La pause s'impose

Si seulement ça marchait aussi sur la vraie vie...
retour arrière efface, pause et réglage du volume.
Je crois que l’homme a accepté les vicissitudes successives du progrès à condition qu’il ait l’illusion de garder quelques pouvoirs vraiment importants. Un pouvoir qui se réduit aujourd’hui bien souvent à la manipulation de la télécommande, à la fois sceptre, baguette magique et substitut phallique qui donne au maître de maison l’illusion que quelqu’un encore lui obéit dans cette maison.
Depuis deux semaines, je me sens conforté dans ma virilité. Mes prérogatives ont fait un incroyable bon en avant : Papa Noël nous a apporté un enregistreur de DVD avec disque dur. Dans lequel l’intérêt n’est pas vraiment ni dans le DVD, ni dans le disque dur. Non. Mais, surtout, dans le TIMESHIFT. Le contrôle absolu du temps. Ha ! ha ! ha ! Tremblez coupures de publicité (c’est de saison). Frémissez restes de Poubelle la Vie qui encombrez les débuts de film. Prenez garde génériques trop longs, tirages du Kéno, résultats des courses et arrêts de jeux inopportuns. Plus un geste, David Pujadas. Et puis, surtout, en plus du sentiment de puissance c’est également utile.
Il faut dire qu’avec un bébé, on s’était habitué à louper systématiquement le début du film, parce qu’il fallait coucher la petite, et à s’endormir avant la fin, parce qu’on était crevé. Ce qui réduit l’intérêt de pas mal de productions cinématographiques. Là, d’une simple touche, hop, on fait une pause et on regarde ensuite quand on est prêt, ou on se le met sous le coude pour « plus tard » (comme les 180 cassettes vidéos jamais regardées qui sont descendues à la cave avec le magnéto).
Vous ne rêvez pas, c’en est fini de remettre la vaisselle à demain matin pour regarder la soirée spéciale Joe Dassin. Et comme l’enregistrement se fait à l’insu de votre plein gré, dès que vous regardez la télé, vous avez une seconde chance si, contre toute attente, vous vous êtes endormi au milieu de la rétrospective Ingmar Bergman.
Un autre intérêt majeur de l’appareil, outre la réalisation de pauses pipi impromptues à volonté, est qu’il permet de réaliser le rêve de tout homme : placer la mi-temps au début du match de foot. Autant je n’ai jamais supporté de regarder un match enregistré, autant un différé de 15 ou 20 minutes ne me gène absolument pas, même s’il est vrai que le petit saut dans le futur (enfin, le présent) est un peu tentant, juste pour voir le score.