Enfin, ça, c'est musicalement parlant. Parce que je sais pas si tu connais les paroles de Feeling Good, mais alors elles collent au propos du film avec une force incroyable. Feeling Good, ça dit:
'It's a new dawn, it's a new day, it's a new life for me'
Et ça, dis, c'est quand même une façon absolument magnifique de condenser 2 heures de film. C'est beau, tout simplement, et tout justement.
(J'aurais préféré qu'ils passent la version originale chantée par Nina Simone, mais bon. Faut peut-être pas en demander trop.)
Après une telle chanson, qui arrive comme un chien dans un jeu de quilles, les événements s'enchaînent, délicats, patients, méticuleux mais courageux, et 2 heures passent comme 7 secondes.
Le temps d'un film qui ne mérite pas seulement d'être vu, mais aussi et surtout d'être entendu.
Sortie le 14 janvier 2009.

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